Retour sur une affaire hors normes
À la veille de la sortie du livre qui reprend l’enquête du magazine Society, retour sur les zones d’ombre qui entourent la disparition de Xavier Dupont de Ligonnès en 2011 dans le département
Le vendredi 15 avril 2011, à 16 h 10, Xavier Dupont de Ligonnès (XDDL) quitte le parking de l’hôtel Formule 1 à Roquebrune-sur-Argens où il sera filmé par des caméras de vidéosurveillance pour la dernière fois. À Nantes, une semaine auparavant, sa femme Agnès et leurs quatre enfants ont été sauvagement assassinés et enterrés sous la terrasse familiale. Depuis près de dix ans, le suspect numéro 1 reste introuvable.
Une borne kilométrique géante affiche Paris à 875 km. L’Italie à 105 kilomètres. Sur la RN 7, à Roquebrune-sur-Argens, le rond-point des Quatre-Chemins ressemble à une boussole routière pour voyageurs en transit.
Multiples pistes
Un rond-point stratégique posé au milieu d’une banale zone commerciale. Un rondpoint géant où les destinations sont à choix multiples, vers Le Muy, Fréjus/SaintTropez, les gorges du Verdon et, enfin, Nice et l’Italie. C’est ici que l’homme le plus recherché de France, depuis près de dix ans, a disparu. Évaporé.
Le rond-point des QuatreChemins est le triangle des Bermudes de Xavier Dupont de Ligonnès, suspect numéro 1 du quintuple meurtre de son épouse Agnès et de leurs quatre enfants, Arthur, Anne, Benoît et Thomas, assassinés entre le 3 avril et le 6 avril 2011 à Nantes.
Vendredi avril , à h
C’est ici, qu’une dernière fois, les caméras de vidéosurveillance ont enregistré les allées et venues du fugitif le vendredi 15 avril 2011. Il est 16 h 10, ce jour-là, et une silhouette s’éloigne du parking.
Il laisse derrière lui sa Citroën C5 bleue métallisée immatriculée 235 CJG 44 garée sur le parking extérieur. Dernier vestige de sa vie d’avant. L’homme quitte les lieux en tenant une large pochette en main, une housse de costume. La forme de la poche de la protection laisse présumer qu’il peut y dissimuler l’arme des crimes, une carabine 22 Long Rifle. L’ombre de XDDL ne va alors jamais cesser de planer, entretenant un mystère pesant, alimentant parfois des pistes farfelues. Vu à la terrasse d’un café, dans un supermarché, dans la rue, à l’étranger, reclus dans un monastère… Ce sont plus de 900 signalements qui ont été recensés. Jusqu’à l’épisode écossais du 11 octobre 2019 où la presse annonce l’arrestation de Xavier Dupont de Ligonnès à l’aéroport de Glasgow. Erreur sur la personne. Méprise. L’individu arrêté était un retraité d’origine portugaise. Retour à la case départ.
Mort ou vivant, Xavier Dupont de Ligonnès reste, à ce jour, une énigme.
« Le Formule de Ligonnès ! »
Comme dans toute énigme, il y a des pièces maîtresses. Des morceaux de puzzle qui, une fois assemblés, permettent d’avancer. Du moins en temps ordinaires. Mais dans l’affaire Ligonnès, rien n’est ordinaire. Jouxtant le fameux carrefour des Quatre chemins, l’hôtel Formule 1 de Roquebrune-sur-Argens est, malgré lui, devenu un personnage à part entière de ce cold case. Un acteur central d’un dossier criminel irrésolu. Aujourd’hui encore, l’enseigne est là, avec son affiche 4x3 jaune et rouge et un « Bienvenue » qui domine le fameux parking de l’établissement où Xavier Dupont de Ligonnès a été vu pour la dernière fois.
Coincé entre le restaurant La Grignotière, le Marché des affaires, un spécialiste des adoucisseurs d’eau et le sex-shop Jacquie et Michel – « au fond à droite » précise un panneau accroché aux grillages –, l’adresse propose des chambres (très) modestes avec vue sur le parking.
Sur place, personne ne souhaite s’étendre sur le passage de XDDL en ces lieux. L’actuelle responsable s’abstient de tout commentaire sur cet hôte tristement célèbre. Elle n’était pas là en 2011. Elle voit débarquer, avant chaque date anniversaire des équipes de journalistes.
Parfois des visiteurs remarquent que « c’est le Formule 1 de Ligonnès. S’ils viennent exprès pour faire un tourisme un peu spécial sur ses traces, ils ne me le disent pas… Je ne sais d’ailleurs pas dans quelle chambre il se trouvait, ni à quel étage ! ».