À Jérusalem, une Niçoise et une Varoise « en alerte »
Claude, Niçoise, et Salomé, qui a grandi à Draguignan, habitent aujourd’hui près de Jérusalem. Elles racontent leur vie en Israël depuis les attaques de l’Iran.
I «sraël est en guerre pratiquement depuis sa création. En revanche, l’attaque massive de l’Iran a franchi un degré bien supérieur. C’était impressionnant. Ça fait peur, mais je crois que nous ne devrions pas être les seuls à avoir peur », réagit Claude Taieb, jointe par téléphone depuis Bayit Vegan, un quartier périphérique de Jérusalem. L’enseignante de 72 ans et son époux Paul, médecin généraliste de 73 ans, ont quitté Nice il y a 12 ans pour s’installer en Israël.
« Ce qu’a fait l’Iran est selon moi une erreur, reprend l’enseignante. L’Iran ne sera plus regardé de la même façon. L’Occident et les pays arabes ont certainement compris que l’Iran n’aura pas peur d’aller jusqu’au bout ni de faire un carnage dès qu’il lui en prendra l’envie. » « L’Iran veut notre destruction, ça, on le sait. Ce déploiement d’armes de destruction massive, je crains fort que ce ne soit pas le dernier. Peut-être que cette fois, le monde entier va comprendre que l’Iran est un très dangereux ennemi et pas seulement pour Israël. J’avoue qu’on ne se sent pas à l’abri. »
« On a l’impression que le temps est suspendu »
« Heureusement, la vie continue, poursuit la septuagénaire. On est bien obligés de vivre avec. Les vols ont repris mais pas pour toutes les compagnies parce qu’il y a en suspens cette riposte qui
est attendue. Aura-t-elle lieu ? Sous quelle forme ? Ça, on ne sait pas. Le climat est tendu mais en même temps, je ne sais pas comment expliquer, c’est très étrange, on a l’habitude de ça. On a l’impression que le temps est suspendu, mais on a une belle fête à préparer, Pessah (la Pâque juive, qui commence le 22 avril, Ndlr). »
Avant de raccrocher, Claude tient à dire combien « l’attitude de certains pays, notamment la France, qui a aidé Israël à contrecarrer cette attaque massive, nous a touchés. Jusque-là on avait l’impression qu’il y avait une forme d’indifférence de la France. Elle restera notre pays, nous l’aimons. Cette manifestation, elle nous a fait du
bien. On verra si elle continuera. »
Vacances scolaires avancées
En Israël, depuis les attaques de l’Iran dans la nuit de samedi à dimanche, « les écoles sont fermées. Les vacances scolaires ont été avancées. Mais les gens vont au travail. Je n’ai pas entendu de restriction particulière », témoigne quant à elle Salomé. La jeune femme de 28 ans, qui a grandi à Draguignan, vit aujourd’hui à proximité de Jérusalem. Il y a six mois, elle a rejoint l’armée, en tant que réserviste, dans l’opérationnel. « La situation peut changer à la dernière minute, en fonction de ce qui se passe. On nous met
quand même en alerte sur d’éventuelles attaques en cas de réponse d’Israël. Pour le moment, comme il n’y a pas de réponse... Dans le pays, il y a une pénurie de générateurs. J’ai des copines qui ont fait des stocks de lait en poudre pour leurs bébés », poursuit Salomé, jointe par téléphone, avant de revenir sur cette nuit d’angoisse.
« Ça faisait quelques jours qu’on entendait que l’Iran, l’Irak, le Yémen allaient envoyer des missiles, des drones, mais on ne savait pas encore quand, ni combien, ni comment. Samedi soir, on a appris que tous les missiles et les drones étaient partis d’Iran. Jusqu’à ce qu’ils arrivent, vers 2 heures du matin, l’attente était interminable. On se demandait ce qu’on allait prendre sur la tête. Ça faisait peur, surtout quand on connaît les capacités de l’armement iranien. Malheureusement, depuis le 7 octobre [jour des attaques du Hamas sur Israël], je crois qu’on est un peu prêts à tout », souffle-t-elle.
« Comme des comètes qui tombaient »
«Tout le pays était en alerte rouge. Dans le ciel, on a vu comme des comètes qui tombaient, décrit-elle. Contrairement aux roquettes, qui sont plus petites, les drones et les missiles, c’est absolument énorme. Mon copain et moi, on était à la maison. On avait l’abri antimissile prêt. On entendait explosions sur explosions. Je n’étais pas très rassurée. »
« Le lendemain, les vols ont repris depuis et à destination d’Israël. Je suis allée chez Ikea. Le magasin était plein. On ne peut pas vivre tous les jours dans la peur, sinon on ne s’en sort plus. Je fais confiance à mon armée, à mon pays, aux pays de la coalition. On vit au jour le jour. La guerre est longue. Mais ce qui est le plus démoralisant, ce sont les otages, parce que les jours passent, on sait ce qu’ils endurent et on ne les a pas. » En attendant un quotidien apaisé, Salomé regarde vers l’avenir et prépare son mariage, fixé en juin. En espérant que sa famille de France, son père, ses tantes et ses cousins ainsi que la famille de son compagnon, qui est niçois, puissent tous être présents.