Jérôme de Verdière SENS DESSUS DESSOUS
Pour son premier roman, original, drôle et effrayant, l’auteur met le doigt là où ça fait mal. Il évoque tour à tour le féminisme, le couple, la nostalgie, la bien-pensance...
En septembre, Jérôme de Verdière – animateur de La Revue de presse sur Paris Première et aussi auteur pour Laurent Gerra sur RTL – et sa petite famille s’installeront à Toulon. « C’est ma région depuis ma naissance. » Le romancier y viendra-t-il en bermuda ou en robe ? Cette fameuse robe, source d’intrigue de son premier roman, La Robe. Étoffe légère prétexte à une réflexion sur l’évolution de notre société. De notre monde, un peu fou.
Cette idée folle vient-elle de votre dressing ?
La vraie histoire c’est que, justement, avec ma femme, au moment de l’arrivée de Me Too et du néoféminisme dans le débat public, on a discuté. On s’est engueulé. On a ri. Et un jour, en fin de discussion, pour l’alléger, j’ai balancé : ‘‘Moi je veux bien tout faire, mais on ne me fera jamais porter de robe’’. C’était une boutade. Mais la phrase est restée dans un coin de ma tête et je me suis dit : “Au fait, qu’est-ce qu’il se passerait si on m’obligeait à en porter une ?”. L’idée du roman est partie de là...
Avec en fil rouge, le féminisme...
Ce discours, dit progressiste, devient un peu fou. On entend, on lit des trucs incroyables. Une fois, je suis tombé sur une interview de Camélia Jordana, dont le titre était : “L’homme blanc occidental est responsable de tous les malheurs du monde”. Je ne savais pas que Ben Laden, Pol Pot ou Amin Dada étaient des hommes blancs occidentaux !
Ces discours vous agacent-ils ?
Disons que, comme beaucoup d’hommes, au fur et à mesure, je me dis que je ne comprends plus le monde dans lequel j’évolue. On en devient au mieux caricatural, au pire un réac obsédé.
Par le burkini, par exemple ?
En ce moment, on en parle beaucoup. On a le droit d’être pour ou d’être contre, mais je ne vois pas comment une féministe peut le défendre. Intellectuellement, ça m’échappe.
Et l’ultra moralisation de notre société ?
Elle est quasi totale. Moi, je n’ai pas été élevé dans le féminisme, on ne m’a jamais fait de discours moralisateur à la maison, mais c’était évident de bien se comporter avec les femmes. Je ne défendrai jamais un type qui met une main au cul à quelqu’un. En vrai, ce qu’il mérite ce connard, ce n’est pas la peine de mort, mais une bonne baffe dans sa gueule.
Les femmes ?
De manière générale, on les énerve et elles ont raison d’être énervées. Parce qu’on est là à ruminer, à s’énerver pour des conneries. Et, en même temps, elles ont de la tendresse pour nous.
Votre femme ?
Elle me dit toujours : “Je ne suis pas une victime. J’ai envie d’être une combattante.”
Des combattantes ?
On voit bien que toutes les féministes des années 1960-1970, Gisèle Halimi, Élisabeth Badinter,
Catherine Deneuve à sa façon, elles s’opposent totalement au néoféminisme. Objectivement, je pense qu’elles ont plus fait pour les femmes que Caroline de Haas et Sandrine Rousseau. Elles ont pris leur destin en mains et ont obtenu des choses.
Vous évoquez aussi la nostalgie...
Elle est mignonne. Ce n’est pas que mortifère la nostalgie. Le passé, ce sont aussi de bons moments.
Et les conflits de générations...
Le monde est fait par les plus jeunes. Même s’il ne te plaît pas, ce n’est pas toi qui y vivras. C’est le choc des générations. Nous, on voudrait que tout reste pareil.
Eux ont envie de construire leur monde. C’est normal, ils seront un jour aux manettes.
Avec un langage à déchiffrer ?
Le langage d’entreprise, par exemple, sur trois mots, il y a deux anglicismes. J’ai décidé de ne plus répondre à ces mails-là. On a une belle langue, autant l’utiliser. Regardez, dans les magazines, au lieu de parler de gastronomie, on met de la food partout. C’est dingue !
Mais pas grave !
Pas grave, du tout. Je ne voulais d’ailleurs pas faire un bouquin moralisateur. Je déteste ça.
On réfléchit, on rit, on s’inquiète même...
Tout se passe sur une soirée. Très vite. Avec une forme théâtrale. C’est une comédie qui progressivement se transforme en un truc inquiétant. Un peu comme dans le cinéma italien de Dino Risi ou Ettore Scola.
Pour finir, de quelle couleur ?
Je ne comprends pas. De quelle couleur, quoi ?
La robe que vous allez porter !
Ah (rires). J’en porte une sur la couverture du livre. Parce que c’est moi dessus. La couleur ? Il faudrait demander à ma femme ! Mais je viendrai peut-être bientôt en robe à une séance de dédicaces.