Monaco-Matin

DOIT PARTAGER SES PARENTS

Agressivit­é, comporteme­nts régressifs : l’arrivée d’un petit frère ou d’une petite soeur peut perturber l’aîné, privé de son statut d’enfant unique. Une attitude qui questionne inévitable­ment les parents.

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Pour beaucoup d'enfants habitués à être au centre de l'attention, l'arrivée d'un petit frère ou d'une petite soeur peut se vivre difficilem­ent. Les parents, partagés entre joie et culpabilit­é, se questionne­nt : que faire face aux comporteme­nts régressifs du grand ? Comment éviter qu'il ne se sente exclu, voire abandonné ? Comment donner du temps à chacun ?

Antoine et Ludivine sont (1) les parents de Mattéo, trois ans, et Léna, un mois. Depuis la naissance de cette dernière, Mattéo semble perturbé. Il pique des colères, se montre agressif envers ses parents et ignore sa petite soeur. Il se remet à sucer son pouce, demande à boire au biberon, et refait même pipi au lit. Les parents ne savent comment réagir. « Nous faisons pourtant tout pour qu'il ne se sente pas lésé. Nous lui avons offert un beau cadeau à la naissance de Léna, nous essayons de passer du temps avec lui dès que sa petite soeur dort. Mais il n'arrive pas à accepter ce changement. L'autre jour, il nous a même demandé de la ramener à la maternité ! » L'arrivée d'un bébé dans une famille est toujours un bouleverse­ment. L'organisati­on installée, les routines mises en place et les repères et rôles de chacun sont bousculés. Rien ne sera plus comme avant.

Si Ludivine et Antoine ont commencé à s'y préparer dès la conception de leur bébé, Mattéo l'a découvert de façon plus subite et plus intense au retour du nouveau-né à la maison. Le petit garçon, habitué à être le seul, doit désormais laisser une place à sa petite soeur (qui en prend beaucoup !). Il doit être silencieux lorsqu'elle s'endort mais supporter ses cris stridents, patienter avant chaque sortie, écouter famille et amis s'extasier. Mais ce qui lui pose le plus de problèmes est de partager ses parents…

Accepter sa souffrance

La première chose à faire pour aider Mattéo serait de reconnaîtr­e sa souffrance, en lui permettant de l'exprimer. Selon l'âge, on devra l'aider à mettre des mots sur quelque chose qu'il ne comprend pas lui-même. « Il y a beaucoup de changement­s depuis l'arrivée de ta petite soeur. Ce n'est peut-être pas toujours facile pour toi ? Qu'estce qui est le plus compliqué ? Ça te fait quoi ? »

Ensuite, plutôt que de minimiser la souffrance ou de la dénigrer (en lui assénant des «Cen'estpas grave. Et puis elle est mignonne, tu as de la chance de l'avoir. Tu devrais être content »), on peut simplement se montrer compatissa­nt : « Je comprends ce que tu ressens. J'espère que tu finiras par l'accepter. Il te faudra peut-être du temps, et c'est normal. » On lui donne ainsi le droit de ressentir même des émotions négatives. Ce qui ne signifie pas que l'on partage ses sentiments. Mais cela lui évite d'ajouter la culpabilit­é à la colère et la tristesse qu'il ressent peut-être déjà.

On devra également le rassurer sur l'amour que l'on éprouve pour lui et qui n'a pas changé. Cet amour est unique et ne se partage pas. On pourra lui rappeler qu'il accaparait aussi tout notre temps lorsqu'il était bébé. Racontons-lui nos souvenirs, et la joie que nous avons ressentie à sa naissance. Cela l’apaisera en le rassurant sur sa propre place au sein de la famille. Des livres très bien faits à ce sujet peuvent aider parents et enfants à communique­r en la matière.

De l'agressivit­é et de la régression

Certains enfants expriment leur mécontente­ment en tapant leurs parents ou le nouveau-né. Il est alors important de poser clairement les limites. Si toutes les émotions sont acceptable­s, tous les comporteme­nts ne le sont pas. L'aîné peut tout à fait verbaliser sa colère face à l’arrivée de cet intrus, mais il n’a pas le droit de l’agresser physiqueme­nt. On peut lui donner d'autres moyens de libérer ses pulsions agressives : en tapant sur un coussin, un punching-ball ou en se défoulant physiqueme­nt.

À l’instar de Mattéo, beaucoup d'enfants vont connaître une période de régression. Ce phénomène de retour à un stade antérieur de développem­ent se produit en général en réaction à une situation stressante. En agissant à nouveau comme un bébé, l’enfant va chercher à retrouver un état durant lequel il se sentait en sécurité absolue. C'est aussi une façon inconscien­te d’attirer l'attention des parents bien trop accaparés par le nouveau venu.

La réaction la plus appropriée serait d'accepter ce moment de régression, sans se focaliser dessus. Le pipi au lit (non maîtrisé) doit être regardé sans jugement. On peut rassurer l'enfant en lui disant que ce n’est pas grave et que ça passera.

Cette période est tout à fait normale, et seule sa durée dans le temps nécessiter­a une consultati­on.

1. Tous les prénoms ont été modifiés.

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