Monaco-Matin

« Ce qu’il s’est passé est historique »

- Textes : C. Roux / Photos : Ph. C., archives N.-M., AFP

✓ Ex-milieu internatio­nal français (-) et réalisateu­r du documentai­re sur le racisme « Je ne suis pas un singe » sorti en .

« Je me suis dit qu’il se passait quelque chose de grave quand j’ai vu les joueurs s’énerver de cette manière. Ma première pensée a été pour l’arbitre du centre. Au départ, malgré ce que les joueurs lui disent, il s’en fout et fait semblant de ne pas comprendre puisqu’il met un rouge à Webo. Si les joueurs restent sur le terrain et ne se révoltent pas, le jeu continue. Ce qu’il s’est passé est historique, on ne l’avait jamais fait. Il va être dur d’éradiquer le racisme, mais la chose la plus importante est qu’il y ait une prise de conscience des joueurs pour faire arrêter les matchs dans ce genre de situation. C’est un petit pas. Maintenant, il faudra voir le contexte à chaque fois. Mardi, Basaksehir était éliminé, le PSG pratiqueme­nt qualifié et il n’y avait personne dans le stade (en raison du huis clos et de la crise sanitaire, NDLR). C’était propice à ce genre d’action mais il suffisait qu’il y ait du bruit et les joueurs ne sortaient peut-être pas du terrain. Il y aura toujours le bénéfice du doute. Et puis est-ce qu’on doit arrêter un match si un supporter se met à faire des cris de singe alors que son équipe perd - ? Je pense qu’il y a suffisamme­nt de caméras dans les stades pour l’identifier et le condamner avec une interdicti­on de stade d’au moins trois-quatre ans. Vaincre le racisme passera par l’éducation. Un enfant ne naît pas raciste, il le devient en fonction de ce qu’il entend. »

Les joueurs du PSG et de Basaksehir ont quitté la pelouse du Parc des Princes, mardi soir après  minutes de jeu (match arrêté à la e). A l’unisson pour condamner les propos présumés racistes de Sebastian Coltescu, le quatrième arbitre de la rencontre. Alors qu’il souhaitait voir l’arbitre principal sanctionne­r pour contestati­on Pierre Achille Webo, le coach adjoint de la formation turque, Coltescu l’aurait désigné avec le terme « negru » (noir en roumain). De quoi mettre le feu aux poudres et pousser les deux équipes à rentrer au vestiaire. Un geste inédit dont la portée reste à mesurer. Est-ce un tournant dans la lutte contre le racisme ? Quatre anciens joueurs livrent leur opinion.

Pas une première...

L’histoire récente du football regorge de cas de racisme.

✓ Samuel Eto’o (FC Barcelone) -  février  à Saragosse L’hiver  est marqué par la révolte de Samuel Eto’o. L’attaquant du Barça se rend à Saragosse avec son équipe pour un match de Liga. A la e minute, il se précipite vers les vestiaires, excédé par les cris de singe qui s’élèvent des travées de la Romareda. Il refuse de jouer dans un stade où il avait déjà été pris pour cible un an plus tôt. Son entraîneur (Frank Rijkaard) et ses coéquipier­s le retiennent et il termine la rencontre. « Ce n’était pas la première fois que j’entendais des cris de singe, mais c’était la fois de trop », dira-t-il en  dans « Je ne suis pas un singe », un documentai­re d’Olivier Dacourt sur Canal +.

✓ Sulley Muntari (Pescara) -  avril  à Cagliari Le milieu ghanéen est averti à la e minute alors qu’il demande pour la deuxième fois à l’arbitre, Daniele Minelli, de passer une annonce pour calmer les supporters de Cagliari qui l’insultent. Avant lui, Blaise Matuidi ou Samuel Eto’o avaient déjà été malmenés dans ce stade. A bout, l’ex-joueur du Milan et de l’Inter quitte le pré dans les arrêts de jeu et se voit adresser un second jaune après la rencontre. Quelques jours plus tard, la commission de discipline de la Ligue italienne le sanctionne d’un match de suspension.

✓ Kalidou Koulibaly (Naples) -  décembre  à Milan Ce soir-là, le Napoli s’incline à Meazza face à l’Inter (-) et Kalidou Koulibaly, lui, voit rouge. Le défenseur sénégalais écope de deux jaunes coup sur coup (e). Le second sanctionne ses applaudiss­ements adressés à l’arbitre pour son inaction face aux cris racistes qui se sont abattus sur lui toute la rencontre. Les Napolitain­s ont demandé l’interrupti­on du match à trois reprises, en vain. « Je suis fier de la couleur de ma peau. D’être Français, Sénégalais, Napolitain. D’être un homme », twitte Koulibaly après la rencontre.

✓ Mario Balotelli (Brescia) -  novembre  à Vérone Déjà touché par le racisme lorsqu’il évoluait au Milan AC, à l’Inter ou lors de déplacemen­ts de l’OGC Nice à Dijon ou Bastia, Mario Balotelli a encore été visé la saison passée. Brescia se déplace à Vérone. A l’heure de jeu, « Super Mario » envoie le ballon en direction des tribunes. La haine et la bêtise ont encore frappé. Le maire de Vérone, le coach et le président de l’Hellas minimisent l’affaire et considèren­t que Balotelli a été chambré, rien de plus. Sanctionné d’un match à huis clos partiel, l’Hellas fait appel et le huis clos est levé.

✓ Moussa Marega (Porto) -  février  à Guimaraes L’attaquant de Porto disjoncte. Dix minutes après avoir inscrit le but de la victoire pour son équipe (-, e), le Malien est pris à partie par ses anciens supporters (-) et souhaite quitter la pelouse. Ses coéquipier­s et son coach, Sergio Conceiçao, ne parviennen­t pas à le calmer. Le natif des Ulis (Essonne) est remplacé. « Je me suis senti comme une merde », réagit Marega le lendemain. Pour beaucoup, les deux équipes auraient dû sortir du terrain.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Monaco