Sale temps pour les jeunes
Je n’avais pas 20 ans quand les terroristes d’Al-Qaida détournèrent les vols 11 de la United Airlines et 175 de l’American Airlines pour les encastrer dans les deux tours du World Trade Center, le 11 septembre 2001. Je me souviens très bien de ce jour-là, comme chacun d’entre vous je suppose. J’étais – alors étudiant – avec un ami dans une librairie cannoise quand j’ai appris la nouvelle. Le monde allait changer, même si nous, jeunes Français à l’époque, avions été jusque-là épargnés par les vicissitudes d’une période à nouveau troublée. Jamais, à cet âge-là, l’éventualité de la guerre ne m’avait traversé l’esprit. La démocratisation d’Internet laissait entrevoir les contours d’une mondialisation que l’on pensait encore heureuse. Les compagnies low cost nous offraient les capitales européennes à portée de bourse. La formule reprise par Chirac “Notre maison brûle, mais nous regardons ailleurs” n’avait pas encore éveillé une conscience écologique.
Étais-je naïf ? C’était il y a 20 ans, mais pour les jeunes d’aujourd’hui, la musique désormais illimitée sonne tout autrement. Selon une étude publiée vendredi par le Cevipof, un sur deux pense qu’une guerre mondiale et nucléaire est possible. 73 % se disent inquiets que la guerre en Ukraine s’étende au-delà des portes de l’Europe, 62 % se disent favorables à un nouveau service militaire obligatoire, quand les derniers appelés rentraient chez eux en… 2001. C’était il y a 20 ans, et depuis, cette génération a grandi avec la guerre en Irak, en Syrie, en Ukraine et au Moyen-Orient, Daech et les attentats terroristes sur notre territoire, la crise de 2008, la pandémie, elle vit le changement climatique et le retour du nationalisme. En cette année, 80e anniversaire des débarquements et libérations, où le Président multiplie – hier encore dans le Vercors – les discours historiques à travers une itinérance mémorielle, je me demande si j’aimerais avoir à nouveau 20 ans.
« Jamais, à 20 ans, l’éventualité de la guerre ne m’avait traversé l’esprit. Étais-je naïf ? »