« La Principauté entre dans cette famille »
Yves Bigot, directeur général de TV5 Monde
Pourquoi cette entrée de Monaco dans le giron de TV5 est qualifiée d’historique ?
C’est la première fois depuis 1986 qu’un nouvel État vient se joindre à TV5 Monde qui avait été créé en 1984 par la France, la Suisse et la Fédération Wallonie-Bruxelles. Deux ans après le Canada et le Québec avaient adhéré. Mais depuis, aucun État n’était venu rejoindre la gouvernance de TV5 Monde. La Principauté, aujourd’hui, entre dans cette famille.
Comment s’est établi ce rapprochement ?
Nous avions une volonté commune. Notre aspiration est de représenter le plus grand nombre d’États francophones et en étudiant quels États naturels pourraient nous rejoindre, les deux premiers évidents étaient Monaco et le Luxembourg. Avec le Luxembourg nous avons engagé des échanges, il y a trois ou quatre ans, qui se poursuivent mais rien d’officiel à ce stade. Avec Monaco, nous avons abouti. C’est un processus assez long car nous avons un certain nombre de critères qu’il faut remplir pour adhérer chez nous. Notamment le fait que les États doivent posséder une chaîne publique avec toutes les garanties d’indépendance éditoriale, d’indépendance de la rédaction, des journalistes. Et il a fallu le temps à la Principauté de créer cette chaîne, MonteCarlo Riviera.
La chaîne Monaco Info n’entrait pas dans vos critères ?
Ce que j’en ai compris, c’est que les gens qui travaillent à Monaco Info sont des fonctionnaires de l’État monégasque. À ce titre, ils ne peuvent pas avoir le statut d’indépendance éditoriale. Dans la notion de chaîne de service public, sont inscrits l’indépendance journalistique et économique.
Au sein de l’état-major de TV5 Monde, la Principauté aura la même voix que les autres pays ?
Au niveau des États dans le management oui, chaque pays compte pour une voix. Au sein du conseil d’administration, la répartition se fait en fonction de l’actionnariat. Le représentant de la chaîne Monte-Carlo Riviera siégera à notre conseil d’administration aux côtés de la présidente de France Télévisions, des responsables de Radio Canada, de la RTBF et de la RTS. Mais France Télévisions, qui est l’actionnaire principal, a quatre voix, là ou Monaco n’en aura qu’une.
Dans votre grille de programmes, quand est-ce que les contenus monégasques seront proposés aux téléspectateurs ?
Assez rapidement, dès que l’accord sera effectif au 1er janvier, nous aurons quelques documentaires ou magazines fournis par la Principauté. Mais tout sera vraiment enclenché à partir du moment où la chaîne Monte-Carlo Riviera émettra, ce qui a priori devrait être autour de septembre 2022. Pour la Principauté, toutes les actions que ce soit dans le domaine de la culture, de l’environnement, du sport vont être vues sur l’ensemble de la planète via TV5 Monde et en plus, avec un sous-titrage en 13 langues, car un téléspectateur sur deux de notre chaîne ne parle pas français, mais regarde nos programmes avec les soustitrages.
À l’heure où la télévision semble perdre sa place de média dominant, pensezvous qu’elle a toujours un avenir glorieux ?
Bien sûr, je le crois. La pandémie et le confinement du printemps 2020 l’ont démontré. D’un seul coup les audiences se sont envolées à nouveau. La télévision a un avenir dans le domaine de l’information de proximité mais aussi dans les magazines et la fiction. Même si les plateformes produisent pour la planète entière, toutes les communautés ont besoin d’avoir un miroir identitaire qui leur parle d’elles-mêmes. À ce titre, la télévision à un avenir. Elle sera moins dominante, sûrement, qu’elle ne l’a été pendant 40 ans, parce que les GAFA vont prendre une grande place. Un peu comme la radio qui était un média très dominant avant la télé, elle l’est moins mais elle n’a pas disparu.