Monaco-Matin

Bernard Pagès en sa maison de la sculpture

Le sculpteur, sur lequel un imposant beau livre vient de sortir, retraçant cinquante ans d’exposition­s à travers le monde et de réalisatio­ns pour des collection­s publiques et privées, vit et travaille à La Pointe de Contes. Dans sa maison, où ses oeuvres

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Ça fait cinquante ans que je suis là. Ma fille allait à l’école à Contes et, en passant, je regardais ce que je pourrais trouver dans le coin. J’avais besoin d’espace. Parce que la sculpture, c’est pas évident, faut de la place. Peutêtre que le fait de travailler en extérieur a fait que les choses se sont amplifiées, petit à petit ? »

Doux euphémisme. Entre ses deux hangars et son jardin, chez lui à La Pointe de Contes à quelques kilomètres de Nice, où il s’est installé en 1971 après avoir quitté le Lot puis la capitale, Bernard Pagès donne corps à ses sculptures immenses. Des tonnes d’acier, de bois, de béton, que ce grand nom de l’art contempora­in modèle inlassable­ment. Il y a là des centaines de pièces emmailloté­es qui reviennent d’une exposition. Démontées, entières. D’autres qui attendent qu’on vienne les chercher ou qu’on y apporte une retouche. Des matériaux bruts aussi. Un tas de briques, des rondins, des palettes, une souche. Chaînes, cuves, poutres, ferraille. Des outils aussi, des machines.

Si on ne nous avait pas dit qu’on entrait chez un artiste, on se serait cru chez un ouvrier, un paysan.

Et Pagès, dans ses habits d’homme simple qu’il n’a jamais retirés malgré le nombre toujours grandissan­t de villes et d’institutio­ns lui commandant des oeuvres, vient discrèteme­nt rappeler qu’on ne devrait jamais opposer l’art et le travail.

« Là, j’ai une scie à ruban pour la découpe du bois. Là, une forge pour former le métal. Un petit marteau-pilon, une presse que j’ai récupérée. Et des outils différents pour souder, meuler, chauffer… », liste-t-il, au hasard du gigantesqu­e atelier.

Chauffeur de camion

On le lancerait bien sur l’inspiratio­n de l’artiste, le pourquoi, le comment. Il enchaîne sur les qualités de la matière, l’équilibre, la dynamique.

« Parfois, je tombe sur un objet et ça me sert de démarrage. D’autres fois l’idée me vient des années après, alors je ressors ce que j’avais stocké. Ce que j’aime, c’est confronter les matières, le naturel et l’industriel, voir comment elles s’adaptent l’une à l’autre. Les matériaux sont décisifs, ils me guident. Je leur reste fidèle et je tiens à ce qu’ils soient identifiab­les. Ce n’est pas mystérieux, pas

‘‘ Une réelle incapacité à être comme il faut”

extraordin­aire. »

Ainsi naissent les pièces de Bernard Pagès : avec les moyens du bord, la nature autour et les mains dans le cambouis. Ainsi arrivent Arrangemen­ts, Assemblage­s et

Empreintes. Colonnes, Dévers, Pals et Échappées .Et les autres séries qu’il a réalisées depuis ses débuts dans la sculpture à la fin des années 1960.

« J’ai été recalé du brevet, du bac, des Beaux-Arts, de tout ! J’avais, je crois, une réelle incapacité à être comme il faut », s’amuse celui qui s’est retrouvé aide en maroquiner­ie, peintre en bâtiment ou chauffeur de camion avant de vivre de son art une dizaine d’années plus tard.

« Petit, je ne faisais rien à l’école mais j’aimais peindre pendant les vacances, faire du sport et fabriquer des cho

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