De l’extrême droite à l’union des gauches
L’adversaire a changé de côté. Emmanuel Macron, pendant la campagne présidentielle, craignait l’extrême droite. Emmanuel Macron, à l’aube de la campagne législative, redoute l’union des gauches autour de la France insoumise. Il faut dire que rien, avant le premier tour du 10 avril, n’avait laissé penser que, divisée comme elle l’était entre les verts, les socialistes, les communistes et les Mélenchonistes, la gauche pourrait constituer, après la réélection d’Emmanuel Macron le 24 avril, une force d’opposition crédible. Et que Jean-Luc Mélenchon allait ainsi devenir, pour cinq ans peut-être, sinon son Premier ministre, du moins le premier adversaire du Président au Parlement. Rien, sinon l’alliance, certes plus électorale que politique, réalisée au forceps, née de l’impérieuse nécessité pour la gauche de ne pas se déchirer dans les circonscriptions, comme elle s’est, en avril, déchirée pour la présidentielle. L’opération a bien suscité des remous, chez les Verts et les Socialistes, elle dresse contre elle tous ceux qui, comme François Hollande, croient encore à une gauche de gouvernement, à la social-démocratie. Elle a entraîné la quasidisparition de la scène politique du vert Yannick Jadot, et a pris en otage – sur un point capital, le développement du nucléaire – le numéro 1 du Parti communiste, Fabien Roussel. Mais enfin, au moment de l’entrée en campagne, elle est bel et bien réussie, puisque les candidats Renaissance, dans la plupart des compétitions locales, seront confrontés au deuxième tour à un seul candidat de gauche, et non pas à une kyrielle.
Il est d’ores et déjà certain que tous les partis signataires de l’accord de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale, baptisé Nupes, tireront leur épingle du jeu et qu’ils disposeront d’un groupe parlementaire – 15 députés au moins – dans la future Assemblée nationale. Changement de pied, donc : voici qu’après avoir dénoncé le péril de l’extrême droite, Emmanuel Macron est bien obligé aujourd’hui de mobiliser ses candidats, anciens et nouveaux, contre le péril de l’union des gauches, qui revendique la désobéissance aux traités européens, et n’est unie, a-t-il dit avant-hier à ses troupes, « sur une seule chose, la décroissance ».
Signe de sa vive préoccupation : le calendrier du Président se serait, du coup, accéléré, et la loi exceptionnelle attendue sur le pouvoir d’achat pourrait bien être annoncée début juin, pour contrer le programme de la Nupes.
Dans tout cela, on le voit : Emmanuel Macron fait plus que s’impliquer dans la campagne. Il n’a même pas besoin d’un Premier ministre, dont la nomination tarde, pour conduire l’assaut législatif.
« Macron n’a même pas besoin d’un Premier ministre pour conduire l’assaut législatif »