Un policier agressé par celui qu’il avait interpellé en 2015
Vendredi dernier, un agent de police municipale qui n’était pas en service a été attaqué à Carrefour Antibes par un individu. Il avait interpellé ce dernier sept ans plus tôt à Vallauris.
Des scènes dingues, improbables, violentes, il en a pourtant vues. Mais celle-là reste inclassable. Vendredi dernier, Jérôme se
(1) rend au centre commercial de Carrefour Antibes avec ses trois filles. Elles ont 5, 10 et 12 ans. Dans la vie de tous les jours, leur papa porte un uniforme bleu. Policier municipal depuis 17 ans, il a évolué durant 12 ans à Vallauris Golfe-Juan. Depuis, il assume ses fonctions dans une autre commune du département. « Mais ce jour-là, je n’étais pas en tenue », souligne le quadragénaire qui vers « 17 heures, 17 h 30 » entre dans la galerie de l’hypermarché aux côtés de ses enfants sortis de l’école.
Scène de panique
« Avant d’aller acheter un goûter à l’espace boulangerie, je les accompagne aux toilettes et j’attends devant », relate le père de famille qui s’apprête à croiser une figure familière : « Je vois cet homme, que j’avais interpellé en 2015, arriver dans le magasin, chariot vide, avec sa femme. Je ne le fixe pas, je l’aperçois du coin de l’oeil, je préfère regarder mon téléphone. » Jusque-là, tout va bien. « Il rentre aux toilettes, ne me calcule pas mais je sais qu’il m’a vu. Mes filles ressortent et lui sort aussitôt et m’interpelle en me demandant : “on se connaît ?” » Le policier lui répond. « Et ensuite, il chuchote quelque chose à l’oreille de sa femme, va sur le parking. Bref, je continue ma route vers la vitrine des viennoiseries. »
Du coin de l’oeil, il assiste au retour de l’individu près des boutiques. « Il se rapproche de plus en plus, et d’un coup accélère. » Sentant le danger arriver, il se retourne : « Et là, il sort une grosse gazeuse au poivre de 300 ml. Et me rince. » Scène de panique. Ses filles reçoivent également du produit sur elles. Mouvement de foule. Violence. « Avec un bâton de bois d’environ un mètre, il essaye de me porter des coups, dont un qui m’entaille au coude. Dès que j’avançais vers lui, il me gazait. J’ai dû lui lancer des paniers à roulettes pour qu’il arrête. »
Il prend la fuite. « Je me retourne, et je ne vois qu’une de mes filles, pas mes deux grandes. » Panique.
« Je crie leurs prénoms. Une cliente les avait mises à l’abri. » Rassuré, il fonce vers la sortie pour rattraper son agresseur. « Mais il était déjà parti avec son véhicule. »
La rancune tenace
En même temps, il connaît déjà son identité. Il l’a rencontré il y a 7 ans, lorsqu’il travaillait encore dans l’équipe de Vallauris. « On l’avait interpellé avec mon collègue dans le cadre d’un conflit de voisinage, avec violences. Il s’était rebellé lors de l’interpellation et avait même porté plainte contre nous à l’époque en disant qu’on l’avait assis à l’envers dans la voiture, qu’on l’avait frappé durant le trajet… Bref ça avait été classé. » Un homme connu des services ? « Non, c’est un quinquagénaire qui n’a pas un gros casier. Il n’a pas fait de prison à la suite de ça. » Pas de quoi envisager un tel acharnement donc ? « Avec le recul, maintenant, il y a un fait qui prend sens. Il y a environ un an, cet homme a appelé au poste de la police municipale de Vallauris et a menacé mon ancien collègue et moi-même. La conversation a été enregistrée. Une plainte a été déposée. Mais il n’a jamais été sanctionné pour ces faits. »
La rancune tenace donc. « Vous savez, on est habitués à recevoir des menaces. L’ambiance Club Med, ce n’est pas mon quotidien », rappelle l’agent qui a terminé cette fameuse journée à l’hôpital avec ses filles. Évidemment, il a déposé plainte.
Son état émotionnel ? « Je suis sur les nerfs. »
C’est donc avec un certain soulagement qu’il a appris l’interpellation de l’intéressé mercredi : « Bien sûr, j’espère que la justice apportera une réponse appropriée aux faits. » Une agression remettant en question son avenir en uniforme ? « Je ne veux pas que l’on me plaigne. J’ai une famille soudée, un cadre de vie agréable à Antibes. Je suis bien loin de vivre les difficultés des confrères en région parisienne par exemple. Mais c’est vrai que l’on s’interroge. »
1. Le témoin souhaite rester anonyme, il ne s’agit pas de son prénom.