Nice : un réseau international démantelé
Patek Philippe, Rolex, Audemars Piguet, Richard Mille… La spéculation autour des montres de luxe, dont certains modèles dépassent parfois les 400 000 euros pièce, n’a pas échappé au grand banditisme. La recrudescence des vols de ces montres de prestige sur la Côte d’Azur (70 ont été volées rien que dans les A.-M. entre janvier et mai, soit 600 % d’augmentation) mais également à Paris, Saint-Tropez ou dans les villes touristiques européennes, a piqué la curiosité de la police judiciaire de Nice. D’autant que le nom d’un receleur local revenait régulièrement aux oreilles de la BRB, la Brigade de répression du banditisme, et de la division économique et financière.
Une bijouterie de la promenade du Paillon fermée
« Ce genre d’enquête d’initiative est un pari », a confié le commissaire Florent Mion, hier, lors d’une conférence de presse. Pari réussi : la semaine dernière, 200 policiers ont été mobilisés et trente-cinq personnes ont été interpellées à Nice, Paris, Andorre et Anvers.
153 montres, trois puissantes Audi, 135 000 euros en petites coupures et même 3 kg de cocaïne (qui feront l’objet d’une autre procédure distincte) ont été saisis. « Sur cette
Quatre personnes présentées par les policiers niçois de la BRB ont été écrouées par un juge de Marseille.
enquête qui sort de l’ordinaire, nous avons mis des moyens un peu exceptionnels », concède le commissaire niçois. Vendredi, épilogue d’un an d’enquête, cinq suspects ont été mis en examen par un juge d’instruction de la Jirs (Juridiction interrégionale spécialisée) de Marseille pour association de malfaiteurs en vue de commettre un délit puni de dix ans et blanchiment. Quatre ont été écrouées. Deux mandats d’arrêt et deux mandats d’amener ont été lancés. D’autres personnes seront convoquées ultérieurement par le magistrat. Une bijouterie de la promenade du Paillon, à Nice, un peu trop fréquentée par des membres du grand banditisme, a été fermée. Au coeur de ce réseau très organisé figure un homme de 42 ans, interpellé à Nice mercredi par la BRI (Brigade de recherche et d’intervention). Élégant, affable, il est présenté par la PJ comme un « CorsoAzuréen ».
Un homme qualifié « d’escroc de haut vol » par Patrice Ollivier-Maurel, procureur adjoint de la Jirs. L’individu, officiellement serveur dans un restaurant, mène grand train entre Saint-Laurent-du-Var, Paris, Dubaï et Marbella, n’hésitant pas à photographier d’impressionnantes liasses de billets… Son carnet d’adresses lui permettait de proposer ses services de receleur quand il avait vent du vol d’une montre de luxe. Il est aussi soupçonné d’avoir commandité des vols à main armée pour s’approprier certains modèles rares. Le prix de revente des montres volées très élevé laissait supposer que ces malfaiteurs avaient la capacité de les remettre sur le marché légal. Hypothèse confirmée.
Juteux bénéfices
« La force de ce réseau, c’est le packaging », confirme le commissaire Mion. Les montres volées ne se rachetaient pas à 10 % de leur valeur comme habituellement mais à 50 % voire à 100 %, tant le marché spéculatif est vivace. Elles étaient surtout proposées à des acheteurs, certains de bonne foi, dans leur écrin d’origine, certificat d’authenticité à l’appui. Des horlogers pointus, anciens salariés de maisons prestigieuses, étaient même capables de transformer des séries classiques en prétendues séries spéciales ! De quoi augmenter encore les juteux bénéfices de ce réseau qui pouvait aussi, à l’occasion, s’intéresser à des bijoux ou à de la maroquinerie de luxe. L’enquête se poursuit, notamment avec la nécessaire expertise des 153 montres découvertes en perquisition.