Un nouveau scénario politique ?
La défaite est claire : elle est avant tout, dans le scrutin d’hier, celle du mouvement de Marine Le Pen. Le chiffre d’abstentions, considérable il est vrai, ne peut pas changer cette évidence : le « plafond de verre » est resté solide pour empêcher ses candidats de réussir à s’emparer d’une seule région en France. Et le front républicain, dont on croyait qu’il avait vécu, a, lui aussi, montré une vitalité retrouvée. Déjà, dès le premier tour, le Rassemblement national avait marqué le pas, puisqu’il n’était en tête qu’en Région Sud seulement, alors qu’en , premier parti au niveau national, il précédait ses concurrents dans six régions. C’est bien pourquoi tous les yeux étaient tournés, depuis dimanche dernier sur le combat qui opposait Renaud Muselier à Thierry Mariani. En ouvrant sa liste à quelques partisans du président de la République, Renaud Muselier avait joué gros. Il s’était attiré les foudres, dans son propre parti, LR, de nombre de dirigeants, convaincus qu’une telle alliance était intolérable et, de surcroît, périlleuse. A l’arrivée, hier soir, le nouveau président de la Région Sud, avec , % des suffrages, a montré qu’il fait plus et mieux que ne le pensaient ses propres amis. Victoire d’autant plus importante
« Faire oublier ce scrutin, ce sera sans doute la première réaction d’Emmanuel Macron. »
qu’elle a été remportée dans une région, la seule peut-être que le Rassemblement national pensait pouvoir gagner avec Thierry Mariani, et que la lutte a été si farouche, presque cruelle, entre les
deux hommes cette semaine, qu’elle en devient presque symbolique.
Marine Le Pen, malgré la fausse sérénité de ses commentaires, dimanche soir, se pose désormais bel et bien la question : après tant de pertes sur le terrain, et pas de moindres – Jordan Bardella en Ile- de-France et Sébastien Chenu dans les Hauts-de-France –, qu’en est-il de l’avenir de sa candidature à la future présidentielle ? Ce plafond qu’elle ne peut pas franchir est-il destiné à contenir toutes ses espérances ? Elle ne pourra mettre en cause le faible taux de participation : ce sont ses électeurs, les études le montrent, qui se sont le plus souvent abstenus.
Les gagnants, évidemment, ce sont les sortants, de gauche et de droite, qui se sont réinstallés dès hier soir dans leurs bureaux. Mais ce n’est pas la gauche qui menace Marine Le Pen, elle le sait, c’est la bonne santé retrouvée de la droite classique qui a fait la preuve, hier, qu’elle n’était pas condamnée dans une élection présidentielle au troisième rang, qu’elle pouvait jouer les seconds rôles, brisant ainsi le duel attendu entre la présidente et le Président.
C’est ainsi que commence, peutêtre, un nouveau scénario politique où la droite est en mesure de mener le jeu, à un moment précis où le parti présidentiel a fait la preuve de la faiblesse de son implantation locale. Son risque n’est désormais plus le vide, mais le trop-plein. Xavier Bertrand a, dès heures, délivré un véritable message de candidature. Laurent Wauquiez, Valérie Pécresse sont aussi, depuis hier, dans cette espérance. Le choix devra se faire entre ces trois personnages-là. Et chacun sait que, si Bertrand ne concourra pas à la primaire envisagée par LR, son ex-parti dont il a pris ses distances en , les risques d’un « départage » entre candidats à la candidature sont énormes : affrontements et divisions ne sont jamais loin. Gageons que, depuis l’Elysée où il resté hier soir en très petit comité, Emmanuel Macron a vu son échiquier, légèrement au moins, bousculé. Faire oublier ce scrutin, ce sera sans doute sa première réaction.