Coup de couteau à Nice : « Je suis choqué par ce que j’ai fait »
Othman B., 27 ans, baisse la tête. Il vient de regarder les images de vidéosurveillance où il est filmé en train d’agresser un passant. Un coup de couteau gratuit, sans la moindre raison, rue de la Préfecture à Nice, le long du palais de justice. Hier, devant le tribunal correctionnel, le prévenu qui comparaît libre après quatorze mois de détention provisoire, se dit « choqué » : « Je ne comprends pas ce qui s’est passé dans ma tête. »
Violent avec sa compagne
Dès sa garde à vue, il avait eu la même réaction. La soirée avait été très arrosée. Il était 5 h 30 du matin le 6 septembre 2020. Sous l’effet d’un litre de vodka, Othman B. et Sabri B. sont filmés titubants. Les deux compagnons de beuverie croisent Adel, un technicien en informatique.
La victime, qui n’a toujours pas pu reprendre son travail, se remémore la scène : « Je rentrais de soirée avec un ami. Nous n’étions pas ivres du tout. Sabri B. m’a interpellé en me disant : “Trace ta route, mon collègue a un couteau.” Je lui ai demandé pourquoi il me disait cela, je n’ai rien compris. J’ai senti un coup et là, j’ai vu le sang. » Les agresseurs fuient à pied. Adel est plié en deux. Des touristes passent sans même s’arrêter, mais des témoins se précipitent pour limiter l’hémorragie et appeler les secours. Othman B. sera retrouvé le lendemain midi en garde à vue à Antibes. Après avoir porté le coup de couteau, il a agressé sa compagne dans leur chambre d’hôtel.
Cette nuit apparaît comme le point d’orgue d’un comportement agressif qui lui avait valu déjà plusieurs condamnations. Aujourd’hui, Adel se sent en insécurité permanente. « Je n’accepte pas qu’on ait voulu m’enlever la vie aussi facilement », dit-il, sans pouvoir croiser le regard de son agresseur. « Sa vie sociale, sa vie familiale ont basculé », rappelle Me Kim Camus. La procureure Charline Hamon ne cache pas qu’elle va demander que le prévenu retourne en prison. La magistrate requiert cinq de prison, dont 18 mois avec un sursis probatoire.
Le compagnon de beuverie absent
Contre le co-prévenu, poursuivi pour non-assistance à personne en danger et qui serait actuellement en Tunisie, expliquant ne pouvoir comparaître en raison de la Covid, trente mois d’emprisonnement sont demandés assortis d’un mandat d’arrêt. « Je n’entends ni minimiser, ni excuser, ni légitimer le geste d’Othman B.. Mais on n’a pas besoin de noircir un dossier qui l’est déjà autant », prévient Me Audrey Vazzana, à l’adresse de la procureure. La pénaliste peut s’appuyer sur l’expertise psychiatrique, qui évoque « une évolution favorable » du prévenu. « L’administration pénitentiaire lui a fait confiance et lui a permis de travailler et de se désintoxiquer, martèle-t-elle. La juste doit tenir compte de ses efforts. Ne peut-on pas envisager autre chose qu’une nouvelle incarcération ? »
Le tribunal a entendu la défense, en infligeant quatre ans de prison à l’agresseur. Deux ans sont assortis d’un sursis probatoire avec l’obligation de travailler, de se soigner et d’indemniser la victime. Les mois de prison ferme qui restent à purger le seront sous surveillance électronique. Adel, dont la santé reste précaire, a obtenu 10 000 euros de provisions avant que son préjudice ne soit réellement évalué par les experts.