Régionales : vers une abstention massive
À dix mois de la présidentielle, les enjeux des régionales et départementales sont multiples. Mais l’abstention risque d’être aujourd’hui le grand vainqueur.
Quelque 48 millions d’électeurs sont appelés aux urnes aujourd’hui, mais combien iront ? D’après les sondages, le taux d’abstention promet d’atteindre des proportions abyssales, autour de 60 %, au moment où l’épidémie de Covid, qui a repoussé le scrutin de trois mois, reflue, et la vie retrouve un semblant de normalité.
Les compétences dévolues aux régions (transports, lycées, formation professionnelle...) et départements (collèges, RSA, aides sociales...) touchent pourtant au plus près à la vie quotidienne des Français. Mais, au bout d’une campagne anesthésiée par la crise sanitaire, l’intérêt n’a jamais décollé pour un scrutin dont les enjeux sont à la fois exacerbés et dépassés par la proximité de l’élection présidentielle.
Pécresse et Bertrand jouent leur carrière
Deux candidats potentiels de la droite à l’Élysée, Xavier Bertrand et Valérie Pécresse – tous les deux exLR – ont annoncé qu’ils arrêteraient la politique au soir du second tour le 27 juin s’ils n’étaient pas réélus dans les Hauts-de-France et en Ile-de-France, contribuant ainsi à nationaliser l’échéance. Mails ils restent bien placés selon les derniers sondages, tout comme Jean Rottner (LR) dans le Grand Est et Laurent Wauquiez (LR), autre postulant possible à l’Élysée, en Auvergne-Rhône-Alpes.
Le RN pourrait remporter la première région de son histoire
Le Rassemblement national compte, lui aussi, utiliser ces régionales comme rampe de lancement pour 2022. Vendredi encore, Marine Le Pen, candidate déjà déclarée à l’Élysée, a insisté sur « la portée nationale de
ce scrutin » alors que son parti ne semble jamais avoir été aussi bien placé pour remporter la première région de son histoire. Favorisé par un scrutin à la proportionnelle, le RN est donné en tête au premier tour dans six régions sur treize, en Paca, CentreVal-de-Loire, Bourgogne-Franche-Comté, Occitanie, Nouvelle-Aquitaine et en Bretagne. Dans les sondages, il talonne en outre les présidents sortants dans les Hauts-de-France, Grand Est et en Normandie.
Le Front républicain fissuré
En 2015, l’élan du parti d’extrême droite était déjà fort à l’issue du premier tour. Mais il s’était brisé contre la digue du front républicain, dressée notamment par le sacrifice du Parti socialiste en Paca et dans les Hautsde-France.
Cette fois, ce barrage semble beaucoup plus fragile, et les partis traditionnels plus réticents à s’effacer complètement pour les six prochaines années.
L’entre-deux tours promet des tractations intenses, jusqu’au dépôt des listes mardi 18 h. Le psychodrame en Paca, où le rapprochement entre le président LR sortant Renaud Muselier avec LREM a précipité la droite dans une crise ouverte, a donné un avantgoût des empoignades à venir.
Il y a six ans, la droite et le centre étaient parvenus à conserver sept régions, et le PS cinq. Depuis, ces deux grandes forces de gouvernement ont dévissé au niveau national, mais comptent sur leur ancrage local pour limiter les dégâts.
La gauche divisée
Dans son ensemble, la gauche part divisée, à l’exception des Hauts-de-France, où l’écologiste Karima Delli est parvenue à la rassembler autour de sa candidature.
La position du PS est précaire, alors que les Verts comptent profiter de la dynamique qui les a portés à la tête de plusieurs grandes villes aux municipales. Les écologistes misent notamment sur un succès en Pays de la Loire avec Matthieu Orphelin.
Vers un remaniement gouvernemental ?
La majorité présidentielle aborde le scrutin avec des ambitions modestes, avec le ministre Marc Fesneau, un MoDem comme principal atout dans le Centre-Valde-Loire. Elle cultive surtout l’espoir de se placer en position de faiseur de rois. En cas de grosse claque, la question d’un remaniement gouvernemental risque de se poser, alors qu’Emmanuel Macron doit exposer début juillet la feuille de route pour la dernière année de son quinquennat qu’il souhaite «utile».