Le Pr Marquette : « Des séquelles pulmonaires, même chez les sportifs »
Le professeur Charles Marquette est le chef du service de pneumologie au CHU de Nice. « La Covid, ce n’est pas un rhume des foins », insiste ce spécialiste avant de donner quelques conseils à l’approche des fêtes.
Que dire à celles et ceux qui prennent encore cette pandémie à la légère ?
Ce qui m’embête, ce sont les séquelles sur le long terme. On voit beaucoup de patients qui ont ce qu’on appelle un syndrome postCovid, c’est-à-dire des gênes multiples, de toute sorte, la première étant l’essoufflement. Notamment des gens jeunes, y compris des sportifs qui, deux, trois mois après, sont toujours complètement rincés et n’arrivent pas à reprendre leur entraînement, alors qu’ils ont fait une forme qu’on dira bénigne de la maladie. Ils n’ont pas du tout été hospitalisés, ont eu un peu de fièvre, des courbatures ; autrement dit, une espèce de grippe. Mais ça traîne, ça traîne, ils ne toussent plus mais sont épuisés et, surtout, ne parviennent plus à faire des efforts physiques comme ils le faisaient auparavant. Ce qui nous perturbe, nous autres médecins, c’est que l’explication n’est pas évidente, on fait pas mal de tests qui, dans leur très grande majorité, sont normaux. Par conséquent, à ce jour, on ne comprend pas encore très bien pourquoi, au décours (ndlr : période de déclin) d’une maladie bénigne, on peut avoir autant de séquelles.
Combien de temps ces séquelles durent-elles ?
Heureusement, dans la très grande majorité des cas, tout revient à la normale en trois, quatre mois. Notre travail, c’est de suivre ces patients, éventuellement de les conseiller, de les rassurer, mais certains persistent avec des symptômes. Ce qui est très perturbant.
Malgré des examens normaux ?
Quand on leur fait un scanner, des mesures du souffle ou de capacité cardiaque, tout est normal. Donc, l’explication n’est pas triviale, elle se situe peutêtre au niveau cellulaire, au niveau des vaisseaux notamment ; on n’exclut pas qu’il existe des dégâts qui mettent du temps à s’améliorer.
Quels résultats espérer sur l’expérimentation des tests non invasifs ?
Dans le cadre de l’étude, les patients se soumettent à quatre prélèvements. Un écouvillonnage standard, un tampon dans le nez, un dans la bouche, et un petit pot de salive. Mais nos résultats montrent que la petite éponge que l’on suce et qui s’imbibe de ml de sécrétions buccales fait aussi bien, semble-t-il, que l’écouvillon. Cette étude se termine la semaine prochaine, ses conclusions seront officialisées très rapidement.
Une campagne massive de tests pour des fêtes plus tranquilles, bonne idée ?
Oui, c’est une bonne idée. Qui nécessite une logistique importante. Si l’on y arrive, c’est bien, mais il y a du boulot !
Que la propagation du virus reparte de plus belle en début d’année, est-ce inéluctable ?
Cela fait partie des choses possibles, si les gens ne prennent pas un minimum de précautions. Je rappelle l’importance d’aérer. C’est fondamental. On ouvre au moins minutes toutes les heures.
Six à tables et un masque ?
En Allemagne, c’est cinq. Il s’agit d’un conseil, les gens sont libres, mais ce n’est pas dû au hasard. Des études de mécanique des fluides ont permis de documenter l’augmentation du risque. Cinq, six, ce n’est pas au doigt mouillé. Ce chiffre repose sur des éléments très précis. Je rappelle que dans un tiers des cas environ, lorsqu’un membre du couple est atteint, l’autre ne l’est pas. Ce n’est donc pas inévitable. Quant au masque, entre le conseil et la réalité, il ne faut pas se leurrer. Rappelons que ce qui est vraiment contaminant, c’est d’être nombreux dans la même pièce à parler, à chanter ou à crier. On multiplie par le risque de contamination quand on chante ! Ce n’est pas pour rien qu’il y a des « clusters » dans les chorales ou les lieux de culte.
Que penser de la réticence d’une partie des Français à l’égard du vaccin ?
Moi, je me ferai vacciner. Nous sommes dans une société d’abondance. Dans certains pays, on pleurera pour avoir le vaccin. Nous aurons cette chance, si certains ne souhaitent pas la saisir, ils sont libres. La contrainte n’a pas sa place ici, c’est une question de responsabilité et de liberté individuelle. Certains ne voudront pas du vaccin ? Il y en aura plus pour les autres. Ce qu’il faut, c’est que les personnes âgées, elles, y aient accès.
Un confinement ciblant les gens non vaccinés, cela vous paraît recevable ?
Scientifiquement, il y aurait des raisons de le faire. Dans une société démocratique, cela me paraît difficile. En revanche, j’imagine tout à fait que des actions puissent être conditionnées par le fait d’être ou non vacciné. Une compagnie aérienne sera parfaitement fondée à empêcher les voyageurs non vaccinés de monter dans l’avion. Pour conclure, la vaccination est tout de même l’un des grands progrès du XXe siècle. Qui a sauvé des centaines de millions de personnes.
ATTESTATION DE DÉPLACEMENT DÉROGATOIRE POUR LES HANDICAPÉS