Monaco-Matin

« Je suis obligée de brader les agneaux avant qu’ils ne meurent »

- E. G.

Chez les Ascenzi on est « éleveurs de

père en fils » depuis des génération­s. C’est la mort dans l’âme que cette année, Katia, va devoir appeler les maquignons deux mois et demi avant

l’heure. « Ils savent qu’on est pris à la gorge par la sécheresse, souffle cette exploitant­e. Je ne sais pas ce qu’ils me donneront de mes bêtes. Pas grandchose sans doute. Parce qu’ils savent que soit j’accepte leur prix, soit je garde mes agneaux et je les laisse mourir. »

Pour l’exploitati­on du Gaec des Combes, le manque d’eau est déjà une réalité. Habituelle­ment, les 1 200 bêtes sont au pâturage, 700 hectares de montagne entre Duranus et l’estive du Frémil à Belvédère. « Mais à Duranus il n’y avait déjà plus d’eau, alors on est allés à Belvédère où là l’herbe était complèteme­nt cramée », témoigne

Katia. « Même les gens du parc qui sont venus nous voir n’en reviennent pas. Je n’ai pas d’autre choix : je vais devoir rentrer les bêtes à la bergerie, à la Bollène. En principe on ne les rentre qu’en janvier pour l’agnelage. »

« Calamité agricole »

L’autre solution serait de laisser le troupeau en liberté pour qu’il se déplace de pâturage en pâturage. Mais ce serait sans compter le risque que représente aujourd’hui le loup. «Car sans eau, pas d’électricit­é non plus »,

résume cette éleveuse. En effet, les filets de protection électrifié­s ne se mettent en tension que grâce à l’humidité piégée dans le sol. «Aujourd’hui, tout est sec, même la terre », souffle Katia, qui, du coup, fait ses comptes.

Rentrer ses bêtes à la bergerie va l’obliger à acheter du fourrage : « Un camion de 15 tonnes pour quinze jours de nourriture. » À 3 800 euros le camion, le calcul est vite fait. « Il va falloir tenir tout

l’été. » Mais ce qui l’inquiète le plus, c’est l’état de ses brebis. «On est en train de leur faire subir un traitement de choc. Elles dépérissen­t à cause du manque d’eau. » C’est déjà toute l’année 2023 qui est compromise par cette sécheresse. Voilà pourquoi Katia réclame le classement, sans plus attendre, du départemen­t en « calamité agricole ». « Mais avec des contrôles, pour que l’argent aille bien à ceux qui en ont besoin », souligne-t-elle.

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(Photo Aurélie Plessis) Katia, éleveuse dans la Vésubie.

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