Monaco-Matin

Futura, rencontre avec une légende du street art

Présent au festival UPAINT, le pionner du graffiti est passé de l’art de rue à la scène internatio­nale. Depuis les années 1980, il séduit les plus grandes marques et exposition­s du monde entier.

- MARCO THIOLLIER

Derrière sa cagoule se cache Futura, un artiste horsnorme. Le New Yorkais est considéré comme l’un des artistes les plus populaires du mouvement de l’art de rue dont l’influence dépasse les frontières. Pour Alberto Colman, l’organisate­ur du festival monégasque UPAINT, « c’est un immense honneur pour nous qu’il soit là. C’est la grande star du milieu, la légende. C’est un peu la surprise parce qu’il ne fait plus les festivals de street art. Il va sûrement ramener du monde, d’autant plus que les collection­neurs savent qu’il est ici ».

Graffitis sur les trains

Mr. OneTeas, qu’on ne présente plus et qui fait partie des artistes présent au festival est honoré d’avoir ce virtuose de la bombe à ses côtés. « C’est beau de pouvoir partager ses moments là avec un artiste qui a marqué l’histoire depuis plusieurs décennies. De pouvoir peindre à côté de lui, je le prends vraiment comme un plaisir » .Un plaisir qui est partagé par Futura, qui a commencé à peindre sur les terrasses du Casino. « C’est un bonheur de pouvoir être ici et de faire partie de ce très beau groupe d’artistes. Je suis très excité à l’idée de rencontrer des gens et de revoir de vieux amis. Chaque personne ici a son propre style, son propre univers.

Je trouve ça très intéressan­t », sourit-il.

Futura 2000, de son vrai nom Leonard McGurr, a commencé le street art il y a 50 ans, à New York. Dès le début des années 1970, alors qu’il n’a que 15 ans, il fait ses premiers graffitis dans les tunnels du métro new yorkais. «Je me souviens, j’étais très curieux comme garçon. Ça m’intriguait de voir les gens qui faisaient des graffitis sur les murs et les trains. J’explorais. Ensuite je suis rentré dans le système, j’ai trouvé ça très excitant même si assez dangereux. J’étais fils unique, donc je cherchais à joindre un groupe. »

Le jeune artiste rencontrer­a différents collectifs comme UGA (United Graffiti Artists). C’est le graffeur Stay High 149 qui va le faire tomber amoureux de l’art de rue. Futura 2000 devient le premier artiste à bomber intégralem­ent un train. Après un accident dans le métro, en taguant, il fait une parenthèse dans sa vie d’artiste et rejoint l’armée et le corps des Marines.

Révélé grâce au hip-hop

Au début des années 1980, l’art de rue devient très populaire grâce à l’explosion du hip-hop. « L’année 1980 a été un vrai tournant dans ma vie et dans celle des artistes de rue à New York en général. Avant on faisait nos graffitis dans le métro, sous terre, et on a eu l’opportunit­é de faire notre travail là-haut, dans la vraie vie. » Futura fait son retour notamment en Europe où il peint pendant les performanc­es de break-dance du Rock Steady Crew, et les concerts de Grandmaste­r Flash ou d’Afrika Bambaataa. Sa meilleure rencontre restera probableme­nt celle avec le groupe The Clash en 1981. Ils proposent à Futura de concevoir une banderole à leur nom, de grapher sur scène, avant de réaliser leur pochette d’album.

Père du graffiti abstrait

Lorsqu’il réalise ses premières oeuvres sur toile, il devient le précurseur du graffiti abstrait. « Les gens disent que j’ai une approche abstraite mais je pense que je suis juste quelqu’un de libre d’esprit. Je peins en fonction de ce que je ressens, je suis très spontané. Avant on me comparait à Kandinsky, et je me suis dit qu’un jour c’est d’autres qu’on comparera à moi et c’est arrivé », témoigne l’artiste. Il a été parmi les premiers graffeurs à être exposés dans des galeries d’art contempora­in au début des années 1980. En 1981, le prodige expose aux côtés d’Andy Warhol et de Jean-Michel Basquiat. Cette exposition New York/New Wave lui aura permis de franchir un nouveau cap. Un an plus tard, il organise sa première exposition personnell­e à la Fun Gallery. À partir de ce moment, il commence à exposer aux quatre coins de la planète et se fait connaître aux yeux de tous. Parmi ses exposition­s majeures dédiées au graffiti on notera celle au Musée Boijmans van Beuningen à Rotterdam, à la Tate Gallery à Londres, ainsi qu’à Hanovre, Munich ou encore Hong-Kong et Tokyo.

Des collaborat­ions avec Louis Vuitton et Nike

« Ma carrière, ça a été les montagnes russes avec tout le temps des hauts et des bas », affirme Futura. Mais 50 ans après il est toujours au sommet de son art et continue d’influencer les artistes à travers le monde. Il a fait l’objet d’une exposition en 2019 à la Urban Spree Gallery de Berlin et une grande installati­on en 2020 au Palais de Tokyo à Paris. Sa créativité sans limite l’a même amené à collaborer avec de nombreuses marques dont Supreme, Nike, BMW, Louis Vuitton, Off-White, et plus récemment, Comme des Garçons.

«Je suis très fier des collaborat­ions. Aujourd’hui je fais de la peinture, je fais des graffitis, je travaille avec Nike, ça fait partie de mon travail. Avec un peu de chance, je vais encore m’améliorer dans ce que je fais. Je ne vais pas dire que ce que j’ai fait avant est incroyable car je suis persuadé que le meilleur reste à venir. C’est ma vision », témoigne-t-il. Certaines de ses toiles se vendent aujourd’hui à près de 80 000 euros.

Futura 2000 aura inspiré des génération­s d’artistes. Il aura marqué de façon indélébile le street art et ce n’est sans doute pas fini.

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(Photo Cyril Dodergny) Futura 2000 a débuté la création de son oeuvre, hier au festival « UPAINT » de Monaco.

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