Sciences Po au coeur de la controverse
À l’initiative d’étudiants, le campus mentonnais a accueilli une conférence sur la Palestine avec des militants LFI et des modérateurs. L’affront de trop pour certains.
Spécialisé dans le Moyen orient et la Méditerranée, le campus mentonnais de Sciences Po ne pouvait pas rester en retrait du débat – souvent brûlant – autour du conflit israélo-palestinien. Surtout depuis l’attaque du Hamas perpétrée en Israël le 7 octobre dernier. Mais depuis plusieurs mois, l’établissement cristallise les émois. Tout a commencé le 8 octobre avec un post Instagram de l’initiative étudiante « Sciences Palestine » (rebaptisée Palestine UTS) qui s’apparentait pour certains à de l’apologie du terrorisme. Quand d’autres auront parfois reconnu dans ces lignes le vocabulaire de La France insoumise (LFI). La direction du campus avait alors convoqué les étudiants concernés (moins de dix) pour un rappel à la loi. Avant que le post ne soit retiré. Plaidant la fougue de la jeunesse, Sciences Po ne tarde pas à se positionner pour apporter une réponse académique. Via des conférences étayées, et via un cours animé par le Professeur de science politique à l’université libre d’Israël Denis Charbit – afin d’expliquer l’histoire du conflit en prenant de la hauteur. Mais d’après un article récent du Point, il n’en demeure pas moins que l’ambiance sur place serait délétère, les quelques étudiants juifs rapportant des préjugés antisémites et affirmant être ostracisés.
Une décision en justice
La « Semaine de la Palestine » qui se tient actuellement sur le campus n’est pas venue arranger les choses. Organisée hier par Palestine UTS et la section Nupes du campus, la conférence « Pointer l’injustice, regards politiques sur la question
palestinienne » réunissait dans ce cadre l’élu Manuel Bompard (LFI) et la candidate insoumise aux élections européennes – pro palestinienne – Rima Hassan. Un temps annoncé, le député EELV Aurélien Taché ne semble pas s’être rendu sur place.
Avant même la tenue de cette conférence, l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) dénonçait une « propagande haineuse ». D’après Le Figaro, la direction de Sciences Po aurait imposé certaines conditions aux organisateurs. Notamment l’enregistrement des échanges, ainsi que la présence d’universitaires en sciences politiques et en histoire pour assurer une forme de modération. Tout public extérieur
a par ailleurs été dans un premier temps proscrit. Jusqu’à ce que le tribunal administratif de Nice, saisi par la Nupes, fasse sauter cette interdiction pour les militants. Mais pas pour la presse.
« On ne comprend pas cette censure »
Maître Sefen Guez-Guez, avocat au Barreau de Nice et intervenant légal dans cette affaire, assure que cette décision « fait jurisprudence, confirmant qu’à Sciences Po, les débats sur des sujets sensibles comme la question palestinienne sont légitimes ». Rima Hassan, juriste et activiste, exprime quant à elle son désarroi face aux polémiques. « C’est une conférence d’experts d’un sujet, répondant
à un besoin des étudiants d’être éclairés sur un thème d’actualité. On ne comprend pas cette censure. Il n’y a aucun autre sujet qui fait l’objet de ces restrictions ».
Pour un étudiant, l’essentiel est « de pouvoir s’exprimer sur ces causes ». « On nous prête des propos et des intentions qui ne sont pas les nôtres, on déforme le message que l’on souhaite porter, qui est d’ouvrir une conversation sur la question, complète-t-il. Nous réfléchissons d’ailleurs à porter en justice des associations et des journaux qui ont des propos calomnieux à notre encontre ».