Emilio Giagnoni relève LA CUISINE ITALIENNE AU NOTO
À 32 ans et après être passé par des maisons prestigieuses, dont le Four Seasons Hôtel George V à Paris, le jeune chef sarde règne désormais sur les délices du restaurant tropézien.
Cheveux bruns noués sur un catogan élégant. Boucles dorées à chaque oreille. Tatouages en vagabondage sur la peau. Dont une phrase, en paix, de Bob Marley. De prime abord, Emilio Giagnoni a plus l’allure d’un pirate des Caraïbes que d’un chef italien. Sauf qu’à 32 ans, le Sarde a déjà pas mal roulé sa bosse au piano !
Dans les pas de Giuseppina
À commencer par celui de sa grandmère, Giuseppina. Chez qui, lycéen, il déjeunait tous les midis. «Etjamais le même plat », se souvient le bambino nostalgique. « C’était une cuisinière hors pair. Il faut dire que mon grand-père était gourmand. » Comme lui, qui n’hésitait pas à mettre le nez dans les casseroles. Les livres de recettes, aussi. Sans jamais toucher aux fourneaux. « Elle me l’interdisait. » Depuis, le petit s’est rattrapé. Passant par une école de cuisine privée en Italie, près de Parme, l’Alma. Premiers pas de son odyssée gourmande.
« Je ne voulais pas aller à l’université. J’avais le sentiment profond qu’une autre voie m’était promise. » Il part alors de zéro. Juste avec sa passion naissante. Mais le talent est là. Remarqué précocement, lors de ses stages. Puis chez l’étoilé Parizzi, où il débute commis. Avant de gravir quelques marches. Lesquelles le mèneront au Four Seasons, à Milan. Aux côtés du chef
Sergio Mei, il apprend. S’endurcit. Se perfectionne. « J’ai acquis une palette complète de la cuisine italienne régionale. » Qui le propulsera, toujours au Four Seasons, mais à Paris cette fois. Plus précisément à l’Hôtel George V. À nouveau en bas de l’échelle...
Or, il en faut plus pour décourager ce corsaire qui, à force de volonté et de créativité, devient le souschef de la référence Simone Zanoni. Ensemble, ils développent des recettes inédites de pasta et sillonnent le monde en quête d’inspiration.
Jusqu’à venir jeter l’ancre à SaintTropez. Au coeur (vivant jusqu’au bout de la nuit) de l’élégant Noto. Désormais sa maison réanimée par sa cuisine inventive.
« Je connaissais un peu le village. Enfant, avec mes parents, on a visité la France. La Normandie, la Bretagne, l’Alsace et le Sud. »
Entre tradition et modernité
Ce Var qui lui rappelle, par quelques aspects, son fief sarde, Olbia. Ce Var qui est venu le chercher à la Capitale. « Après sept ans là-haut, j’ai reçu cette offre intéressante. Devenir le chef d’un bel établissement, ça ne se refuse pas. Et puis j’ai senti que c’était le bon moment. Même si on n’est jamais prêt à 100 %. » Peut-être que le soleil lui manquait aussi à Emilio. Le soleil et la mer bleue. Ingrédients en accord parfait avec la farandole de ses plats. À sa buratta des Pouilles à la truffe. À sa chair de King crabe et gaspacho de tomates. À sa fameuse fregola sarda, artichauts et poutargue.
Une carte riche des délices de son pays. Qu’il magnifie en un tour de main expert. « Avoir la possibilité de créer une cuisine à son image, c’est fabuleux. C’est un luxe. » Une cuisine italienne traditionnelle, avec une touche de modernité. De flamboyance, acquise au gré de ses escales professionnelles.
Un amoureux des légumes
« J’aime travailler le produit. Révéler ses saveurs. Ses couleurs. J’aime les légumes. Les artichauts, les aubergines, les poivrons. Il y en a de magnifiques, ici. J’aime les poissons aussi, notamment le rouget de roche et le poulpe. »
Il aime par-dessus tout cette cuisine de partage. Si méditerranéenne. Qui lui ressemble. Il n’y a en fait qu’un coquillage qui le rebute : l’huître. « À cause de sa texture. Je n’y arrive pas. » Elle n’est pas au menu, voilà qui tombe à pic.
De toute façon, les perles ne manquent pas dans les assiettes du Noto. Tableaux raffinés, nés de l’imagination d’un pirate en perpétuelle chasse aux trésors. D’un Emilio Giagnoni dont on ne peut que devenir le premier tifosi ! > Noto. 5, place des Lices, à Saint-Tropez. Ouvert tous les jours, de 19 h 30 à 03 h. Antipasti à partager de 16 à 43 euros. Pâtes environ 30 euros. Poisson et viande de 22 à 60 euros. Rens. 04.22.47.10.50. noto-sttropez.com
« Devenir le chef d’un bel établissement, ça ne se refuse pas »