Monaco-Matin

L’infirmière était violente avec une centenaire

Tribunal correction­nel Au moment d’administre­r des médicament­s à une dame de 101 ans et face à son refus, la soignante s’était mise en colère. La scène avait été enregistré­e par une auxiliaire de vie

- JEAN-MARIE FIORUCCI * Assesseurs : MM.Adrien Candau et Ludovic Leclerc.

Une infirmière libérale de Beausoleil a comparu une seconde fois devant le tribunal correction­nel pour des faits de violences verbales sur personne vulnérable. À l’audience du 30 novembre dernier, le jugement avait été justement reporté afin d’écouter un enregistre­ment audio révélé et capté par une auxiliaire de vie avec son téléphone portable. Un témoignage édifiant, particuliè­rement instructif pour comprendre le comporteme­nt inappropri­é de la soignante le 14 décembre 2019. Ses propos arrogants et autoritair­es, vociférés pendant vingt-cinq minutes sur la bande-son diffusée dans le prétoire, ont démontré son irritabili­té pour une unique raison : la malade, décédée le 13 juin dernier à 102 ans, refusait de prendre ses médicament­s.

« Avalez ces médicament­s ou je vous les mets dans la bouche ! »

Dans ce dialogue de sourds, où alternent en permanence injonction, sommation, intimidati­on, complainte, peur, rejet, on éprouve à la fois de l’horreur pour la quadragéna­ire et une pitié excessive, presque de la faiblesse, pour la centenaire. « Avalez ces médicament­s ou je vous les mets dans la bouche ! Obéissez-moi ! Vous ne m’écoutez pas ! Je ne bougerais pas tant que vous ne les avez pas pris ! saisit-on au passage d’une part. Laissez-moi tranquille ! Arrêtez ! Non, non et non, je ne les prendrai pas ! perçoit-on en réponse sur le ton du gémissemen­t. Doit-on observer qu’il n’est pas toujours facile de composer avec des personnes très âgées en proie à des phénomènes de régression à la fois psychiques et intellectu­els, entraînés par la sénescence ?

Même si on ressent de l’exaspérati­on vis-à-vis de ces aînés, il faut être patient, les respecter. Dans cette optique, le président Jérôme Fougeras Lavergnoll­e, visiblemen­t choqué, à l’intention de faire réagir la prévenue. Il s’enquiert de ce qu’elle éprouve face à son comporteme­nt avec le recul. « Cela me désole d’entendre ce que j’ai fait, confesse l’infirmière. J’étais fatiguée. C’est la première fois que cette dame était dans un tel état »... Le premier substitut Cyrielle Colle prend le relais et rappelle à voix intense que la soignante a disjoncté au bout de trois minutes.

Deux mois de prison avec sursis

« Pourtant cette personne ni ne vous agresse, ni s’oppose. Et vous continuez de hurler. Votre comporteme­nt est inacceptab­le. Sans l’enregistre­ment, on n’aurait jamais cru qu’une victime pouvait subir autant de violences. Vous présentez soixante attestatio­ns de patients confiants qui louent vos compétence­s. Mais votre moralité était inadaptée pour la centenaire. La forcer jusqu’à mettre les médicament­s dans la bouche : c’est dangereux. La menacer de l’attacher au lit : c’est de la maltraitan­ce. C’est inacceptab­le ! On est sur des faits graves. Quatre mois d’emprisonne­ment assortis du sursis est une peine adaptée ».

Le tribunal a reconnu la prévenue coupable et l’a condamnée à deux mois d’emprisonne­ment avec sursis. En revanche, la décision n’apparaîtra pas sur son casier judiciaire afin de ne pas assombrir l’avenir profession­nel de l’infirmière.

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(Archive N.-M.) Sans l’enregistre­ment de l’auxiliaire de vie, le comporteme­nt de l’infirmière n’aurait jamais été remis en cause.

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