Monaco-Matin

Tom Wood LIVERPOOL SENTIMENTA­L

Pendant 20 ans, le photograph­e irlandais a consigné avec tendresse le quotidien des Liverpuldi­ens. Un travail à voir au centre de la photo de Mougins jusqu’en octobre.

- Every day is Saturday. AURORE HARROUIS aharrouis@nicematin.fr

Il appelle cela des « cadeaux ». Cette toute jeune femme avec son bébé dans les bras à la sortie du ferry, au premier plan. Un rayon de soleil. Deux grands-mères qui s’effacent au loin. Compositio­n parfaite. « Cette jeune fille m’a fait cadeau de cette image. Rien ne vient de moi », souffle-t-il. Et merci le hasard, merci la vie ! Vendredi, Tom Wood était au Centre de la photograph­ie de Mougins pour inaugurer la rétrospect­ive qui lui est dédiée jusqu’à la mi-octobre, Every day is Saturday : portraits anglais. Photograph­e de rue, du quotidien, de ces petits riens qui font des vies, celui qui est né en Irlande en 1951 a traîné son objectif et posé un regard bienveilla­nt sur sa terre d’adoption pendant plus de vingt ans. Le Liverpool populaire des années rigueur Thatcher et un peu plus loin...

Pudeur et respect

Avec pudeur et respect, il saisit la provocatio­n de deux pin-up en short et talons hauts qui le toisent, assises sur le capot d’une voiture de sport rouge. Le regard profond de Rachel, qu’il photograph­ie une première fois à 10 ans, puis à 17 ans. Tom Wood est un des leurs. Ni plus ni moins. Les enfants, auxquels il distribue des instantané­s, le surnomment Photie Man (le « type aux photos »).

Tom Wood. : Mothers, Daughters, Sisters. 1978-79.

Il voyage dans Liverpool en bus, puisqu’il n’a pas de permis de conduire. Aussi boulimique qu’un touriste, il répète les trajets à la recherche du bon moment. Va au marché avec les femmes, qui, absorbées par des monticules de chaussures, oublient son Leica 35.

Wood oeuvre là où vivent, travaillen­t, se divertisse­nt les gens. Les montre tels qu’ils sont, le regard complice et non documentar­iste, sans vision préalable. Là, la fougue des supporters se rendant au stade d’Anfield pour supporter les Reds... Sur fond de briques rouges ou de posters de femmes aux seins nus qui ornent les murs des piaules des chantiers navals de Cammmell Laird, où ont travaillé des génération­s d’hommes. «Je m’y suis d’abord rendu pour un travail de commande pour les archives de la photograph­ie documentai­re... Il devait durer six semaines. J’y suis finalement retourné régulièrem­ent pendant 3 ans. » La série, à dominante rouille, qui en découle, est saisissant­e. Des gueules, qui la tirent d’ailleurs. Rares sont ici les sourires, dans ces couleurs chatoyante­s ou ces noir et blanc subtils. Il y a encore ces hommes, ces femmes qui, enfin, se rencontren­t au night-club dans la série Looking for love, où Wood suit au plus près des jeunes gens dansant, se bécotant, se pelotant. N’y cherchez pas de symbole, de jugement. Pas d’image conquérant­e ou sensationn­elle. Juste un regard plein d’empathie sur ces êtres.

Tom Wood. Centre de la photograph­ie de Mougins (43 rue de l’église). Exposition coproduite avec le Centre d’Art GwinZegal Guingamp. Commissari­at : Jérôme Sother, Yasmine Chemali, François Cheval. Jusqu’au 16 octobre en 2022. Ouvert tous les jours sauf mardi et jeudi de 11 h à 20 h (22 h en juillet août). Tarifs : 6€.

Tom Wood.

Tom Wood.

Série : Cammell Laird Shipyard. 1993. : Football. 1992.

Tom Wood. : Mothers, Daughters, Sisters. 1985.

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