Les mots pour le dire
Parlez-vous le langage d’aujourd’hui ? L’édition 2023 du Petit Larousse, sortie cette semaine, ne sera sans doute pas de trop, à bon nombre d’entre nous, pour se frayer un chemin dans le maquis des nouveaux mots. Ils rendent parfois impénétrables les conversations au bureau et en famille ou les débats dans les médias.
Et si on s’immergeait dans ce nouveau champ lexical. Pas facile pour le boomer d’adopter la novlangue. Fragilisé par le dégagisme ambiant, le voilà déstabilisé par cette vague de wokisme venue des États-Unis. Un mouvement disruptif qui veut en finir avec l’invisibilité de certaines minorités notamment celles qui s’estiment racisées. Il faudra qu’il compose également avec la charge mentale des femmes de son entourage. Pour gérer les changements, son chef de service a brandi un slogan : le management inclusif. À la pause déjeuner, devant son restaurant préféré, il a croisé des antispécistes qui se sont promis de lui faire avaler de travers son plat de viande favori. Une tuerie, pourtant, ce poulet au curry !
Place donc à une bonne cure de détox et, au bureau, à une séance de brainstorming pour se mettre asap au goût du jour. Le numérique, c’est désormais son ADN.
Il y a 35 ans, Mitterrand jouait les câblés avec Mourousi. Aujourd’hui, la modernité passe par le nombre de followers sur les réseaux sociaux. Notre boomer s’est aussi décidé à poster sur Insta’ des photos de ses dernières vacances. Avec, en prime, une story. Pas moyen, malgré tout, d’effacer ce petit bourrelet autour de la taille. Ce n’est pas demain la veille qu’il pourra rivaliser avec les tops influenceurs. Il s’efforce de liker des posts à tour de bras et de suivre régulièrement sa TL pour ne pas perdre pied avec la real life. Avec ses meilleurs contacts, il préfère un échange en DM, histoire de retrouver un peu d’intimité.
Tous les jours, il suit les médias mainstream qui s’adonnent au fast checking pour débunker les fake news et traquer les trolls. Il faut avoir les codes pour ne pas se faire lâcher par sa communauté. Il s’est enfin décidé, il y a peu, à éteindre son smartphone pour aller au cinéma et profiter de son jour off. Patatras, un critique avait spoilé la fin du film. OK pour un teaser mais pas question de divulgâcher !
Dans cette vie qui court, il ne lui reste plus qu’à explorer tous les possibles confortablement installé dans son canapé, dans la pièce à vivre de son logement.
Le soleil s’est couché depuis longtemps, il est temps, à présent, de rejoindre l’espace nuit. Et de se retrouver plongé, dès les paupières fermées, dans le métavers. Rêve ou cauchemar ?
« Pas facile pour les boomers d’adopter la novlangue. »