Plantu range ses crayons
#Metoogay : la parole sur les violences sexuelles libérée
Plantu, dessinateur historique du quotidien Le Monde, posera son crayon le 31 mars prochain, clôturant une collaboration de près de cinquante ans avec le journal, dans un contexte chahuté par le récent départ de Xavier Gorce, autre dessinateur maison.
Le dessinateur de presse a annoncé qu’il prendrait sa retraite peu après son 70e anniversaire. Une décision qui « n’a rien à voir avec la polémique autour du dessinateur Xavier Gorce », a-t-il souligné. Plantu a expliqué soutenir son confrère « mordicus ». « J’adore son style. On doit militer pour le décalage (dans l’humour). Le sérieux est en train de nous envahir, c’est le choléra de l’imaginaire », a affirmé le dessinateur, reprenant une phrase que lui avait dite Guy Bedos.
Xavier Gorce a quitté mercredi avec fracas Le Monde, reprochant au quotidien d’avoir cédé à la pression des réseaux sociaux en s’excusant d’avoir publié un de ses dessins, jugé choquant par de nombreux internautes. « Le 31 mars , a expliqué Plantu, je serai remplacé par des dessins de Cartooning for peace, l’association que j’ai créée avec Kofi Annan il y a quinze ans », et, en fonction de l’actualité, il y aura « un dessin américain, russe, vénézuélien, algérien ». Cette solution a été arrêtée d’un commun accord avec le directeur du Monde , Jérôme Fénoglio. Ce dernier explique avoir préparé avec le dessinateur, qu’il qualifie de « monument du journal », son départ « longtemps en amont » afin de marquer l’engagement «trèsfort» du quotidien au renouvellement du dessin de presse. Notamment en mettant en avant «dejeunes talents féminins » dans un milieu très masculin.
« Interprète » de l’actualité
Jusqu’ici Jean Plantureux de son vrai nom - croquait chaque jour l’actualité avec un crayon volontiers railleur et décalé, réunissant souvent plusieurs faits marquants du jour dans un unique éclairage humoristique.
« Certains matins, j’ai tellement peu d’inspiration que
Celui qui fêtera fin mars son anniversaire en même temps que son départ du quotidien du soir a vu défiler des décennies d’histoire avec son crayon. Le gaucher a commencé à dessiner sous le septennat de Pompidou...
(Ph. AFP) j’ai des idées noires », confiait-il en 2018, au point de « me dessiner, une pierre autour du cou, avant de me jeter au fond d’une bassine d’eau ».
Ce qui n’a pas empêché le dessinateur d’être prolifique -- avec 14 000 dessins à son actif -- essentiellement pour Le Monde mais aussi pour une quarantaine d’autres publications.
En 2019, il a confié l’essentiel de sa collection de dessins à la Bibliothèque nationale de France (BnF), constituée de 20 000 pièces et 500 dessins originaux.
Une colombe
Dans son premier dessin le 1er octobre 1972 dans Le Monde, Plantu avait croqué une petite colombe, un point d’interrogation dans le bec, marquant sa perplexité quant à un accord de paix qui mettrait fin au conflit américain en Indochine. Plantu ignorait alors que sa colombe deviendrait une véritable signature. Plantu, qui est devenu au fil des années une superstar du dessin de presse, n’épargne aucun sujet, parfois au prix de vives polémiques. L’assassinat de ses confrères de Charlie Hebdo ,le 7 janvier 2015, renforce le dessinateur dans son engagement pour la liberté d’expression, qu’il « va maintenant poursuivre, en France et dans le monde, dans les écoles, les hôpitaux, les lieux publics ».
Des milliers de gays ont témoigné hier sur Twitter, sous le mot-dièse #Metoogay, des violences sexuelles qu’ils ont subies. Ces témoignages surviennent quelques jours après le mouvement #Metooinceste, qui a vu nombre de personnes raconter les violences sexuelles subies au sein du cercle familial dans l’enfance ou l’adolescence, dans la foulée des accusations portées par Camille Kouchner contre Olivier Duhamel. Le mot-dièse #Metoogay a été également partagé après que l’élu PCF du Conseil de Paris Maxime Cochard et son conjoint ont été accusés de viol et d’agression sexuelle, ce qu’ils nient. Le Parti communiste leur a demandé de se mettre en retrait de leurs responsabilités au sein du PCF. Un jeune homme a affirmé avoir été violé par eux à l’âge de ans alors qu’il était dans une « situation particulièrement vulnérable ».