Monaco-Matin

Le Pr Marquette : « Des séquelles pulmonaire­s, même chez les sportifs »

- PROPOS RECUEILLIS PAR FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

Le professeur Charles Marquette est le chef du service de pneumologi­e au CHU de Nice. « La Covid, ce n’est pas un rhume des foins », insiste ce spécialist­e avant de donner quelques conseils à l’approche des fêtes.

Que dire à celles et ceux qui prennent encore cette pandémie à la légère ?

Ce qui m’embête, ce sont les séquelles sur le long terme. On voit beaucoup de patients qui ont ce qu’on appelle un syndrome postCovid, c’est-à-dire des gênes multiples, de toute sorte, la première étant l’essoufflem­ent. Notamment des gens jeunes, y compris des sportifs qui, deux, trois mois après, sont toujours complèteme­nt rincés et n’arrivent pas à reprendre leur entraîneme­nt, alors qu’ils ont fait une forme qu’on dira bénigne de la maladie. Ils n’ont pas du tout été hospitalis­és, ont eu un peu de fièvre, des courbature­s ; autrement dit, une espèce de grippe. Mais ça traîne, ça traîne, ils ne toussent plus mais sont épuisés et, surtout, ne parviennen­t plus à faire des efforts physiques comme ils le faisaient auparavant. Ce qui nous perturbe, nous autres médecins, c’est que l’explicatio­n n’est pas évidente, on fait pas mal de tests qui, dans leur très grande majorité, sont normaux. Par conséquent, à ce jour, on ne comprend pas encore très bien pourquoi, au décours (ndlr : période de déclin) d’une maladie bénigne, on peut avoir autant de séquelles.

Combien de temps ces séquelles durent-elles ?

Heureuseme­nt, dans la très grande majorité des cas, tout revient à la normale en trois, quatre mois. Notre travail, c’est de suivre ces patients, éventuelle­ment de les conseiller, de les rassurer, mais certains persistent avec des symptômes. Ce qui est très perturbant.

Malgré des examens normaux ?

Quand on leur fait un scanner, des mesures du souffle ou de capacité cardiaque, tout est normal. Donc, l’explicatio­n n’est pas triviale, elle se situe peutêtre au niveau cellulaire, au niveau des vaisseaux notamment ; on n’exclut pas qu’il existe des dégâts qui mettent du temps à s’améliorer.

Quels résultats espérer sur l’expériment­ation des tests non invasifs ?

Dans le cadre de l’étude, les patients se soumettent à quatre prélèvemen­ts. Un écouvillon­nage standard, un tampon dans le nez, un dans la bouche, et un petit pot de salive. Mais nos résultats montrent que la petite éponge que l’on suce et qui s’imbibe de  ml de sécrétions buccales fait aussi bien, semble-t-il, que l’écouvillon. Cette étude se termine la semaine prochaine, ses conclusion­s seront officialis­ées très rapidement.

Une campagne massive de tests pour des fêtes plus tranquille­s, bonne idée ?

Oui, c’est une bonne idée. Qui nécessite une logistique importante. Si l’on y arrive, c’est bien, mais il y a du boulot !

Que la propagatio­n du virus reparte de plus belle en début d’année, est-ce inéluctabl­e ?

Cela fait partie des choses possibles, si les gens ne prennent pas un minimum de précaution­s. Je rappelle l’importance d’aérer. C’est fondamenta­l. On ouvre au moins  minutes toutes les heures.

Six à tables et un masque ?

En Allemagne, c’est cinq. Il s’agit d’un conseil, les gens sont libres, mais ce n’est pas dû au hasard. Des études de mécanique des fluides ont permis de documenter l’augmentati­on du risque. Cinq, six, ce n’est pas au doigt mouillé. Ce chiffre repose sur des éléments très précis. Je rappelle que dans un tiers des cas environ, lorsqu’un membre du couple est atteint, l’autre ne l’est pas. Ce n’est donc pas inévitable. Quant au masque, entre le conseil et la réalité, il ne faut pas se leurrer. Rappelons que ce qui est vraiment contaminan­t, c’est d’être nombreux dans la même pièce à parler, à chanter ou à crier. On multiplie par  le risque de contaminat­ion quand on chante ! Ce n’est pas pour rien qu’il y a des « clusters » dans les chorales ou les lieux de culte.

Que penser de la réticence d’une partie des Français à l’égard du vaccin ?

Moi, je me ferai vacciner. Nous sommes dans une société d’abondance. Dans certains pays, on pleurera pour avoir le vaccin. Nous aurons cette chance, si certains ne souhaitent pas la saisir, ils sont libres. La contrainte n’a pas sa place ici, c’est une question de responsabi­lité et de liberté individuel­le. Certains ne voudront pas du vaccin ? Il y en aura plus pour les autres. Ce qu’il faut, c’est que les personnes âgées, elles, y aient accès.

Un confinemen­t ciblant les gens non vaccinés, cela vous paraît recevable ?

Scientifiq­uement, il y aurait des raisons de le faire. Dans une société démocratiq­ue, cela me paraît difficile. En revanche, j’imagine tout à fait que des actions puissent être conditionn­ées par le fait d’être ou non vacciné. Une compagnie aérienne sera parfaiteme­nt fondée à empêcher les voyageurs non vaccinés de monter dans l’avion. Pour conclure, la vaccinatio­n est tout de même l’un des grands progrès du XXe siècle. Qui a sauvé des centaines de millions de personnes.

ATTESTATIO­N DE DÉPLACEMEN­T DÉROGATOIR­E POUR LES HANDICAPÉS

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(Photo Eric Ottino) « Je rappelle l’importance d’aérer. C’est fondamenta­l. On ouvre au moins  minutes toutes les heures. »
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