Terrorisme : les gendarmes réservistes en renfort
Après les attentats de Conflans et Nice, la gendarmerie mobilise sa réserve pour sécuriser, en priorité, lieux de culte et d’enseignement. Reportage à Antibes avec une patrouille Vigipirate
Je les remercie d’être là. Je suis un ancien militaire, je sais me défendre. Mais quand ils ont tué mon copain à Nice, il y a eu l’effroi… » Augusto, 74 ans, discute avec plaisir avec les hommes en bleu. Le sacristain de l’église du SacréCoeur, à Antibes, salue la présence d’une patrouille de gendarmes pour la célébration d’un office, hier matin. Quinze jours après l’attentat de la basilique Notre-Dame à Nice, la menace terroriste reste bien présente dans toutes les têtes. Surtout un 13 novembre. Hasard du calendrier, c’est à la date anniversaire des attentats de Paris que nous rencontrons trois gendarmes au statut particulier. Trois réservistes. Ils forment l’un des détachements de surveillance et d’intervention Vigipirate (DSIV) déployés à travers la France depuis les attaques islamistes de ConflansSainte-Honorine et Nice.
Leur mission ? Dissuader, sécuriser, rassurer. Leurs priorités ? Les lieux de culte et les établissements scolaires, logiquement.
« On a été très durement touchés par les attentats », explique Fred, gendarme de 43 ans. Cet ancien militaire travaille dans la sécurité privée. Il a rejoint la réserve de la gendarmerie après les attentats de 2016. On parlait de Nice, déjà.
« Servir, un honneur »
Fred est mu par « l’envie de servir. On est là pour la population, et on vient renforcer nos camarades d’active. » Un camarade du même âge que lui, de faction un peu plus loin, tient à rester discret sur son identité. Mais pas sur sa « conviction » d’ancien militaire. « Servir la France, c’est un honneur ! »
Pour la servir, ils sont équipés de l’uniforme réglementaire. De l’armement incluant un pistolet. D’un gilet pare-balles. Et du masque chirurgical de rigueur.
Seuls 30 % des réservistes sont d’anciens gendarmes ou militaires. Les 70 % autres sont issus de la société civile, dotés d’un casier judiciaire vierge, d’un dossier sans faille et d’une formation de quinze jours, précise le lieutenant-colonel Pascal Massa. « Les réservistes sont vraiment un appui des forces d’active », explique cet officier adjoint au commandement du groupement des Alpes-Maritimes, conseiller réserve d’active du colonel Boualam. « On est en phase urgence attentat, tant en zone police qu’en zone gendarmerie », rappelle le lieutenantcolonel Massa. à ce titre, dix réservistes tournent entre Antibes-Juanles-Pins et Vallauris-Golfe-Juan. D’autres veillent au grain à Nice, Saint-Laurent-du-Var et Cagnes-surmer. Ces temps-ci, la gendarmerie de A.-M. mobilise entre 80 et 100 réservistes au quotidien… en incluant les missions liées à la tempête Alex et au reconfinement.
À la demande des parents
Dans ce contexte inédit, protéger ses concitoyens « a une valeur particulière », reconnaît le capitaine
Marc. C’est lui qui pilote le dispositif DSIV à Antibes. À 62 ans, ce gendarme à la retraite compte déjà une décennie comme réserviste. Parce qu’il a voulu « poursuivre ses missions de sécurisation, garder le contact avec la population. Quand on a ça dans le sang… »
Présent aux portes d’une église, donc. À la grande satisfaction de François, 83 ans, fidèle du SacréCoeur. « Je suis heureux de leur présence. Et fier. C’est l’un des seuls pays où ils vous protègent ainsi. » Présent aux entrées et sorties de classe, aussi. Hier midi, la patrouille poursuit sa mission devant l’écolecollège-lycée du Mont Saint-Jean. « Ah, c’est la gendarmerie ? On est rassurés », sourit Alain Lezcouach. Ce conseiller principal d’éducation est venu s’enquérir de la présence d’une voiture banalisée. « Beaucoup de parents se sont inquiétés avant la rentrée, confie-t-il. On est une cible. Comme tous les établissements, on a demandé une présence renforcée. Ce matin, l’armée était là à 11 h. Ça dissuade. »
Eve, grand-mère de 60 ans, a tenu à remercier les trois réservistes. « On est contents d’avoir ces gendarmes. Mon fils l’avait demandé. C’est malheureusement normal qu’ils soient là… Même si c’est un « normal » dont on se passerait bien. »