Monaco-Matin

Mort il y a  ans, Dumas, hôte de la Côte

L’auteur des Trois Mousquetai­res est venu plusieurs fois dans notre région, toujours en galante compagnie. Il s’est intéressé au bagne de Toulon et au Masque de fer à Cannes.

- ANDRÉ PEYRÈGNE magazine@nicematin.fr

Il y a cent cinquante ans, le 5 décembre 1870, mourait Alexandre Dumas. L’écrivain vint deux fois dans notre région.

La première en 1835. Alexandre Dumas effectue un voyage jusqu’à Florence dont il publiera le récit. Il est en compagnie du dessinateu­r Louis Jadin, qui illustrera ses écrits, et de la comédienne Ida Ferrier, sa future épouse qu’il qualifie de « statue de cristal ».

À Toulon, il est accueilli par un médecin ami des écrivains nommé Lauvergne, qui l’héberge dans sa bastide. Il visite le bagne. L’un des forçats l’a reconnu : « Je m’appelle Mulon, lui dit-il. J’étais valet de chambre à Paris de la comédienne Mademoisel­le Mars lorsque vous êtes venu lui rendre visite. Je suis ici pour lui avoir volé ses bijoux… »

Après une nuit passée à Hyères, les voyageurs reprennent la diligence pour Cannes. Une visite de l’île SainteMarg­uerite inspirera à Dumas l’épisode du Masque de fer dans le Vicomte de Bragelonne, dernier volume de la trilogie des Trois Mousquetai­res: « Et l’on vit, à la lueur des rouges éclairs, un homme vêtu de noir et masqué par une visière d’acier bruni... »

Les jeunes femmes pâles

Le voilà ensuite à Nice. Il a traversé le Var qui marque la frontière entre la France et le Royaume de Piémont Sardaigne. Il séjourne à l’Hôtel d’York sur l’actuelle place du Palais de Justice et se promène sur les Terrasses du bord de mer « qui n’ont peut-être pas leur pareille au monde ».

Il croise ces « jeunes femmes pâles et frêles qui viennent chaque année mourir à Nice » et observe ces abbés qui les confessent, « nourris de bonbons et de confiture, à la chevelure propre et parfumée, à la jambe rondelette au chapeau coquetteme­nt incliné sur l’oreille et au pied mignardeme­nt chaussé d’un soulier vernis à boucle d’or ».

Le lendemain, Alexandre Dumas et ses compagnons de voyage sont à Monaco. Il pleut à verse. Il se demande « comment il peut tomber une si grande pluie dans une aussi petite Principaut­é ! »

À Vintimille, lorsque le restaurate­ur lui présente la note du repas, il est surpris de voir une somme de 20 sous pour un… chat.

« - De quel chat s’agit-il, Signore ? - Mais… de celui que vous venez de manger, Monsieur ! »…

Deuxième séjour en 

Le deuxième séjour d’Alexandre Dumas dans notre région eut lieu en 1860. L’écrivain qui a à présent 58 ans a décidé d’aller rejoindre à Naples le Niçois Garibaldi, dont il écrit les mémoires, et qui, pour réaliser l’unité de l’Italie, a lancé avec son armée la conquête du Royaume des Deux Siciles. Alexandre Dumas s’est embarqué à Marseille à bord de l’Emma avec sa nouvelle maîtresse, la comédienne Emilie Cordier, âgée de 20 ans, qu’il a mise enceinte.

Dans le salon du bateau, tendu de satin broché, on prise le tabac turc qui est contenu dans des sacs d’étoffes précieuses accrochés au plafond. Dumas fait halte à Hyères : «Sivous dînez à l’Hôtel de l’Europe, écrira-t-il, vous aurez là un premier plan de palmiers, de lilas, d’orangers, de chèvrefeui­lles, un second plan de mûriers, d’oliviers et de chênes verts, percé de maisons à toits rouges ; et un troisième plan de rochers gris, de vagues bleues, de rivages découpés, de caps, de promontoir­es avec des lointains d’îles. Quand vous aurez vu cela, vous aurez vu l’un des sites les plus ravissants, je ne dirai pas de la ville d’Hyères, je ne dirai pas de la Provence, je ne dirai pas du Midi, je dirai du monde entier... » Après une nuit passée à Brégançon, revoici Dumas à Nice. Un mois plus tôt, par le plébiscite du 15 avril 1860, Nice est devenue française.

Vêtu d’un costume blanc, Dumas et sa maîtresse rendent visite à l’écrivain Alphonse Karr, qui vit dans une villa à Nice et qui a organisé une réception.

Parmi les invités se trouvent le poète Théodore de Banville et son amante la comédienne Marie Daubrun, la princesse russe Apraxine qui fait partie de l’aristocrat­ie niçoise et un photograph­e mondain parisien, Gustave le Gray, auteur de la première photograph­ie officielle d’un chef d’État français, en l’occurrence Napoléon III. Ce soir-là, paraît-il, on déboucha plus de vingt-cinq bouteilles de champagne. C’était connu, on aimait bien la bonne chère dans l’entourage d’Alexandre Dumas...

‘‘ - Quel est ce chat, sur ma note de restaurant ? - Celui que vous venez de manger, Monsieur !”

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