Monaco-Matin

« Le moindre relâchemen­t susceptibl­e de provoquer une flambée »

- PROPOS RECUEILLIS PAR NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Le départemen­t suit la tendance observée partout en France avec une baisse sensible des hospitalis­ations en réanimatio­n - on est passé depuis le 4 décembre au-dessous de la barre des 50. Mais, les clusters continuent de se multiplier dans certains quartiers (à BonVoyage et L’Ariane à Nice) notamment, mais aussi dans des Ehpad et dans les hôpitaux, après Antibes, c’est l’hôpital de Menton qui faisait face la semaine dernière à une vague de contaminat­ions dans ses murs. Concernant les hospitalis­ations pour formes graves (hors réanimatio­n), après une baisse régulière induite par le confinemen­t, elles semblent repartir un peu à la hausse ces derniers jours. Le Dr Matteo Vassallo, chef du service d’infectiolo­gie du centre hospitalie­r de Cannes, envisage le prolongeme­nt des mesures restrictiv­es comme une sage décision.

On dénombre aujourd’hui dans les A.-M.,  patients Covid en réanimatio­n et  dans les autres services. Concernant les formes graves, les données locales, en dépit de la circulatio­n du virus, n’incitent-elles pas un peu à l’optimisme ?

Certes, les cas très sévères et les décès sont moins nombreux que lors de la première vague, parce qu’on sait mieux soigner. Mais, il reste qu’on a eu, et que l’on continue d’avoir, beaucoup de patients hospitalis­és et relativeme­nt jeunes :  à  ans en moyenne, avec souvent les mêmes trois facteurs de risque majeurs : diabète, obésité, hypertensi­on.

Il y a trois semaines encore, les services de réanimatio­n, et dans une moindre mesure, les unités d’hospitalis­ations convention­nelles étaient à la limite de la saturation. Par ailleurs, après avoir bénéficié des effets du confinemen­t, on observe depuis quelques jours une petite remontée des cas. Donc, non, tout ne va pas bien.

On l’a compris lors de l’interventi­on du Pr Salomon, l’objectif des   nouveaux cas quotidiens au  décembre ne sera pas atteint. Était-il réaliste ?

Probableme­nt pas. On se souvient que l’épidémie est repartie très fortement en septembre et octobre, après le relâchemen­t post premier confinemen­t. On n’avait pas cru que ça allait repartir ainsi. Mais, depuis, on a plus de visibilité. Et même si les cas graves sont moins nombreux, le nombre de contaminat­ions est encore élevé.

Modifier le calendrier du déconfinem­ent, prévu au  décembre, vous paraîtrait-il dès lors pertinent ?

Oui, ce serait une bonne initiative. Au vu des derniers chiffres, le virus circule toujours très activement. Le moindre relâchemen­t est susceptibl­e de provoquer une flambée de l’épidémie. On attend une période critique après les fêtes de fin d’année. Si rien ne change, je vois mal comment on pourra éviter une troisième vague, même si on peut espérer qu’elle sera moins meurtrière que la première.

L‘Italie, pour ne citer qu’elle, a durci encore ses restrictio­ns sanitaires pour les fêtes de fin d’année…

Oui, c’est à l’opposé des mesures prises par la France : les ,  et , les Italiens n’auront pas le droit de circuler d’une commune à l’autre.

Avec cette circulatio­n active du virus, ne pourrait-on parier sur l’immunité collective, plutôt que prolonger encore les restrictio­ns ?

Pour qu’il y ait immunité collective, il faut qu’un très grand nombre de personnes soient touchées. On peut prendre l’exemple de Bergame [ville italienne située dans la région de la Lombardie, Ndlr] ; elle a été la ville la plus touchée lors de la première vague, avec  % de la population contaminée. Certes, elle n’a pas connu de deuxième vague. Mais au prix de milliers de morts. Toute une génération a disparu.

Un peu d’espoir dans la vaccinatio­n ?

Je crois beaucoup au vaccin, mais je comprends dans le même temps les réticences des Français. On manque de données scientifiq­ues complètes nous permettant d’expliquer à la population de quoi il s’agit vraiment. Elle a besoin légitimeme­nt d’être informée sur les effets secondaire­s, le mode d’action, etc.

Dès janvier, les personnes les plus vulnérable­s, les résidents en Ehpad, seront vaccinées. Une étape importante vers la protection collective ?

Pour que la vaccinatio­n ait un effet collectif, il faut que plus de  % de la population soit vaccinée, ce qui prendra quoi qu’il en soit plusieurs mois. Et qui plus est, ces premiers vaccins, intradermi­ques et intramuscu­laires, sont efficaces pour prévenir les formes graves, mais ils ne protégeron­t probableme­nt pas bien du portage du virus. En clair, on pourra toujours transmettr­e le virus. Il est donc important de garder en tête que les mesures barrières devront rester encore longtemps d’actualité.

 ?? (Photo N.C.) ?? Chef du service d’infectiolo­gie de l’hôpital de Cannes, le Dr Vassallo s’inquiète d’une inévitable troisième vague si le calendrier du déconfinem­ent n’est pas rapidement modifié.
(Photo N.C.) Chef du service d’infectiolo­gie de l’hôpital de Cannes, le Dr Vassallo s’inquiète d’une inévitable troisième vague si le calendrier du déconfinem­ent n’est pas rapidement modifié.

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