« Il faut que les parlementaires se saisissent du sujet et tiennent compte des observations »
Ce rassemblement était aussi l’occasion pour Martine Landry, militante de longue date d’Amnesty International et référente régionale de l’ONG en PACA, de passer le flambeau à Christine Poupon. Ensemble, les deux bénévoles reviennent sur les dernières actualités à la frontière.
Il s’est passé beaucoup de choses depuis la dernière fois que vous avez manifesté ici, il y a un an. Une commission d’enquête parlementaire est venue à Menton déjà…
Martine Landry : Cette commission avait été demandée en 2019 par des manifestations à toutes les frontières. Elle a eu lieu l’été dernier. Le rapport a été présenté en novembre, et on a eu la surprise de voir que la totalité des recommandations faites par celui-ci nous était favorable. C’est donc une sacrée avancée. Maintenant, il faut que l’Assemblée s’en saisisse. Que les parlementaires prennent le sujet à bras-le-corps, et tiennent compte des observations.
Puis il y a eu la guerre en Ukraine, avec l’arrivée massive de réfugiés ukrainiens. Vous pensez que ça a fait bouger les lignes ?
Christine Poupon : Tous les acteurs de la solidarité ont salué le formidable accueil qui a été fait aux réfugiés ukrainiens. Simplement, on ne peut que regretter que cet accueil soit à deux vitesses, et que d’autres populations qui ont fui la guerre n’aient pas reçu ce
même traitement. De la part de la population comme des institutions.
On vient de vivre une campagne des législatives dans la 4e circonscription où la question des contrôles à la frontière a été largement mise en avant par certains candidats. Cela s’est conclu par l’élection d’une députée RN. Ça vous inquiète ?
C.P. : Amnesty ne se prononce pas sur les questions de politique intérieure, on peut juste déplorer que des valeurs contraires aux nôtres gagnent. On ne partage pas les valeurs du RN, clairement.
La députée a réagi à l’annonce de création d’un centre pour migrants à Vintimille, en déclarant que c’était une mauvaise nouvelle pour Menton. Qu’en pensez-vous ?
M.L. : C’est très compliqué, l’histoire de ce centre. On ne sait pas encore où ni dans quelles conditions il doit voir le jour. On est en train d’échanger avec les autorités italiennes pour savoir sur quel décret ils se basent, etc.
C.P. : A priori, on s’oriente vers un centre fermé, ce qui ne conviendra pas à un certain nombre de personnes qui veulent juste passer.
M.L. : Le problème, c’est aussi d’aller donner des refus d’entrée sur un sol étranger…
Avez-vous vu les propos de l’évêque de Vintimille, qui charge la France sur le rétablissement des contrôles aux frontières depuis 2015 ?
C.P. : Tout à fait. C’est très juste ce qu’il dit.
M.L. : Antonio Suetta était déjà là sur les rochers, avec nous, en 2015. Il avait offert un local désaffecté pour accueillir des réfugiés, et avait négocié avec les autorités italiennes pour ne pas qu’elles demandent le nom des personnes accueillies. C’est une personne qui a du poids (sourire).