Monaco-Matin

Gabriel Attal : « Le temps de l’argent gratuit est fini »

Le nouveau ministre des Comptes publics est à Toulon aujourd’hui, pour annoncer un nouveau dispositif d’aide aux entreprise­s victimes de la hausse des coûts énergétiqu­es.

- PROPOS RECUEILLIS PAR ERIC GALLIANO egalliano@nicematin.fr

Gabriel Attal, ministre des Comptes publics, inaugure aujourd’hui à Toulon un nouveau dispositif d’aide aux entreprise­s.

Pourquoi cette visite ?

Nous sommes aux côtés des entreprise­s et des salariés. Certaines entreprise­s particuliè­rement consommatr­ices en énergies, dans le secteur de l’agricultur­e, de l’industrie ou des nouvelles technologi­es, sont directemen­t frappées par la hausse du prix de l’électricit­é ou du gaz. Nous mettons donc en place un nouveau dispositif national avec une aide financière importante pour compenser cette hausse des coûts. L’équipe qui le pilotera sera basée dans le Var, à la direction des finances publiques de Toulon. Je me rendrai également dans une entreprise qui pourrait être éligible à ce dispositif. Il s’agit d’un « data center » récemment inauguré à Toulon qui consomme beaucoup d’électricit­é pour faire fonctionne­r ses serveurs.

Concrèteme­nt, quelles seront les formalités à accomplir par les entreprise­s ?

Celles qui sont éligibles pourront déposer un formulaire dès lundi prochain. Ce dispositif s’adresse aux entreprise­s qui sont à ce point consommatr­ices d’énergie que la hausse des prix met en péril leur situation financière. C’est-à-dire celles dont les achats de gaz ou d’électricit­é représente­nt au moins 3 % de leur chiffre d’affaires, et qui ont vu leur facture doubler par rapport à 2021.

Aider les entreprise­s et maintenir le pouvoir d’achat des Français, cela va de pair ?

Une entreprise qui met la clé sous la porte, ce sont des salariés qui se retrouvent sans emploi. Tout ce qu’on a fait pendant la période Covid et ce que nous continuons à faire aujourd’hui, c’est justement donner la possibilit­é à des entreprise­s de passer ce cap difficile. Et donc permettre aussi à des salariés de continuer à bénéficier d’un emploi.

Vous faites le parallèle avec la crise Covid. Aujourd’hui, faut-il revalorise­r le pouvoir d’achat des Français « quoi qu’il en coûte»?

Nous sommes sortis du quoi qu’il en coûte, mais nous poursuivon­s une politique de protection du pouvoir d’achat des Français. On le fait en étant rigoureux et responsabl­es avec les finances publiques. Parce qu’on ne peut pas laisser filer la dette et les déficits. C’est un enjeu d’indépendan­ce pour la France. Un pays qui dépend à long terme des marchés financiers n’est plus un pays libre. C’est pourquoi nous remettons le pays sur une trajectoir­e de réduction des déficits publics tout en protégeant le pouvoir d’achat des Français. Cela peut paraître contre intuitif mais c’est possible.

Voire paradoxal ?

C’est possible grâce à ces mesures que nous avons prises pour continuer à développer l’activité économique. Le résultat, c’est un taux de chômage qui n’a jamais été aussi bas depuis 15 ans. Cela nous permet de moins dépenser en assurance chômage et, surtout, d’encaisser plus de cotisation­s sociales. Cette année, nous avons enregistré 55 milliards de recettes supplément­aires grâce à ce redémarrag­e de l’activité économique. Pour l’instant, les mesures engagées pour la lutte contre l’inflation représente­nt environ 25 milliards d’euros. Le projet de loi en cours de préparatio­n sur le pouvoir d’achat est estimé à environ la même chose. C’est donc tenable.

Avec une inflation qui s’envole, ces mesures ne risquent-elles pas d’être vaines ?

La hausse des prix est une réalité. Elle est mondiale. Certes, l’inflation en France est trop élevée, mais elle l’est nettement moins que dans d’autres pays. Elle devrait être d’environ 5 % cette année dans notre pays, alors qu’elle est de l’ordre de 7 à 8 %, parfois même 10 % chez nos voisins. Nous avons donc réussi à la contenir, et c’est ce que nous allons continuer à faire.

Dans le même temps vous tirez la sonnette d’alarme sur l’état des comptes publics...

La France réduit progressiv­ement son déficit. Il était de 8,9 % en 2020. L’an dernier, nous l’avons ramené à 6,4 %. Cette année, il sera de5%.Etonprévoi­tun déficit à 3 % en 2027. Parce que la situation a changé ces dernières semaines : là où la France pouvait emprunter de l’argent quasiment gratuiteme­nt, les taux se rapprochen­t désormais des 2%.

Le dogme de la réduction des déficits, qui avait pourtant volé en éclats, est donc de retour ?

Il a été temporaire­ment mis de côté pendant la crise de la Covid parce que c’était nécessaire. Aujourd’hui, nous avons le taux de chômage le plus bas depuis 15 ans, l’INSEE table sur une création de plus de 200 000 emplois nets en 2022, et notre croissance reste robuste. Le temps de l’argent gratuit est donc derrière nous. La charge de la dette nous coûte cette année 17 milliards d’euros de plus. C’est deux fois le budget de la Justice. On voit bien à quel point il est nécessaire de progressiv­ement réduire le déficit et désendette­r le pays. Sinon, à la fin, la charge de la dette deviendra tellement lourde que nous ne pourrons plus financer un certain nombre de services publics essentiels pour les Français.

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(Photo HDS) Gabriel Attal lors d’une visite dans le Var en janvier 2022.

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