Harpignies UN BEAULIEU DE RÊVE
L’artiste a peint la Côte d’Azur telle qu’elle était à la fin du XIXe siècle.
Que le rivage de Beaulieu nous semble doux ! Personne à l’horizon... Si, peutêtre, un pêcheur dans une barque. Et encore... Nulle autre présence humaine. L’intimité du contact avec la nature. Un bonheur de vivre. La douce lumière d’une fin de journée. Dans ce tableau signé Henri-Joseph Harpignies, daté de 1891, qui est conservé au Musée des explorations du monde à Cannes, nous nous trouvons sur le chemin qui va de Beaulieu à Saint-Jean-Cap-Ferrat. Combien de célébrités, de têtes couronnées, le parcourront par la suite ! Mais, à l’époque, le tourisme n’a pas pris son essor en cet endroit de la Côte d’Azur. Parmi les gens célèbres, Nietzsche est venu y promener ses interrogations existentielles. L’endroit est clairement identifiable par la présence, au loin, du sommet de la Tête de chien, laquelle domine de toute sa blancheur calcaire Cap d’Ail et Monaco. On distingue aussi, le long de la côte, la trace du train qui passe depuis 1868 et de la Basse corniche, achevée en 1883.
Un premier séjour en 1883
Henri-Joseph Harpignies est un peintre né à Valenciennes en 1819, dans une famille fortunée d’origine belge. Presque autodidacte, il se rapproche des peintres de l’école paysagiste de Barbizon et de Camille Corot. Apprécié pour l’originalité de ses coloris, pour la fluidité de sa peinture, il jouit d’une grande influence dans les milieux mondains parisiens où sa conversation est aussi appréciée que ses talents picturaux. Son atelier à Paris est fréquenté par des élèves du beau monde – élèves essentiellement féminines.
D’après l’historien Jean-Paul Potron (dans Paysages de Nice, éditions Giletta), le premier séjour d’Harpignies dans le Midi remonte à 1883 à Cannes. Il avait déjà 64 ans. En 1884, il suivit à Beaulieu une de ses élèves, la princesse d’Arenberg, qui y possédait une villa où elle se rendait chaque hiver. Il y reviendra au cours des hivers suivants, profitant de sillonner la Côte d’Azur de Cannes à Menton, en passant par Antibes et Nice. Ses toiles en portent témoignage.
À partir de 1888, il envoie régulièrement des tableaux de paysages du Midi au Salon de Paris, permettant aux visiteurs de découvrir une région à laquelle l’écrivain Stéphen Liégeard vient de donner son nom de Côte d’Azur.
Influence impressionniste
« On constate chez Harpignies une influence des jeunes peintres impressionnistes, commente Marija Matejcic, chargée de collection au Musée des explorations du monde de Cannes. Il emploie une touche claire, lumineuse, vibrante pour évoquer le souffle léger du vent dans les feuillages, ou une touche épaisse pour le rendu de l’ombre. » L’observation du paysage au travers d’un écran d’arbres est quelque chose que l’on retrouve dans beaucoup de peintures d’Harpignies. Un tableau de la baie de Beaulieu, à peu près semblable à celui-ci, est conservé au Musée des Beaux-Arts de Montréal. Preuve qu’Harpignies est venu planter son chevalet à plusieurs reprises en ce même lieu. Comme on le comprend !
Apprécié pour l’originalité de ses coloris, Harpignies jouit d’une grande influence dans les milieux mondains parisiens