Le chamboule-tout
Patrick Vieira écarté, les dirigeants ont fait confiance à Adrian Ursea. Le technicien roumain sera épaulé de Frédéric Gioria et Didier Digard
Patrick Vieira n’aura donc pas résisté à la cinquième défaite de suite d’une équipe empêtrée dans une crise de résultats et de confiance. Ces derniers jours, il se doutait bien que son avenir ne tenait plus qu’à un fil compte tenu de la lente déliquescence du jeu produit, des buts encaissés à la pelle, d’une élimination précoce en Ligue Europa et des états de service de certains garçons achetés à prix d’or. Ses joueurs ne l’ont jamais lâché mais ils n’ont rien fait, non plus, pour que l’aventure s’étire dans le temps et au bout de sa troisième saison sur le banc niçois. Or, il ne s’attendait pas à ce que le couperet tombe dès jeudi soir, peu avant minuit, juste après sa conférence de presse d’aprèsmatch. Julien Fournier ne l’a pas fait de gaieté de coeur parce qu’il appréciait l’homme et les échanges « cash » qu’il pouvait avoir en toute transparence. Jean-Pierre Rivère, lui, était plus tranché.
« Vieira n’est pas responsable de tout »
Touché, l’ancien capitaine des Gunners, arrivé au Gym à l’été 2018 en provenance de New York, a pris acte de sa mise à l’écart dans les travées de l’Allianz Riviera, qu’il a quittées sur le champ, juste après ce nouveau revers contre le Bayer Leverkusen. Un match qu’il espérait, quelques heures plus tôt, comme celui du rebond, de la révolte. Dans la nuit, il s’est rendu au centre d’entraînement pour rassembler ses effets personnels, avant de quitter des lieux qui lui étaient devenus familiers. Il s’y sentait épanoui et y passait une grande partie de ses journées. Au club, de par son côté accessible, le champion du monde 1998 avait su tisser des liens étroits avec certains salariés. D’autres le regretteront moins, ce qui ne veut pas dire qu’il faisait l’unanimité contre lui. « Il ne faut pas tout lui mettre sur le dos, il n’est pas l’unique responsable» , souffle une source interne. Avec les supporters, le lien s’était distendu au fil des mois. Mais il n’avait jamais fermé la porte au dialogue, même après le coup de pression avant Leverkusen. La veille de ce qui restera le dernier match de son aventure sur le banc du Gym, Vieira croyait encore pouvoir redonner confiance à des joueurs en plein doute, atteints psychologiquement par des prestations insipides et pas toujours en phase avec certaines orientations prises sur le plan tactique. Il n’en sera rien, Vieira quitte Nice après trente mois, une septième place acquise au courage, sans attaquant, une qualification européenne (5e) tombée du ciel, quelques malentendus et peu d’instants de grâce.
Pour redonner un coup de fouet à leurs ambitions, les dirigeants niçois ont annoncé dans la foulée à Adrian Ursea, adjoint de Vieira, qu’il devenait le nouveau numéro un. Une promotion interne qui ressemble à celle que le duo RivèreFournier avait offerte à René Marsiglia, en novembre 2011. Depuis, les dirigeants niçois n’avaient plus jamais changé de coach en cours de route, et ce malgré les sept défaites de suite de Claude Puel en 2014 ou les difficultés de Lucien Favre lors de sa deuxième saison à la tête du club.
Retour à un staff maison
A 53 ans, le technicien roumain a eu vent d’un possible remaniement dès le début de la semaine, mais il n’a pas forcé la main de ses décideurs, ni fragilisé Vieira qu’il n’a jamais osé critiquer. Cependant, il a mis une seconde à dire oui à cette mission périlleuse, mais passionnante, le plus grand défi de sa carrière d’entraîneur qu’il ne voit en aucun cas comme une forme de consécration. Dès hier, il a réuni les joueurs, qui ont appris la nouvelle du licenciement de Patrick Vieira dans la nuit de jeudi à vendredi dans les médias, pour leur présenter son staff et la marche à suivre jusqu’au déplacement à Reims. Son téléphone n’a pas arrêté de sonner, mais il n’a pas pu lire tous les messages de félicitations avant de s’endormir, ce qui en dit long sur la perception qu’ont les gens de cet amoureux du jeu et des hommes. A ses côtés, Ursea pourra compter sur deux anciens capitaines de l’OGC Nice, Frédéric Gioria et Didier Digard. Deux adjoints aux caractères affirmés qui connaissent parfaitement la maison et l’identité d’un club qui a eu tendance à se ramollir ces derniers mois. « Eux, on sait qu’ils ne vont pas trop rigoler », ont lâché, en privé, plusieurs joueurs entre eux. Axé sur le groupe élite et beaucoup moins influent que sous Lucien Favre ou Claude Puel, Gioria va se retrouver en première ligne. « Il va être beaucoup moins effacé, il nous a prévenus» , confie un joueur. Pour renforcer le secteur de la préparation physique, un vaste chantier, Nice a fait appel à Nicolas Dyon, un autre ancien de la maison. Les nouveaux hommes forts du Gym ont eu deux séances pour préparer le déplacement à Reims. Le premier match du reste de leur vie.