Retraites : le soutien des députés LR pas si assuré
Entre une dizaine et une vingtaine, voire davantage, seraient prêts à ne pas voter le texte, ce qui pourrait priver l’exécutif du nombre nécessaire de voix.
Leurs chefs de file se félicitent d’avoir imposé leurs conditions à la réforme des retraites. Mais certains députés LR tiquent encore, menaçant de ne pas voter le texte. Combien sont-ils à douter, parmi les 62 élus du groupe à l’Assemblée ? Une dizaine, une petite vingtaine, voire plus ? Les spéculations vont bon train. « Aujourd’hui, il y a moins de la moitié des députés qui sont d’accord pour voter la réforme », assure l’un des frondeurs les plus virulents, appelant les siens à pousser leur avantage en continuant « de demander toujours plus » à l’exécutif. « Élisabeth Borne n’a pas les 40 députés LR prêts à voter la réforme », affirmait mercredi au Journal du dimanche le député du Haut-Rhin Raphaël Schellenberger.
« Aile démagogique »
Il va falloir les « convaincre un par un» , estime le député « Renaissance » Marc Ferracci. Mais ils «ne cherchent pas à être convaincus parce qu’en réalité, ils n’ont pas intérêt à voter » la réforme, estime un cadre du parti macroniste.
Les dirigeants de LR – le patron du parti Éric Ciotti, Olivier Marleix qui préside le groupe à l’Assemblée, et Bruno Retailleau celui du Sénat – avaient pourtant affiché leur satisfaction à l’issue d’un entretien à Matignon avec Élisabeth Borne. « Les
bases d’un accord sont posées », affirmait après la rencontre Bruno Retailleau. Un « succès » dû « aux Républicains » selon Éric Ciotti, qui a depuis répété son souhait de « pouvoir voter cette réforme ».
Difficile, pour la droite, de voter contre un texte dont les grandes lignes rejoignent ce qu’elle plaide depuis des années. « S’ils étaient au pouvoir, ils défendraient une réforme assez similaire », souffle un député macroniste, déplorant qu’il y ait « une aile démagogique chez les LR qui prend parfois le dessus » et laisse planer le doute sur son vote.
Pour Annie Genevard, secrétaire générale du parti, ces réserves d’une partie des députés s’expliquent par « des questionnements sur la stratégie et sur le fond ». Sur le premier point, certains sont très conscients du risque de passer dans l’opinion pour les supplétifs de la majorité. Le rôle pivot de LR leur permet aussi de faire monter les enchères : « Il faut tenir le bras de fer, le match, jusqu’au bout », assure Aurélien Pradié, nouveau viceprésident du parti. Dans cette optique, « l’objectif est que le gouvernement recule » sur les carrières longues, ajoute le député du Lot, qui plaide pour qu’avant 21 ans, la durée de cotisation prime sur l’âge légal. « Sinon, je voterai contre », ajoute-t-il en dénonçant « le poison de l’injustice ».
« Terriblement comptable »
Héraut de la « droite populaire », Xavier Bertrand avait fait état mardi de « divergences » sur le sujet avec Éric Ciotti. « Aujourd’hui, on a une réforme terriblement comptable et la justice est quasiment inexistante », affirmait le président des Hautsde-France. Certains députés s’inquiéteraient de l’acceptabilité sociale de la réforme dans leur circonscription. « Ils ne mouftent pas dans les médias, mais sont très remontés » parce qu’« aux cérémonies de voeux, les gens sont venus leur parler », notamment ceux qui ont commencé à travailler tôt, assure un député critique. Qui assène qu’aux dernières législatives, « c’est pas les CSP+ qui nous ont sauvés ». Au final, Emmanuel Macron pensait « qu’il pourrait compter sur les voix de LR et celles de Liot », mais ce petit groupe indépendant est vent debout contre le recul de l’âge légal, observe-t-il. Selon lui, une « motion de rejet préalable » contre la réforme aurait, en fonction de qui la présente, une chance d’être adoptée à l’Assemblée.