Le pari de Macron
Sous les pseudonymes de McFly et Carlito, David Coscas et Raphaël Carlier, sont apparus, hier, comme les héros du weekend. Le début de l’histoire date déjà de quelques semaines : les deux vidéastes avaient été choisis pour illustrer, à leur manière, un clip de campagne gouvernementale sur les gestes barrières. Une façon, jugée moderne, de s’adresser par le biais des réseaux sociaux, aux jeunes, bien sûr, longtemps indifférents, et même incrédules sur l’usage des masques ou du lavage des mains pour ralentir la contagion du Covid-. Si le clip dépassait les dix millions de « viewers », avait promis le président de la République, il accepterait de se lancer avec eux, dans un concours d’anecdotes, enregistrées à l’Elysée, et diffusées sur leur chaîne personnelle Golden moustache. McFly et Carlito ont largement gagné le pari et Emmanuel Macron s’est plié, non sans un plaisir évident, au concours devant les caméras. Il a donné une note footballistique à l’épreuve, en faisant de Kylian MBappé, le virtuose du ballon préféré des Français, son complice dans le jeu des fausses questions et vraies réponses. En quelques heures, hier, les images du défi lancé par le Président aux Youtubeurs, dépassant les quatre millions de vues, ont fait un tabac.
Pour Emmanuel Macron, cette apparition pour le moins inédite a deux objets. Le premier est de montrer que la page de la Covid se tourne, et qu’il est temps de retrouver la vie d’avant, avec ses terrasses de café et sa culture. Autant célébrer ce moment, où le Président jouit, largement à cause de la réussite, tardive mais réelle, de la vaccination, d’une embellie dans les sondages. Deuxième objet, et pas le moindre, de cet échange avec McFly et Carlito : renouveler la communication présidentielle, à moins d’un an de l’élection. C’est-à-dire, surtout, donner du Président une image différente. On l’a longtemps dit arrogant. Il est temps de paraître plus accessible. On lui a fait reproche d’être trop loin des Français et ne pas chercher à s’en rapprocher. Il est temps, en somme, de démontrer qu’il leur ressemble. Ce nouvel épisode de communication fait évidemment grincer quelques dents. Applaudi par la majorité pour son côté dynamique, pour son « audace » et parce qu’elle brise les codes, elle est dénoncée par l’opposition. Politique-spectacle, abaissement de la fonction présidentielle, l’occasion est belle, en effet, d’ironiser, ou de s’inquiéter de l’appropriation, par le Président, des techniques et du marketing du privé. Et c’est vrai, il s’agit, dans cet exercice, auquel il s’est livré avec le plus grand naturel, de gagner à sa politique les jeunes auxquels il s’adresse et qu’il veut conquérir, sans justement dire un mot de politique. Chapeau, l’artiste, ou coup d’épée dans l’eau ?
« L’échange avec McFly et Carlito ? Une façon de renouveler la communication présidentielle, à moins d’un an de l’élection. »