Une lessiveuse pour argent sale
Dans l’histoire récente du démantèlement d’un réseau international de voleurs de montres de luxe, conduit par la police judiciaire de Nice, l’enquête sur Frédéric F., 42 ans, et son réseau fera date (lire nos éditions de mardi).
Elle a mobilisé, outre la BRB et la division économique et financière locales, des offices centraux, des policiers de Paris, Lyon, Marseille ou Metz, des enquêteurs belges et espagnols.
Le juge d’instruction de la JIRS de Marseille a recouru à des moyens d’enquête exceptionnels, à des techniques de renseignements dignes du contre-espionnage. La PJ, qui s’inquiète par ailleurs pour son avenir au sein de la police nationale, a engagé des moyens d’investigation à la hauteur des millions d’euros brassés par le cerveau de ce trafic. Et ça a payé : sept mises en examen, cinq personnes écrouées à ce jour, 153 montres saisies ainsi que 137 800 euros. Les protagonistes devront répondre de recel de vols en bande organisée, blanchiment, associations de malfaiteurs.
Un incroyable patrimoine
Connu de la justice et condamné dans des escroqueries aux cartes bancaires, Frédéric F., souvent cité dans le recel de bijoux, rarement confondu, a amassé un incroyable patrimoine à l’étranger. La justice tente désormais de confisquer ses biens. Frédéric F. possède aussi un impressionnant carnet d’adresses et compte parmi ses clients des trafiquants de drogue d’envergure, amateurs de montres de luxe. Pas seulement pour afficher leur réussite mais pour blanchir leur argent liquide.
« Le marché des montres est très spéculatif, souligne le commissaire Florent Mion, le chef de l’antenne PJ de Nice. C’est un objet de thésaurisation pour des investisseurs.
Une bijouterie niçoise liée au trafic a été fermée.
On ne peut pas prendre l’avion pour Dubaï avec un million d’euros en billets de banque mais avec trois ou quatre montres à 200 000 euros, ça passe mieux. »
Certains ont ainsi pu, une fois les montres revendues sur place, investir ensuite dans l’immobilier. « Le reconditionnement de ces montres volées, avec numéros refrappés, s’apparente à ce qu’on rencontre dans le trafic de voitures de luxe », observe un enquêteur.
Mercredi, l’inspecteur général Eric Arella, directeur zonal de la police judiciaire, est venu à Nice féliciter ses troupes pour l’aboutissement, en 2022, de quelques enquêtes complexes comme la saisie d’une tonne de cocaïne mélangée à du sucre ou la résolution d’un meurtre et de plusieurs tentatives dans les cités niçoises.