Méditerranée : les pays doivent agir d’urgence
Le rapport RED 2020 sur l’état de l’environnement et du développement dans et autour de cette mer semi-fermée, alerte : les états riverains sont loin des trajectoires de durabilité indispensables
Difficile d’imaginer que la contamination microbienne et chimique, due aux activités humaines, « menace les organismes méditerranéens qui fournissent des substances bioactives indispensables pour développer de nouveaux médicaments destinés à traiter les principales maladies humaines, telles que le cancer. » Qui peut croire aujourd’hui que « les zones à probabilité élevée d’infection par le virus West Nile, liées au changement climatique, vont probablement s’étendre et inclure à terme la plupart des pays méditerranéens. » Ce virus du Nil occidental a déjà montré qu’il pouvait être mortel. Ce sont pourtant les scénarios catastrophe mais très fortement probables si rien n’est entrepris, qu’annonce le rapport RED 2020, sur l’état de l’environnement et du développement en Méditerranée. Ce rapport a été présenté dans le cadre de la conférence sur le changement climatique Med 2020.
Sous la menace de l’effet papillon
Quelque 150 experts y ont contribué sous l’égide du Plan Bleu, mandaté par les parties contractantes à la convention de Barcelone, à savoir les gouvernements des pays méditerranéens. Quel que soit le secteur - santé, social, économique, environnemental…les constats et les prévisions annoncent un avenir noir. La Méditerranée, mer semi-fermée autour de laquelle ces pays se sont développés, les unis à un même destin. Même si certains sont plus vertueux que d’autres, même si quelques-uns se portent mieux que d’autres, l’effet papillon les oblige à agir ensemble face aux dangers qui les menacent. Pourtant « ces pays sont loin de s’inscrire dans des trajectoires de durabilité que ce soit au niveau de la gestion des déchets, de la pollution de l’air et de l’eau, du changement climatique ou de l’emploi ».
25 % des décès auraient pu être évités
La seule intrusion d’eau salée dans les eaux souterraines provoquée par l’élévation du niveau de la mer - une des conséquences du changement climatique - peut avoir de multiples répercussions. Par exemple gêner l’irrigation des terres agricoles, priver certaines populations d’eau potable ou générer des problèmes de santé avec l’augmentation de la teneur en sel des sources d’eau potable. Et la région se réchauffe 20 % plus rapidement que la moyenne mondiale.
Ce qui en fait un hot spot du changement climatique.
La région méditerranéenne, une des destinations les plus convoitées au monde et l’une des routes maritimes les plus fréquentées, est polluée par environ 730 tonnes de déchets plastiques chaque jour, alerte le rapport. La présence de plus de mille espèces non indigènes menace la biodiversité et par là même certaines activités notamment la pêche. Les vies humaines sont en jeu. 15 % des décès en Méditerranée sont imputables à des facteurs environnementaux évitables, en particulier la qualité de l’air.
Permettre les actions en justice
« Le bassin méditerranéen fait face à des dommages environnementaux irréversibles », alerte le rapport RED 2020. À tel point que les experts qui l’ont rédigé souhaitent que les subventions néfastes pour l’environnement soient retirées. Ils prônent également l’adoption de dispositions législatives pour permettre des actions en justice. Lesquelles peuvent être évitées si les pays prennent « des décisions éclairées », a souligné François Guerquin, directeur du Plan Bleu. « Face à la complexité des décisions à prendre, ce rapport est une aide » car il met en évidence les impacts qu’elles peuvent avoir et propose des solutions. Promouvoir le poisson d’élevage alors qu’on le nourrit avec du poisson sauvage est un des schémas qu’il voudrait voir disparaître. Gaetano Leone, coordonnateur du Plan d’action pour la Méditerranée du Programme des Nations Unies pour l’environnement, partie prenante dans ce rapport, espère que la période post Covid-19 sera l’occasion d’un changement radical. Ce virus peut selon lui être un levier pour une prise de conscience planétaire de l’urgence à agir.