Londres veut transférer ses migrants au Rwanda
Le gouvernement britannique souhaite expulser vers le Rwanda en charter les demandeurs d’asile arrivés illégalement au Royaume-Uni, un projet controversé jugé « immoral » par l’Église anglicane.
En envoyant ces demandeurs d’asile arrivés clandestinement à plus de 6 000 km de Londres, le gouvernement entend dissuader les traversées illégales de la Manche, qui ne cessent d’augmenter malgré ses promesses répétées de contrôler l’immigration depuis le Brexit.
Critiques de l’ONU
Ce projet, critiqué par l’ONU mais très populaire au sein de l’électorat conservateur, a été validé par la justice britannique. Après le rejet de recours examinés en urgence, la Cour suprême a refusé hier d’examiner de nouvelles requêtes.
Un vol spécialement affrété pour des centaines de milliers d’euros était même prévu hier soir, devant acheminer quelque 130 migrants (Iraniens, Irakiens, Albanais ou Syriens).
Mais, selon l’association d’aide et de soutien aux réfugiés Care4Calais, seuls sept migrants étaient tout compte fait attendus au départ. Et finalement, en raison d’interventions de dernière minute de la Cour européenne des droits de l’Homme, le vol a été annulé. « Dernier billet annulé. PERSONNE NE PART AU RWANDA », a tweeté triomphalement Care4Calais à 23 h 09.
« Briser le modèle économique des trafiquants »
« Il y aura des personnes sur ces vols et si elles ne sont pas sur ce vol, elles seront sur le suivant », avait pourtant promis dans la journée la cheffe de la diplomatie Liz Truss. « Ce qui importe vraiment, c’est d’établir le principe » et de « briser le modèle économique de ces gens épouvantables, ces trafiquants qui font commerce de la détresse. » En vertu de son accord avec le Rwanda, Londres financera dans un premier temps le dispositif à hauteur de 140 millions d’euros. Le gouvernement rwandais a précisé qu’il proposerait aux migrants la possibilité «de s’installer de manière permanente ».
Lors d’une conférence de presse à Kigali, la porte-parole du gouvernement Yolande Makolo a estimé que cet accord constituait une « solution à un système d’asile mondial défaillant ». « Nous ne pensons pas qu’il soit immoral d’offrir un chezsoi aux gens », a-t-elle ajouté, indiquant que le Rwanda serait « heureux » d’accueillir « des milliers de migrants ».
« Politique immorale »
« Cette politique immorale couvre le Royaume-Uni de honte », ont estimé dans une lettre publiée hier par le journal The Times, les chefs spirituels de l’Église anglicane. Alimentant la polémique, le prince Charles a jugé en privé « consternant » le projet du gouvernement, alors qu’il doit participer à une réunion du Commonwealth à partir du 20 juin au Rwanda.