Mariage pour tous : dix ans après, presque tous les politiques s’invitent à la noce
C’était il y a dix ans hier : le 23 avril 2013, la loi instaurant le « Mariage pour tous » était définitivement adoptée par l’Assemblée nationale, après six mois d’importantes mobilisations des opposants dans la rue et de vifs débats dans l’hémicycle. Une décennie plus tard, cette réforme emblématique du quinquennat de François Hollande, portée par la garde des Sceaux Christiane Taubira, est entrée dans les moeurs, avec 70 000 unions de couples de même sexe au total, et fait l’objet d’un consensus presque complet dans le monde politique.
« Je me suis trompé »
Pour preuve, les « coming-out » sur le sujet, la semaine dernière, de l’actuel ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et de celui de la Transition écologique, Christophe
Béchu. Alors qu’ils avaient combattu le texte à l’époque, ils expliquent désormais avoir changé d’avis. « Je me suis trompé. Si c’était à refaire, je voterais le texte », a ainsi confessé jeudi le ministre de l’Intérieur, régulièrement tancé pour avoir participé aux cortèges de « La Manif pour tous » et avoir déclaré, à l’époque, qu’il ne marierait pas de couples de même sexe.
Ils sont loin d’être les seuls. « Beaucoup d’élus [qui y étaient opposés] se sont amendés », confirme Arnaud Alessandrin, sociologue et co-auteur de Mariage pour tous : la violence d’une conquête. Ont ainsi viré leur cuti, après un plus ou moins grand nombre d’années, Valérie Pécresse, Christian Estrosi, Éric Ciotti, Damien Abad, Jean-François Copé ou Éric Woerth, entre autres. Sachant, aussi, que certains n’étaient pas forcément opposés au mariage en lui-même, mais bien au volet « filiation » de la loi.
« Ce que disent nombre d’entre eux, c’est que la société a assimilé le Mariage pour tous, alors qu’[en fait], il n’y a jamais eu de majorité contre », souligne Arnaud Alessandrin. Parmi les rares figures publiques à continuer à s’y opposer figurent François-Xavier Bellamy et Éric Zemmour.
Plus imaginable de revenir dessus
Mais les prises de position passées ont laissé des traces, et parfois rattrapé, au fil des ans, des membres du gouvernement : outre Gérald Darmanin, on peut citer Jacqueline Gourault, JeanBaptiste Lemoyne ou encore l’actuel ministre des Armées, Sébastien Lecornu. Cela aurait aussi largement joué dans le fait que la LR Catherine Vautrin soit finalement écartée pour Matignon, au profit d’Élisabeth Borne. Globalement, en tout cas, « les électeurs de droite sont devenus beaucoup moins hostiles » sur ce sujet, constate le politologue Jean-Daniel Lévy. Et donc « les figures politiques se doivent de tenir compte de cette évolution du corps électoral ». Au point qu’« un homme politique qui serait encore contre le Mariage pour tous aujourd’hui a très peu de chances d’être élu en 2027 », estime-t-il. Aucune des figures pressenties pour être candidat à l’Élysée dans quatre ans ne compte d’ailleurs revenir sur la loi, y compris Marine Le Pen, qui le promettait pourtant à l’époque.