« Il faut que tout le monde se mette autour de la table pour trouver des solutions pérennes »
Norbert Berginiat, médecin chef et vice-président de la fédération des sapeurs-pompiers de France
Dans un communiqué diffusé hier, les sapeurs-pompiers détaillent plusieurs propositions pour résorber la crise des urgences. Pourquoi cette démarche ?
Nous sommes les premiers pourvoyeurs des services d’urgence avec 4 millions d’interventions en pré-hospitalier par an et force est de constater que ceux qui sont chargés de trouver de solutions à cette crise ne se tournent pas vers nous. Nous voulons attirer l’attention pour dire que les sapeurs-pompiers sont là et ont des solutions à apporter.
La crise n’est pas nouvelle. Comment en est-on arrivé à une telle saturation ?
Depuis 20 ans, nous sommes confrontés à une dégradation de l’offre, avec une baisse du numerus clausus, dans un contexte d’augmentation de la démographie et de vieillissement de la population. La demande de soins est plus importante et les gens se tournent vers les urgences. Il n’y a plus de médecin dans certains territoires et il y a eu un hospitalocentrisme pendant des années. Un lobbying qui disait “Venez aux urgences, composez le 15”.
Dans quelles mesures les pompiers pâtissent de cette crise ?
Les VSAV [véhicule de secours et d’assistance aux victimes] attendent parfois des heures avant de pouvoir déposer des malades. Pendant ce temps les patients ne sont pas pris en charge par les urgences et les sapeurs-pompiers sont mobilisés et ne peuvent plus être disponibles pour d’autres missions dans une période où nous devons faire face aux conséquences du dérèglement climatique (canicule, incendies).
Pressentez-vous un été particulièrement difficile ?
Les sapeurs-pompiers vont être très sollicités, surtout en zone touristique où il y a plus de monde, plus d’activités, et, dans le sud, mais pas seulement, le risque feux de forêt. Les incendies ont commencé très tôt cette année. Et les services qui ferment font que les VSAV sont amenés à faire de la route, ce qui diminue le temps de disponibilité des sapeurspompiers.
Vous proposez des mesures « simples et immédiatement praticables » dites-vous. Pourquoi personne n’y a pensé plus tôt ?
Certaines mesures existent déjà. Déposer un patient ailleurs qu’aux urgences est possible depuis 2015 mais les ARS ne l’ont pas mis en oeuvre dans les territoires. Un patient qui se blesse et a besoin de trois points de suture, c’est plus opportun de le déposer chez un médecin à une centaine de mètres plutôt qu’aux urgences à l’autre bout du département et où il y a des heures d’attente. Il faut que tout le monde se mettre autour de la table pour trouver des solutions pérennes.