Décryptage d’un phénomène
Même Charles Leclerc a connu pareille mésaventure. C’était à Viareggio, en Italie, à Pâques, avant le Grand Prix de Formule 1 d’Imola. Le pilote monégasque de Ferrari, abordé par un faux fan, l’a vu détaler avec sa montre. Une Richard Mille à 300 000 euros. Symptomatique d’un fléau sans frontière.
Flambée des cas
Pas de stats connues sur ces vols. Mais « on a facilement un à trois faits par semaine, évalue le procureur de la République de Nice, Xavier Bonhomme. Il y a une recrudescence par rapport à l’année dernière. Certes, il y a plus de monde dans les rues. Les victimes sont soit à pied, soit dans des voitures de luxe qui attirent l’oeil. » Dans le Var, la gendarmerie a vu ce « phénomène montant » germer dès le mois de mai, à SaintTropez ou encore Sainte-Maxime, désormais. Dans les Alpes-Maritimes, la police nationale a pris le problème «à bras-le-corps » dès le mois d’avril. Les voleurs n’attendent plus l’effervescence du Festival de Cannes.
« Démocratisation »
Les montres de valeur ne séduisent pas que les collectionneurs. Logique : « C’est un bien mobilier qui prend peu de place, qui se vend plutôt bien à un prix extrêmement attractif », résume Damien Savarzeix, procureur de la République de Grasse. D’où son succès, dans les cambriolages comme dans la rue.
Ces montres attirent de nouveaux publics, aussi, poursuit le magistrat. « C’est devenu beaucoup plus éclectique. Avant, la délinquance était ciblée sur les montres à très, très haute valeur, à cinq voire six zéros. On observe une « démocratisation » du vol de montre, un ciblage sur des montres de prix compris entre 1 000 et 30 000 euros. »
Scènes de violence
Gaz lacrymogène. Coups de crosse. Coups de poings, de pied. Les arracheurs n’y vont plus de main morte. Un propriétaire de Ferrari gazé alors qu’il fait le plein à Antibes. Des automobilistes frappés au feu rouge à Saint-Tropez. « C’est parfois très violent », confirme Xavier Bonhomme. « Avant, on avait des spécialistes avec le gang des Napolitains. La délinquance s’élargit », explique Florence Gavello. Les voleurs sont aussi des « locaux », agissant sur commande ou flairant le bon coup… mais pas forcément le bon client : un bijou peut cacher une réplique.
La riposte
Ce matin, le parquet de Grasse se réunit « pour définir une stratégie d’action contre ce phénomène », prévient Damien Savarzeix. Son homologue niçois prend ce fléau « extrêmement au sérieux ». Dans le golfe de Saint-Tropez, la gendarmerie a réactivé son Groupe d’enquête spécialisé (GES) créé en 2021.
La PJ se réunit chaque semaine avec gendarmerie, police aux frontières et DDSP 06. Celle-ci a réédité un flyer de prévention, désigné des référents, briefé ses opérateurs radio, sensibilisé ses équipages. Mais surtout, elle appelle les amateurs de belles montres à être « vigilants, discrets et, en cas de vol, à alerter aussitôt les forces de sécurité ».