Covid ou pas, on n’aère pas assez chez soi ou au bureau
Pour faire des économies d’énergie, la tendance a été de contruire des bâtiments de plus en plus isolés ou de limiter l’ouverture des fenêtres. La Covid vient nous rappeler qu’il faut renouveler l’air.
Claire-Sophie Coeudevez est directrice associée Medieco Conseils et formation, ingénieur en stratégies de santé du cadre bâti et urbain. Elle a bien voulu répondre à nos questions.
L’air que nous respirons à l’intérieur des bâtiments est-il potentiellement dangereux ?
La fonction respiratoire fait partie des fonctions autonomes de l’organisme. Nous ne sommes pas toujours en train de réfléchir à l’air que nous respirons alors que nous faisons attention à ce que nous buvons, à ce que nous mangeons. Mais ce n’est pas parce qu’on respire dans les bâtiments qu’on devient tous malades. Mais, aujourd’hui, on ne discute plus l’enjeu sanitaire de la qualité de l’air intérieur. Elle est à l’origine de pathologies, maux de tête, fatigue, irritation des voies respiratoires jusqu’à des pathologies plus graves. Et certains polluants ont des impacts sanitaires encore plus importants.
Cela concerne tout le monde ?
Nous avons quatre millions de personnes asthmatiques en France, ainsi que quasiment % de la population qui est allergique. On sait que ce chiffre va augmenter dans les années à venir. On essaye donc de réfléchir aux solutions pour limiter l’exposition des occupants dans les bâtiments. Les personnes les plus sensibles sont à risques, comme les personnes âgées mais aussi les enfants dont les organes, comme les poumons, sont en plein développement. Ils sont plus sensibles que nous à la qualité de l’air qu’on respire.
Cela veut dire qu’on ne fait pas suffisamment attention à ce qu’on respire dans les bâtiments ? On n’aère pas assez ?
C’est tout à fait cela. Nous avons toujours cherché, après le choc pétrolier, à faire des économies d’énergie, ne pas trop ouvrir. Nous isolons de plus en plus nos bâtiments. Nous avons fait une meilleure étanchéité à l’air des bâtiments. Mais, du coup, on a complètement oublié qu’il fallait renouveler l’air. Avant, avec des bâtiments qui n’étaient pas % étanches, cela se faisait naturellement. Il y avait un renouvellement d’air par les fuites d’air parasites. Aujourd’hui, avec la recherche de performances énergétiques, on fait comme des boîtes thermos. On augmente donc l’exposition à l’intérieur.
Que savez-vous du risque aérosol intérieur ?
Dans le bâtiment il y a différents polluants. L’impact sanitaire le plus important, est particulaire, comme celle du trafic automobile, qui vient de l’extérieur. Il faut savoir que la mauvaise qualité de l’air intérieur coûte chaque année milliards d’euros, en soins, en médicaments, en congés maladies, etc.
Concernant la Covid ? Quel est le risque réel ?
Aucun appareil ne permet de la mesurer. C’est compliqué. On le compare à des particules ultra-fines. La clé, c’est renouveler l’air. C’est du simple bon sens, mais c’est très important. Pourtant, aujourd’hui, on ne vérifie pas du tout dans les bâtiments, notamment dans les établissements scolaires que le renouvellement d’air se fait bien. Seuls % des écoles ont un système mécanique de ventilation. Le reste se fait par ouverture des fenêtres. Encore faut-il que les utilisateurs y pensent ou aient envie de le faire. C’est là que réside l’intérêt des détecteurs de CO.
Quel est l’avantage du détecteur de CO ?
D’une part le CO n’est pas trop anxiogène. On ne mesure pas les polluants dans l’air en tant que tel, on mesure le confinement. Il permet de savoir si le renouvellement d’air se fait bien. Quand il est trop important cela fait prendre conscience qu’il faut ouvrir les fenêtres.
Comment ça marche ?
Ça se règle. Vous pouvez avoir différents indicateurs. On parle en PPM, partie par million, pour le CO. Dans les systèmes faits pour les écoles, il y a des leds verte, orange, et rouge. Quand on passe le seuil de PPM la led devient orange, cela veut dire qu’il faut penser à aérer. Quand elle devient rouge au-delà de PPM, cela veut dire qu’il faut accélérer l’aération. Attention, ce n’est pas parce que c’est rouge qu’on va devenir malade. C’est juste qu’il est temps d’ouvrir les fenêtres.
Des capteurs de CO mais aussi des purificateurs d’air. C’est complémentaire ?
Effectivement. Mais pour moi l’essentiel est de s’assurer d’un renouvellement d’air performant. Les épurateurs marchent avec différentes technologies. Certains fonctionnent avec des filtres particulaires qu’il faut changer. Je suis plus favorable à la combinaison du capteur de CO et de l’ouverture des fenêtres. Il faut aussi installer de la ventilation mécanique dans les bâtiments et surtout s’assurer que celles déjà existantes fonctionnent, et les entretenir...
Pour Claire-Sophie Coeudevez, « nous ne sommes pas toujours en train de réfléchir à l’air que nous respirons alors que nous faisons attention à ce que nous buvons et à ce que nous mangeons ».
Le détecteur de CO permet de savoir si le renouvellement d’air se fait bien”