La maison bioclimatique c’est du béton... de chanvre
Dans le Var, Daniel Bayol a fait du combat de sa vie la réalisation d’habitations quasi autonomes et économes. Une réalité reconnue par les pouvoirs publics. Il veut créer une filière courte pour parachever son (gros) oeuvre
Cent quarante euros de chauffage à l’année à Vidauban, 35 euros/an dans une maison à Ollioules de 140 m2 ; une étude du Cerema certifiant que
(1) le béton de chanvre réduit la consommation énergétique de 70 % ; une résistance au feu EI 240 assurant une sécurité optimale aux occupants ; une habitation « passive » construite avec des matériaux dits biosourcés qui assurent naturellement la climatisation l’été et le chauffage l’hiver...
Ceux que l’on traitait hier d’écolos rêveurs ont prouvé au fil du temps que la construction intelligente et bien pensée peut parfaitement s’intégrer dans la nécessité de plus en plus prégnante de sauver la planète.
Cela, Daniel Bayol, créateur de « DB-chanvre », en a fait la mission d’une vie, lui qui, du jour au lendemain, a quitté, après 12 ans au service de son premier bureau d’études, les bons vieux agglos pour prendre son bâton de pèlerin et prouver que l’on peut construire (ou rénover) un logement quasi autonome et vertueux, grand consommateur de CO2. Jusque dans les eaux usées, traitées dans un assainissement par phytoépuration, rendant au jardin ou à la nature une eau claire et sans chimie.
Un showroom habité
Le créateur de DB chanvre a roulé sa bosse et appris, au point de devenir un formateur reconnu qui, en une décennie, a posé les bases d’une filière de professionnels tournés vers l’habitat bioclimatique utilisant des matériaux biosourcés.
A Vidauban, la maison qu’il a édifiée, et qu’il doit encore terminer faute de temps, est un petit chefd’oeuvre, non pas d’imagination mais « d’application de principes physiques simples ».
C’est en quelque sorte son showroom, preuves à l’appui, puisqu’il y demeure.
Ici, tout est conçu pour que des matériaux exclusivement naturels comme le béton de chanvre, via un système de circulation de l’air (VMC double flux basse consommation) assurent une atmosphère adaptée à la saison. Ce qui n’est, à bien y réfléchir, que l’application raisonnée du pragmatisme des anciens, lesquels ne construisaient jamais au hasard et encore moins n’importe où. A commencer par la situation de la bâtisse où les côtés nord et ouest, les plus exposés aux vents dominants et aux variations de températures, offrent le moins d’ouvertures possibles. L’est, qui reçoit le soleil levant et le sud sont privilégiés, avec de larges ouvertures mais des éléments architecturaux (une large casquette prolongeant le toit) qui pondèrent l’agression du soleil estival, sans pour autant se priver de ses calories l’hiver venu. Un subtil équilibre d’une efficacité redoutable.
Matériaux vivants
Les murs extérieurs sont constitués d’une structure en bois, parée de 30cm de béton de chanvre (labellisé comme matériaux de construction) et recouverts à l’extérieur d’un enduit de chaux favorisant les échanges thermiques. Idem à l’intérieur où des parements et sols en béton d’argile et briques « crues » ont un rôle polyvalent insoupçonné : manger la chaleur l’été et restituer le frais la nuit, et inversement en hiver. Même les sols sont réfléchis sur ce même principe. Tout comme la peinture utilisée où les enduits à la chaux, entièrement naturels. «La moindre pellicule chimique ou plastique empêche les échanges entre l’extérieur et l’intérieur. Car les matériaux biosourcés « respirent », ils sont dynamiques et vivants. Cependant, il n’y a aucune contrainte esthétique au niveau des couleurs. » Et force est de constater que l’atmosphère régnant dans les lieux est vraiment agréable. Ni trop sèche, ni trop humide. D’ailleurs, l’une des vertus du béton de chanvre (pérenne et recyclable) est d’éliminer les champignons, moisissures et autres micro-éléments dont peuvent souffrir les personnes victimes de syndromes pulmonaires tels que l’asthme.
Une maison idéale ? Certainement!
Mais le prix ? « On peut effectivement considérer qu’une maison entièrement équipée peut représenter un surcoût de quelque 20 % par rapport à un habitat dit conventionnel. Il faut compter une moyenne de 2100 euros/HT du m2. Compte tenu des économies réalisées, l’amortissement est rapide, de l’ordre de 7 ans. On parle ici d’une maison tout équipée. Car s’il s’agit du seul gros oeuvre en béton de chanvre, ce surplus financier baisse considérablement. Nous avons des solutions adaptées à chaque situation, dans le neuf comme dans la rénovation. Quoi qu’il en soit, le but est aussi de protéger notre planète et ce mode de construction est non seulement un formidable capteur de CO2, quasi autonome (des panneaux solaires chauffent l’eau) alors que le chanvre est une plante peu gourmande. »
Daniel Bayol le dit d’autant plus volontiers qu’il éprouve ces méthodes avec satisfaction. Après des batteries de tests sans concession, elles ont été validées pour l’édification d’espaces recevant du public : le siège de la communauté de communes du Haut-Verdon à Varages ; la Maison de la nature à La Garde, des écoles crèches, cantines ou salles associatives, etc.
Avec, à venir, une troisième version des « règles professionnelles qui devraient autoriser l’édification de bâtiments à R + 7 ».
Le Varois demeure encore sur sa faim, quand bien même une partie de son rêve est accomplie. Son objectif est en effet de créer une filière locale et courte pour générer un cercle vertueux entre les producteurs, les transformateurs et les constructeurs. À commencer par une association avec les forestiers du cru pour la fourniture de bois de gros oeuvre et la production de chanvre local en Camargue. De l’énergie saine pour du bel ouvrage donc...
(1) Centre d’étude et d’expertise sur les risques, l’environnement la mobilité » et l’aménagement). DB chanvre, chemin de la Futaie à Vidauban. Tel. 06 14 40 43 79; Mail : dbayol@orange.fr
Web : www.db-chanvre.com