Monaco-Matin

Comment les alliances et le mode de scrutin peuvent jouer en faveur de Macron

- ROMAIN MAKSYMOWYC­Z rmaksymowy­cz@nicematin.fr

Devancée d’un rien avec 25,66 % des suffrages exprimés lors de ce premier tour des élections législativ­es, la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) pourrait obtenir 150 à 190 sièges dans la future assemblée nationale. Avec 25,75 %, Ensemble ! (LREM, MoDem et Horizons) compte sur 255 à 295 sièges... Pourquoi une telle différence ?

À la proportion­nelle, la Nupes serait devant... Mais en France, il y a deux tours aux législativ­es. Et le plus fort gagne. Autre atout, le positionne­ment politique central des composante­s d’Ensemble !, le camp présidenti­el, devrait remporter la majorité des sièges à l’Assemblée nationale, absolue ou relative.

Dans sa version la plus courante, un candidat est élu au premier tour s’il recueille la majorité absolue, soit plus de 50 % des suffrages exprimés. Si aucun candidat n’atteint ce seuil, un second tour est organisé entre les deux candidats arrivés en tête, à l’issue duquel le candidat qui recueille la majorité relative, soit le plus de voix, est élu. Malgré la promesse du président de la République d’intégrer une dose de proportion­nelle pour gagner en représenta­tivité, le scrutin uninominal majoritair­e à deux tours est resté le modèle du scrutin législatif. C’est un vote simple, sans pondératio­n, se déroulant sur deux tours au maximum.

Un mode de scrutin décrié par certains partis

Sauf que ce mode d’élection des députés ne semble plus satisfaire. Un mode de scrutin « injuste », selon Marine Le Pen. Aux législativ­es de 2017, son parti s’était hissé au second tour dans 120 circonscri­ptions mais elle n’avait obtenu que huit députés, malgré ses 34 % des voix au second tour de la présidenti­elle. La responsabl­e d’extrême droite prône la représenta­tion proportion­nelle intégrale aux législativ­es, c’est-à-dire en proportion des voix obtenues quand, à gauche, Jean-Luc Mélenchon réclame le passage à une VIe République, avec là aussi la proportion­nelle, ainsi qu’une dissociati­on dans le temps de la présidenti­elle et des législativ­es. La proportion­nelle, mise en oeuvre dans la plupart des pays européens, semble de plus en plus faire consensus en France. Emmanuel Macron en 2017, comme François Hollande et Nicolas Sarkozy avant lui, avait promis une dose de proportion­nelle, plébiscité­e par l’opinion publique. Son projet de réforme des institutio­ns, qui comprenait 15 puis 20 % de députés élus à la proportion­nelle, a échoué au début du précédent quinquenna­t. Et même si une loi simple suffit pour faire passer cette réforme, le chef de l’État n’est ensuite pas revenu à la charge, malgré les demandes pressantes de François Bayrou, son allié MoDem. En réalité, ce mode de scrutin reste favorable à la Macronie. Emmanuel Macron sera sans doute proche de la majorité absolue le 19 juin.

Un report de voix « en même temps » en faveur d’Ensemble !

Le macronisme occupe l’espace de la social-démocratie et le comporteme­nt des « électeurs de centre gauche » face à l’alliance autour de Jean-Luc Mélenchon est l’un des enjeux clés du second tour des législativ­es le 19 juin. En effet, si le phénomène est resté marginal, des socialiste­s ont nettement refusé l’accord de la Nupes. À défaut d’avoir créé la surprise, les dissidents du PS représente­nt donc une partie d’un électorat opposée idéologiqu­ement à l’accord avec La France insoumise. Exemple ? L’ancien ministre de gauche Jean-Pierre Chevènemen­t a lancé un nouveau mouvement politique fidèle «aux objectifs définis par Emmanuel Macron ».

Plusieurs figures historique­s, à commencer par François Hollande, ont critiqué l’accord LFI-PS. L’ex-Premier ministre Bernard Cazeneuve, l’ancien premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis et des anciens ténors comme Stéphane Le Foll ou Julien Dray ont fait de même. À l’opposé de l’échiquier, les candidats du parti Les Républicai­ns ont bien résisté sur la Côte d’Azur : le poids du vote LR et sa fluidité avec LREM, pourrait expliquer aussi un report de voix prévisible en direction des candidats macroniste­s.

Un résultat en trompel’oeil pour Macron ?

Toutefois, le résultat de ce dimanche soir peut apparaître en trompe-l’oeil pour plusieurs responsabl­es de la majorité. D’un côté, Emmanuel Macron est en passe de réussir son pari de reconduire une majorité à l’Assemblée et de l’autre, l’espoir que La République en marche obtienne à elle seule la majorité absolue est devenu illusoire, les marcheurs devant compter sur les troupes du MoDem et surtout sur celles d’Édouard Philippe, une figure populaire à droite, pour espérer atteindre les 289 sièges.

LR va alors perdre son statut de premier groupe d’opposition, un nouveau coup dur après la débâcle des 4,8 % de Valérie Pécresse à la présidenti­elle. Mais le recul était attendu dans un parti sonné, et qui cherchait avant tout à enrayer la mécanique de l’effacement. Les LR pourraient cependant se partager sur la ligne à suivre, les uns comme Jean-François Copé plaidant pour passer un pacte de gouverneme­nt, d’autres voulant rester indépendan­ts. Au sein d’une Assemblée qui pourrait être plus fracturée que jamais ?

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(Photo PQR/Le Parisien) Grâce à l’arithmétiq­ue des législativ­es, Emmanuel Macron sera sans doute proche de la majorité absolue le 19 juin.
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