Une seconde femme s’installe à Matignon : Édith Cresson lui souhaite « beaucoup de courage »
Interrogée par le Journal du Dimanche, la veille de l’annonce de la nomination d’Élisabeth Borne, sur l’hypothèse où une femme serait choisie, Édith Cresson, la seule à avoir occupé jusqu’ici le poste de Premier ministre, est revenue sur sa propre expérience, souhaitant à sa successeure « beaucoup de courage » et fustigeant « le machisme de la classe politique » française.
« Le fait qu’il n’y a qu’en France que la question se pose de nommer une femme à Matignon est à mes yeux scandaleux », a ainsi dénoncé Édith Cresson, restée moins de 11 mois à ce poste, de mai 1991 à avril 1992, durant le second septennat de François Mitterrand. « L’a-t-on posée au Royaume-Uni, où Margaret Thatcher a exercé le pouvoir pendant onze ans ? En Allemagne, où Angela Merkel a été chancelière pendant seize ans ? Jamais...», a-t-elle souligné. Selon l’ancienne locataire de Matignon, « ce n’est pas le pays qui est machiste : c’est sa classe politique. Ce sont les mêmes attaques qu’aujourd’hui. On me prêtait des propos que je n’avais jamais tenus, on me lançait des critiques permanentes, on faisait des commentaires sur ma
‘‘ On a même écrit un jour que mes bas étaient filés, alors que j’ai une cicatrice sur la jambe due à un accident ! ”
tenue vestimentaire », a raconté l’ancienne dirigeante socialiste.
« On a même écrit un jour que mes bas étaient filés, alors que j’ai une cicatrice sur la jambe due à un accident ! On ne se permettrait jamais la même chose, les mêmes commentaires, sur la tenue des hommes politiques », a dénoncé l’excheffe du gouvernement, quatre fois ministre auparavant.
« Le poste de Premier ministre est un poste très difficile, en tout état de cause, mais les difficultés sont accrues par le fait que le chef du gouvernement est une femme. Car les attaques compliquent encore plus la situation politique », a-t-elle insisté. Interrogée pour savoir si elle aurait des conseils à donner à sa successeure, Édith Cresson a affirmé : « Je lui dis simplement qu’il lui faudra beaucoup de courage ». Hier, dès l’officialisation de la nomination, Édith Cresson a déclaré : « Je pense que le Président a dû se rendre compte qu’il était temps, effectivement, qu’une autre femme soit nommée. C’est un très bon choix, parce que c’est une personne remarquable, pas parce que c’est une femme. Elle saura faire face. »