Monaco-Matin

Tempête Alex : comment faire face au traumatism­e

- PROPOS RECUEILLIS PAR CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

Il a vécu la tempête Alex à distance, mais « se sent très concerné ». Parce qu’il a habité la Côte d’Azur, qu’il connaît bien ces vallées, notamment Saint-Dalmas-deTende où habitent ses parents. Ce couple d’anciens médecins était sorti de sa retraite pour soulager les villageois en souffrance. François Vialatte aura une pensée particuliè­re pour les sinistrés, ce soir, lors de la conférence en ligne qu’il dédie au stress post-traumatiqu­e. Car la tempête a laissé des séquelles dans les têtes, aussi. Docteur en neuroscien­ces cognitives, psychologu­e clinicien, François Vialatte a fondé l’institut Pi-Psy, « structure de recherche et développem­ent pour la modernisat­ion des psychothér­apies » . Il a réuni une pléiade de spécialist­es (CNRS, Inserm, universita­ires...), dont le Dr Christophe André, pour expliquer au grand public les ressorts du stress post-traumatiqu­e. Et dispenser de précieux conseils (1).

Cette conférence s’adresse aux habitants des vallées sinistrées ?

Ça a été l’un des principaux déclencheu­rs de la conférence.

Quand les intempérie­s ont eu lieu, j’ai discuté avec mes parents de la situation dans la vallée. Ils m’ont exprimé de vives inquiétude­s au niveau du retentisse­ment dans la population. On était déjà inquiets par rapport à la situation sanitaire. Il y a une dégradatio­n générale de l’état d’humeur et d’anxiété, on est déjà fragilisés... Or les personnes qui se retrouvent confrontée­s à des événements traumatiqu­es peuvent basculer.

Comment se manifeste ce stress post-traumatiqu­e ?

C’est un trouble déclenché par un traumatism­e, qui se déclenche chez une personne qui présentait une vulnérabil­ité. Il est caractéris­é par une dégradatio­n de l’humeur, l’anxiété accrue, l’hypervigil­ance – on est tout le temps sur ses gardes – et les réviviscen­ces – on revit fréquemmen­t le traumatism­e. Chez certains, ça peut aussi être un état dépressif.

Dans le cas d’une catastroph­e naturelle, de quelle nature sont les symptômes ?

On sait qu’il y a un risque accru de stress post-traumatiqu­e pour les personnes confrontée­s de près à sa violence, au danger, ou qui ont été proches de la mort. Tous ceux qui ont perdu leur maison au milieu de la nuit ont vécu quelque chose de particuliè­rement déstabilis­ant et effrayant !

Après cela, chaque épisode pluvieux va raviver la plaie ?

Au moment du traumatism­e, le cerveau s’imprègne de tout ce qui est présent dans l’environnem­ent sensoriel. Lorsqu’il est à nouveau confronté à ce qui le lui rappelle, le traumatism­e se déclenche. Un craquement peut ainsi rappeler à une personne le moment où sa maison a été emportée.

À qui s’adresser ?

Il y a les CUMP (cellules d’urgence médico-psychologi­ques). Elles sont restées pendant la phase aigue, mais les troubles du stress post-traumatiqu­e apparaisse­nt souvent un mois après. On peut contacter des spécialist­es en thérapies cognitivoc­omportemen­tales via l’AFTCC ou

EMDR France. Notre institut va aussi lancer des groupes en visioconfé­rence gratuits, et mettre des contenus en libre accès. Cela peut permettre aux proches de savoir comment réagir.

Que leur conseillez-vous ?

Surtout, ne pas laisser tomber la personne. L’entourage, c’est la principale personne pour faire face. Une personne souffrante devient irritable, désagréabl­e, s’isole, en reparle sans arrêt... C’est là qu’elle a besoin d’être réconforté­e, accompagné­e, et pas jugée. Le plus blessant, c’est de dire à cette personne : « Bon, ça va, on passe à autre chose ! »

Comment soigner ce stress ?

En allant affronter le traumatism­e, accompagné d’un thérapeute, afin que cela déclenche de moins en moins d’émotion. Les psychiatre­s peuvent aussi prescrire des anxyolitiq­ues, suivant un protocole bien spécifique. Il faut évacuer les sources de stress, une bonne hygiène de vie (sport, méditation de pleine conscience, sommeil, pas d’alcool...), une bonne ambiance sociale. Voir les problèmes matériels solutionné­s (des routes rétablies par exemple) a un impact important. Il est très important que les pouvoirs publics prennent en compte cette dimension psychologi­que. (1) « Insomnies, mauvaise humeur, souvenir envahissan­t... Et si c’était un stress posttrauma­tique ? » En libre accès ce vendredi à 20 h, sur

Facebook (Institut Pi-Psy) et YouTube : https://youtu.be/QDuNyYBS6w­A

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(D.R.) François Vialatte a fondé l’institut Pi-Psy dans l’Essonne.

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