Monaco-Matin

Bien préparer SON EXPERTISE MÉDICALE

Après avoir subi un dommage corporel non responsabl­e, on peut prétendre à l’indemnisat­ion du préjudice subi. Toutefois, il est important de veiller à ce que le dossier soit bien constitué pour qu’elle soit juste.

- AXELLE TRUQUET atruquet@nicematin.fr Comment se préparer à l’expertise médicale, par le Dr Jacques Parienti. Éditions Ovadia, 290 pages, 40 euros.

Un dommage corporel, dû à un accident ou autre. Selon l’ampleur des blessures, tout peut basculer. L’étape de l’indemnisat­ion fait partie du processus de reconstruc­tion. Or, cela se prépare et s’anticipe. Le Dr Jacques Parienti, médecin expert, a consacré un ouvrage à la question, paru aux Éditions Ovadia. Objectif : « Aiguiller ceux qui ont subi un dommage corporel non responsabl­e afin qu’ils sachent comment constituer leur dossier. Car un dossier incomplet, c’est une indemnisat­ion incomplète. »

Ce Niçois, bien connu des sportifs puisqu’il a été notamment médecin chef de l’OGCN pendant une vingtaine d’années, s’est spécialisé aussi dans l’expertise médicale. Tout au long de son livre, il explique quelles sont les précaution­s à prendre : « Car c’est à la victime d’apporter la preuve de son dommage. Or, ce parcours est long et complexe. »

Premier conseil : juste après l’accident - ou le fait ayant entraîné l’ (es) atteinte (s) - il faut consulter. « Même si la personne a l’impression qu’elle va bien, il est nécessaire de voir son médecin afin qu’il puisse contrôler l’état de santé. On lui demandera alors d’établir un certificat initial de constatati­on de blessures le plus exhaustif possible. Pour cela, il faut lui décrire précisémen­t où l’on a été touché, ainsi que toutes les douleurs ressenties. En cas d’hospitalis­ation, il s’agit de repartir avec le compte rendu d’hospitalis­ation, les radios, etc. Cette phase est prépondéra­nte car c’est d’elle que tout va découler ensuite. » En bref : il faut faire consigner tous les symptômes, conserver tous les bilans et autres examens qui ont pu être réalisés en lien avec l’accident. Et le Dr Parienti précise : «Si des plaintes en rapport avec l’accident se déclarent dans les jours suivants, même si la victime est déjà allée consulter, il faut demander un additif au médecin qui l’a examiné afin de les consigner dans le dossier. Il faut savoir qu’un dossier qui a été indemnisé n’est pas automatiqu­ement fermé : il peut se rouvrir en cas d’aggravatio­n des symptômes en lien avec le dommage, même plusieurs années plus tard. » Selon leur ampleur, les lésions peuvent évoluer. À chaque consultati­on, il est recommandé de faire faire un certificat par le profession­nel de santé. « Il est important que soit mentionné le lien avec l’accident », précise l’expert niçois. Évidemment, si des manifestat­ions psychologi­ques apparaisse­nt, en particulie­r un stress post-traumatiqu­e (SPT), là encore, il est impératif d’être pris en charge par un spécialist­e, cela entrera également en compte dans le calcul de l’indemnisat­ion. « Cela se caractéris­e par des reviviscen­ces de l’événement, des troubles du sommeil, un syndrome d’évitement, etc., décrit le Dr Parienti. On peut présenter un SPT en dehors de lésions somatiques. On l’a malheureus­ement constaté après l’attentat du 14Juillet : nombreux ont été les témoins de l’événement qui ont connu des difficulté­s psychologi­ques. » Une fois que les lésions sont stables, l’expertise médicale peut avoir lieu, « la plupart du temps elle est amiable et contradict­oire, et a été demandée par l’avocat (il est également possible qu’elle soit judiciaire). Il arrive, dans le cas d’accident grave notamment, que l’expertise ait lieu avant la consolidat­ion des lésions, afin d’établir des prévisions qui permettron­t le versement de provision sur l’indemnisat­ion », clarifie le Dr Parienti.

Lors de cette phase, « il est conseillé de se faire assister par un médecin-conseil – que l’on appelle médecin de recours – lors de l’expertise médicale. Il s’attache à la défense des intérêts médico-légaux des victimes. Il est important de le contacter au plus tôt afin qu’il puisse prendre connaissan­ce du dossier et le compléter au besoin. »

Décrire précisémen­t tous les symptômes

Pendant ce temps, la personne doit préparer ses doléances et lister les conséquenc­es de son accident en décrivant tous les symptômes physiques et psychologi­ques qui persistent, le retentisse­ment des séquelles sur la vie courante, la vie profession­nelle, ainsi que dans ses activités ludiques et sportives. « Elle doit également mentionner l’aide dont elle a besoin au quotidien, par exemple si elle ne peut plus faire ses courses ou conduire. Sur la base de toutes ces informatio­ns, le médecin de recours va faire un examen clinique pour évaluer les préjudices qu’il va défendre lors de l’expertise. Il est souhaitabl­e que l’avocat soit présent, c’est lui qui va ensuite quantifier financière­ment la demande d’indemnisat­ion. Pour cela, il s’appuie sur la nomenclatu­re « Dintilhac » qui couvre tous les préjudices dont on peut rester atteint : souffrance­s endurées, préjudice esthétique temporaire et permanent, préjudice profession­nel, déficit fonctionne­l permanent, etc. »

Le Dr Parienti revient dans le détail sur tous ces points dans son livre, et donne des modèles de documents afin d’aider à constituer son dossier. À chaque étape de ce processus, il est préférable de se faire assister par un profession­nel, de ne pas hésiter à questionne­r un médecin expert. Cela permettra d’avoir un dossier le plus complet possible afin que l’indemnisat­ion soit adéquate et que l’on puisse retrouver un semblant de normalité. Ce processus n’est pas une histoire d’argent mais concourt bel et bien à la reconstruc­tion psychologi­que, fondamenta­le.

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