Monaco-Matin

De Tonquédec dans une comédie délicieuse

Au Festival du film francophon­e d’Angoulême, le comédien surprend dans un second rôle inattendu dans Délicieux, une comédie à déguster dès le 8 septembre dans les salles obscures.

- CÉDRIC COPPOLA magazine@nicematin.fr

Deux ans après L’Esprit de

famille, le comédien retrouve le réalisateu­r Eric Besnard le temps de Délicieux, un film en costumes qui revient sur la création du premier restaurant, à l’aube de la Révolution française. Il n’incarne cependant pas le chefcuisin­ier, la place est prise par Grégory Gadebois, mais Hyacinthe, un émissaire envoyé par un Duc – excellent Benjamin Lavernhe –, fourbe et manipulate­ur.

Délicieux est une comédie mais aussi un film d’époque. Ce genre vous inspirait-il ?

Le costume et l’époque sont une source extraordin­aire pour l’imaginaire d’un comédien. C’est une invitation au rêve. Les films d’époques, y compris ceux qui se déroulent dans les années , me font rêver, voyager dans le temps…. Dans

Délicieux, il se trouve que tous les personnage­s portent aussi une perruque. Un accessoire qui déterminai­t le rang social. C’est un élément de jeu formidable.

Le costume exige-t-il une concentrat­ion particuliè­re pour ne pas tomber dans le surjeu ?

Il faut d’abord être juste. Dans ce film, le costume donne l’enveloppe extérieure de la rigidité, participe à l’air désagréabl­e, hautain et supérieur de Hyacinthe. Après je n’ai qu’à dire les mots. Lorsque des dialogues sont très écrits, il faut essayer de les rendre plus réels, le plus simple possible.

Chose assez rare dans votre filmograph­ie, vous interpréte­z une personne pas très recommanda­ble. Une envie de changer de registre ?

Les salauds et les cons sont les meilleurs personnage­s, et j’ai vraiment envie d’aller de plus en plus vers eux. J’ai demandé à Eric Besnard s’il était certain que je serais crédible dans ce rôle. Une petite provocatio­n de ma part puisque mon intention était d’obtenir des éléments sur lesquels m’appuyer. Il m’a répondu que mon apparence d’homme insoupçonn­able l’intéressai­t beaucoup. Il s’agit donc d’un salopard qu’on ne voit pas venir. C’était jouissif de travailler de cette façon.

Un des enjeux était de trouver un axe contempora­in…

Oui et c’est un film politique, riche de sens sur ce qu’il raconte. Au XVIIIe siècle, le plaisir de la table était réservé à l’élite aux nobles, à tous ceux qui vivaient dans les châteaux. Et là, il va tout d’un coup être offert au peuple. En toile de fond, il y a la révolution française qui gronde et tout le monde va pouvoir profiter de ces moments conviviaux axés sur le partage. C’est une idée très importante du siècle des lumières.

« Le costume et l’époque sont une source extraordin­aire pour l’imaginaire d’un comédien »

Avec la réouvertur­e des cinémas et des restaurant­s, le timing semble parfait.

Bien sûr ! C’est une chance incroyable ! Le hasard fait que ce film, écrit et réalisé avant la Covid, sort très peu de temps après la réouvertur­e des restaurant­s. Délicieux est un hymne à la vie et à la gastronomi­e française. Moi qui suis très gourmand, quand j’ai découvert le film, au générique de fin, j’avais faim, ça m’avait mis en appétit !

Êtes-vous un fin gourmet ?

J’adore manger et boire… J’aime aussi cuisiner des choses simples comme un poulet fermier entouré de pommes de terre.

Eric Besnard a particuliè­rement soigné l’image. Une tendance que l’on voit davantage ces derniers temps dans les comédies. Partagez-vous ce ressenti ?

Eric Besnard tenait, au moins une fois dans sa vie, à faire un beau film d’époque. Sur le tournage, il s’est fait plaisir en compagnie du chef opérateur Jean-Marie Dreujou à travailler particuliè­rement la lumière. Chaque plan du film pourrait être un tableau de Chardin. Il est également vrai que ce soin de l’image est aujourd’hui davantage revendiqué par les metteurs en scène. J’ai pour habitude de dire : ce n’est pas parce qu’un film est drôle qu’il doit être moche ! Et Délicieux s’inscrit dans cette mouvance. C’est un vrai plaisir esthétique porté par une mise en scène sensuelle et charnelle… On l’a ressenti sur le plateau et cette impression se reflète sur l’écran. Les corps et les éléments ressortent… cela fait travailler les cinq sens et met en avant l’art culinaire. Je pense aussi que l’oeuvre est faite pour être découverte au cinéma, sur grand écran.

Vous jouez aux côtés de Grégory Gadebois et Benjamin Lavernhe, tous deux passés par la Comédie Française. Une institutio­n que vous avez envie de rejoindre ?

Beaucoup de comédiens de ce film viennent du théâtre, un art qu’affectionn­e particuliè­rement Eric Besnard. Il sait leur capacité à apprendre un texte mais aussi leur faculté à utiliser la technique classique qu’ils ont apprise (diction, phonation…) pour dire des choses complexes en cherchant le naturel et non la virtuosité. Rentrer à la Comédie Française telle qu’elle est aujourd’hui me plairait. Il y a une troupe de très haut niveau et il y a eu une véritable envie d’intégrer des artistes d’exceptions. Mais en même temps, la fable de La Fontaine Le Loup et le Chien explique bien mon point de vue. D’un côté le chien mange à sa faim mais est attaché par un collier à sa maison. De l’autre, le loup va-et-vient mais n’attrape pas une proie tous les jours. Et justement je préfère être le loup solitaire, itinérant. C’est une forme de liberté qui se paie, offre moins de confort, mais que j’aime particuliè­rement.

« Chaque plan du film pourrait être un tableau de Chardin »

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(Photo MAXPPP/Franck Castel)
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