Monaco-Matin

Xavier Garcia : « Il y a eu un manque de lucidité »

Le patron de la Fédération du PS 06 jette l’éponge. Il explique les raisons de son départ et revient sur le fiasco des régionales, convaincu qu’un « autre chemin était possible ».

- PROPOS RECUEILLIS PAR LIONEL PAOLI lpaoli@nicematin.fr

Il arrête. Parce qu’il n’y croit plus. Parce qu’il ne parvient pas à imaginer un avenir à son parti. Parce qu’il n’a plus la force de « déplacer les montagnes ». Fin août, Xavier Garcia cessera de diriger la Fédération du PS des Alpes-Maritimes. Une décision mûrement réfléchie qu’il décrypte, regard clair mais gorge nouée.

Fin août, vous ne briguerez pas de nouveau mandat. Pourquoi ?

Pour des raisons qui sont à la fois politiques et personnell­es. Les dernières élections ont marqué la fin d’un cycle. C’est le terme d’une période de ma vie qui a commencé en décembre . Officielle­ment, je reste premier fédéral jusqu’à la fin de l’été. Mais dans les faits, je n’exerce plus mes fonctions. Dans ma tête, c’est déjà terminé…

Depuis quand ?

Depuis le retrait de Jean-Laurent Félizia [au lendemain du premier tour des régionales, N.D.L.R.]. Si j’avais été élu conseiller régional, ç’aurait été un nouveau départ.

Vous avez fait deux mandats complets ; vous le regrettez ?

Pas du tout. Ça a été une période heureuse, mais aussi prenante et difficile. Lors du dernier congrès, en , j’avais déjà songé à partir. Il y avait une forme de lassitude liée aux démissions en cascade des militants tentés par l’aventure Macron.

Cependant, vous êtes resté…

Parce que j’avais encore l’énergie nécessaire pour tenter de remonter la fédération et le parti, ce que je me suis astreint à faire depuis trois ans. Je n’ai réussi que partiellem­ent.

[Silence] Je ne suis pas responsabl­e de tous les maux de la gauche, mais je veux aussi assumer ma part de responsabi­lité. Aux départemen­tales, on n’a pas eu de second tour. Et aux régionales, le scénario du retrait s’est imposé. On ne peut pas rester en poste éternellem­ent devant l’échec.

Vous étiez favorable au maintien de la liste de gauche au second tour des régionales ?

Le dimanche soir, les premiers résultats sortis des urnes donnaient un écart très faible entre les listes de Muselier et Mariani. À ce moment-là, je pensais qu’il existait un chemin entre la victoire du RN et notre effacement. Le lundi matin, c’était plus mitigé… Thierry Mariani était nettement en tête, les sondages annonçaien­t une seconde manche très serrée.

Muselier avait vraiment besoin de vos voix pour gagner ?

Avec le recul, on peut en douter puisqu’il a finalement été réélu avec  points d’avance. Mais à l’heure du choix, on ne le savait pas. [Amer] Le résultat, c’est que le front républicai­n est devenu un dû. Aussi bien pour la droite que pour nos propres états-majors nationaux, qui ont déclaré que se maintenir au second tour était une « dérive personnell­e » ! Cela fait de nous des supplétifs de la droite républicai­ne. Je ne suis pas entré en politique pour ça...

Vous en voulez aux instances qui ont fait pression pour le retrait de votre liste ?

Davantage sur la forme que sur le fond. Le dimanche soir, Olivier Faure m’a appelé pour exiger le retrait. Ça ne s’est pas bien passé : à ce moment-là, rien ne le justifiait. On aurait pu envisager une fusion technique avec Renaud Muselier.

Muselier aurait accepté ?

Je l’ignore. S’il avait refusé, cela aurait pu guider notre réflexion. [Silence] Il y a eu un manque de lucidité collective. Avec le recul, je me dis que j’aurais dû prendre les choses en main. J’aurais pu aider Félizia à trouver un autre chemin. Lundi matin, c’était encore jouable. À  h , après le procès politique subi par Jean-Laurent, c’était terminé…

Vous avez le sentiment que les dés étaient pipés dès le départ ?

C’est une évidence. Le retrait avait été acté en amont par les instances nationales. Dans ces conditions, comment voulez-vous motiver les militants ? Derrière tout cela, il y a de l’humain…

Olivier Faure, premier secrétaire

du PS, comprend votre décision de jeter l’éponge ?

Il la regrette, mais il comprend. Quand vous sentez que vous n’avez plus l’énergie pour refaire le même chemin, il faut arrêter. En , c’était différent. On avait fait trois mandats à la tête de la Région, François Hollande était à l’Élysée… On pouvait se permettre de retirer une liste. Aujourd’hui, c’est une euthanasie ! Comment allez-vous expliquer aux électeurs, la prochaine fois, qu’il faut voter pour vous ? Moi, je ne sais pas faire !

Abandonner la tête de la liste de gauche à Europe Écologie - Les Verts, c’était une bonne idée ?

[Soupir] On n’a pas eu le choix. Pour être honnête, si Olivia Fortin avait conduit la liste, je ne crois pas que ça aurait changé grandchose. On est parti de très loin. Il nous a manqué cinq ans, dans l’hémicycle, pour constituer une équipe. Le seul enjeu, c’était de retourner siéger à Marseille. On ne pouvait pas gagner.

Qui peut vous remplacer àlatêteduP­S?

“Je ne suis pas entré en politique pour ça... ”

La décision ne m’appartient pas. J’ai formé deux personnes : Raphaël Galmiche, qui a été candidat dans le canton de Nice , et Frédéric Pellegrine­tti, chef de file du PS à Menton. Ils s’entendent très bien et pourraient travailler ensemble.

“Le retrait, aujourd’hui, c’est une euthanasie ! ”

Un retour de Patrick Allemand vous paraît possible ?

Patrick est un homme d’expérience dont les avis sont toujours précieux. Mais je pense qu’aujourd’hui, il faut aller de l’avant. La fédération a besoin d’aborder un nouveau cycle, pas de retourner à l’ancien.

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(Photo archives François Vignola) « Avec le recul, je me dis que j’aurais dû prendre les choses en main. J’aurais pu aider Félizia à trouver un autre chemin », affirme Xavier Garcia.

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