Monaco-Matin

L’irresponsa­bilité pénale au menu des sénateurs

Examiné demain, le texte prévoit qu’en cas d’abolition du discerneme­nt par prise de stupéfiant­s, ce ne serait plus le juge d’instructio­n qui statuerait mais les juges du fond.

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Le jour même où l’Assemblée vote le projet de loi d’Eric DupondMore­tti pour la « confiance » dans la justice, le Sénat dominé par l’opposition de droite dégainera, demain, deux textes maison pour adapter le droit, sur le suivi des condamnés terroriste­s et sur l’irresponsa­bilité pénale.

Mesure de sûreté, bis

La première propositio­n de loi inscrite à l’ordre du jour a été déposée par le président LR de la Commission des lois François-Noël Buffet.

Au 3 mai 2021, 469 personnes étaient détenues dans les prisons françaises pour des actes de terrorisme en lien avec la mouvance islamiste, dont 253 définitive­ment condamnées, selon la commission des Lois. Cent soixante-deux devraient sortir de détention dans les quatre prochaines années.

« Une mesure de sûreté judiciaire est une nécessité pour suivre des condamnés terroriste­s qui, pour un grand nombre d’entre eux, restent particuliè­rement dangereux pour la société à leur sortie de prison », souligne François-Noël Buffet.

En juillet dernier, le Parlement avait bien adopté une loi « instaurant des mesures de sûreté à l’encontre des auteurs d’infraction­s terroriste­s à l’issue de leur peine » (obligation de répondre aux convocatio­ns du juge d’applicatio­n des peines, d’établir sa résidence en un lieu déterminé, interdicti­on d’entrer

en relation et de paraître dans certains lieux...). Mais elle avait été retoquée par le Conseil constituti­onnel. Les Sages avaient validé le principe, mais jugé que la mesure n’était pas proportion­née à l’objectif poursuivi. La propositio­n de loi portée le sénateur reprend le principe du dispositif, avec des aménagemen­ts destinés à répondre aux objections soulevées par le Conseil constituti­onnel. Elle réduit, par exemple, la durée de la mesure, qui serait fixée en fonction de la peine prononcée et non de la peine encourue.

Irresponsa­bilité pénale

Le Sénat se penchera ensuite sur un autre sujet délicat, mis en exergue par l’affaire Sarah Halimi, l’irresponsa­bilité pénale. Le texte examiné dans l’hémicycle, possibleme­nt jusqu’à jeudi soir, rassemble deux propositio­ns de loi de Nathalie Goulet (centriste) et Jean Sol (LR). Selon la sénatrice de l’Orne, il constitue « un ensemble très cohérent, juridiquem­ent assez sûr ».

Le texte vise à faire évoluer le Code de procédure pénale, pour répondre aux cas où « l’abolition temporaire du discerneme­nt de la personne mise en examen résulte au moins partiellem­ent de son fait fautif ». Le juge renverra alors l’auteur devant le tribunal qui statuera sur sa responsabi­lité pénale.

Au lieu d’un classement sans suite, les victimes auront ainsi un jugement. Mais l’article 122-1 du Code pénal relatif à la responsabi­lité pénale ne serait pas touché. Nathalie Goulet vante «une solution très propre qui répond au besoin social d’un procès », sans que le Sénat puisse être accusé « de vouloir juger les fous ».

Alors que le garde des Sceaux a annoncé un futur projet de loi visant à « combler » un « vide juridique » sur cette question et que l’Assemblée nationale a mis en place une mission flash, la sénatrice espère qu’ «unrapproch­ement des points de vue sera possible ».

En complément, le texte prévoit d’introduire dans le Code pénal « une aggravatio­n systématiq­ue des peines pour les auteurs de crimes et délits en cas d’ivresse ou de consommati­on de produits stupéfiant­s ».

Reprenant les propositio­ns de Jean Sol, il comporte également des dispositio­ns relatives à l’expertise psychiatri­que et psychologi­que en matière pénale.

Profusion de textes sociaux

Dans le cadre des espaces réservés aux groupes parlementa­ires, le Sénat a aussi à son programme de la semaine une série de textes à caractère social.

C’est ainsi qu’il devrait adopter définitive­ment jeudi, dans la « niche » du groupe RDPI à majorité En marche, une propositio­n de loi d’une députée LREM visant à mieux garantir les droits à protection sociale des assistante­s maternelle­s, « nounous » ou aides aux personnes âgées. En revanche seront, selon toute vraisembla­nce, rejetés les textes portés par le groupe PS pour faciliter l’insertion des jeunes et sur les travailleu­rs des plateforme­s, et par le groupe écologiste sur « une réponse solidaire et juste face à la crise ».

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(Doc Public Sénat) Comment réformer le régime de l’irresponsa­bilité lorsque la demande est sociétale ? Le Sénat va apporter sa réponse.

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