Monaco-Matin

Bouli Lanners POLICE SANS SECOURS

- ALEXANDRE CARINI acarini@nicematin.fr

Àpeine arrivé sur la terrasse du Five, après la projection de La nuit du 12 au Palais, Bouli Lanners ne pense qu’à virer son noeud pap’et déboutonne­r sa chemise. On se doute que la tenue stricte du pingouin pour tapis rouge n’est pas son bleu de travail habituel. La lumière, très peu pour lui, même le soir de son anniversai­re (il a fêté ses 57 ans). «Ah, j’ai tout fait pour que ça ne se sache pas, car j’aime pas trop les mondanités ! »

L’ovation reçue pour le nouveau polar de Dominik Moll est sans doute le meilleur cadeau attribué à son flic Marceau. Un enquêteur de PJ au bout du rouleau qui, contrairem­ent au mime, joint parfois la baffe à la parole. « C’est un truc proche de moi quand j’étais jeune. Marceau est très sensible et sociable, mais il peut aussi avoir des explosions de colère quand il se trouve face à une injustice, confesse celui qui conjugue parfois coup de gueule et coup de poing. Dans le film, l’échec de l’enquête a trop de résonance avec sa vie privée, il n’a plus la capacité de résister à ça, et il a atteint un point de non-retour. »

Border line

Loin de son flic ripou dans Tueurs, le policier de la PJ Grenoblois­e, confronté au meurtre d’une jeune femme brûlée vive, déborde d’une humanité mal contrôlée.

« Ici, on ne parle pas de police répressive, mais d’enquêteurs qui vouent toute leur existence à rendre justice aux victimes. »

Quitte à être parfois un peu border line. « Plus jeune, j’ai pu l’être aussi », sourit Bouli, dont les tatouages apparents sont aussi témoignage­s de ses fresques passées. «Onnevapas dire que je suis rangé des voitures, mais je me suis bien assagi. J’ai eu un passé agité, je suis content d’en être revenu, mais en même temps, ce parcours m’a nourri. » Gueule de polar, un genre qu’il adore parce « qu’il pose un regard sur les comporteme­nts extrêmes dans la société, lorsque l’homme est poussé dans ses derniers retranchem­ents ».

Mais aussi une douce folie-fantaisie digne d’une histoire belge, qu’affectionn­e le duo Kervern-Delepine pour leurs comédies satirico-sociales. Lanners n’est pas le dernier à se marrer non plus. Notamment lorsqu’il organise un Festival de Kannes en Belgique, avec du cinéma « lourd et d’essai » constitué de films ratés. « C’est même comme ça que je suis devenu réalisateu­r, car j’ai dû faire un jour un montage express de ratages complets. » Avec le Festival, le vrai, l’artiste engagé avoue entretenir « un rapport amour-haine. Ça sert les films, mais je n’aime pas le strass et les paillettes ».

Pour Dominique Moll, il a consenti à faire risette à la Croisette, parce que « lorsqu’on décide de venir, il faut savoir jouer le jeu. Mais j’ai l’impression que le cinéma se vend de plus en plus aux marques de cosmétique­s. C’est un monde auquel je n’adhère pas, qui est à l’opposé de mes valeurs écologique­s et sociales ».

On l’aura compris, Bouli n’a pas la langue dans sa poche, « même si ça peut être contre-productif pour un acteur. Mais à mon âge on s’en fout ! »

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