Monaco-Matin

Les Pénitents blancs de La Brigue en quatre chapitres

Les chapelles de L’Assomption et de l’Annonciati­on vont être restaurées grâce à la Mission du Patrimoine. On revient sur leur histoire et celle de la plus ancienne confrérie du Comté de Nice

- C.M.

Les chapelles de L’Assomption et de l’Annonciati­on ont tiré le bon numéro. Éprouvées par le temps et la tempête Alex, elles ont été sélectionn­ées pour rejoindre la quatrième édition du « Loto du Patrimoine ». Une mission confiée par le président de la République à Stéphane Bern pour la sauvegarde du patrimoine en péril.

« Les chapelles sont, faute d’entretien depuis des décennies, dans un état de conservati­on critique aggravé par la tempête , expose la Fondation du Patrimoine. Les toitures en lauzes [pierre plate utilisée comme tuile, N.D.L.R.] ne sont plus étanches et présentent même des trous qui laissent d’importante­s quantités d’eau s’infiltrer et percoler au travers des voûtes et des murs. » L’eau efface ses décors inspirés de la Bible et l’histoire d’une des plus anciennes confréries de pénitents du Comté de Nice. On rembobine.

■ Fondée en  

Les chapelles ont été construite­s au XVIIIe siècle par les pénitents blancs de La Brigue. Une confrérie catholique fondée en 1 395 par le prédicateu­r dominicain, Saint-Vincent Ferrier. Le prêcheur espagnol est resté célèbre pour ses prédicatio­ns publiques et conversion­s de Juifs et de Maures, parfois violentes.

Cette société rassemble des catholique­s laïcs, principale­ment des hommes, qui pratiquent la prière, la charité et font pénitence. Leurs missions diffèrent selon la couleur de leur robe, appelée « sac ». Les pénitents blancs opèrent plutôt auprès des malades et des pauvres.

■ Querelle de chapelles

Au XVIIe siècle, la confrérie de La Brigue se scinde en deux. D’un côté, il y a L’Assomption qui gère un hôpital et regroupe plutôt les propriétai­res terriens et la modeste aristocrat­ie locale. De l’autre, il y a l’Annonciade qui possède un mont frumentair­e détenu par la bourgeoisi­e urbaine. Cette dernière – sécessionn­iste – refuse d’abandonner le sac blanc et La Brigue devient le seul village du Comté de Nice à réunir deux confréries de même couleur. Pour se distinguer, elles construise­nt chacune une chapelle de part et d’autre de l’église Saint-Martin, ce qui inspirera leurs surnoms : les « pénitents blancs d’en bas », pour L’Assomption, et les « pénitents blancs d’en haut », pour l’Annonciade.

Ces édifices leur permettent de se retrouver pour prendre les décisions et voter à huis clos. L’importance architectu­rale et la richesse du décor reflètent la prospérité de la confrérie.

(De gauche à droite), les chapelles de L’Assomption et de l’Annonciati­on vont être rénovées, en partie grâce aux gains du « Loto du Patrimoine » lancé chaque année par Stéphane Bern.

■ L’apogée et le ■ Vers une déclin résurrecti­on ?

Au XIXe siècle, les confréries sont très influentes dans la communauté brigasque : la quasi-totalité des chefs de famille y ont un siège qui se transmet de façon héréditair­e. C’est à cette époque, d’ailleurs, que ces chapelles de style baroque sont restaurées et redécorées.

Mais la Première Guerre Mondiale va appeler au front une bonne part des effectifs des deux confréries. L’exode rural qui s’ensuit les affaiblit un peu plus. Les pénitents blancs d’en haut et d’en bas se réunissent vers 1930 avant de disparaîtr­e en 1947, lors du rattacheme­nt de la commune à la France.

La chapelle de l’Annonciati­on est classée aux Monuments historique­s en 1949 et utilisée comme musée d’art religieux abritant des reliques de Saint Charles Borromée, archevêque de Milan et grand artisan de la Réforme Catholique.

Les pénitents disparaiss­ent, mais leurs héritiers perdurent. En 2015, la confrérie est réactivée, ses statuts associatif­s sont redéfinis et approuvés l’année suivante par l’évêque de Nice. De nouveaux objectifs entrent en jeu comme la restaurati­on et l’entretien des deux chapelles de pénitents, le maintien et le développem­ent des traditions confratern­elles et surtout la célébratio­n du culte catholique romain.

Sans la Mission du Patrimoine, la néoconfrér­ie n’aurait pas eu les moyens de restaurer son bâti. 1,2 million d’euros sont nécessaire­s pour reconstrui­re les deux édifices religieux du village de La Brigue. L’État prendra à sa charge la moitié des dépenses et le départemen­t, 30 %. Le reste sera financé par les gains du « Super Loto Mission Patrimoine » organisé en septembre, lors des Journées du patrimoine. Pour que perdure son histoire.

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(Photos DR)

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