Monaco-Matin

« Ça monte en puissance »

Va porter deux casquettes ce week-end : président du circuit et pilote de F1 en mode démo avec quelques amis célèbres. Avant le top départ, il détaille le menu des réjouissan­ces.

- PROPOS RECUEILLIS PAR GIL LÉON

Après deux tours de chauffe à Magny-Cours, le voilà qui passe déjà la quatrième en terre varoise. Aujourd’hui, demain, dimanche, le Grand Prix de France Historique sera l’occasion de faire le plein des sens pour les nombreux accros de mécanique vintage attendus au Castellet. Côté paddock, avec une multitude d’animations et d’exposition­s, et côté piste où plusieurs « pointures » vont remonter le temps volant en main lors des parades programmée­s entre les courses : Alain Prost, Gerhard Berger, Jacky Ickx, René Arnoux... ainsi qu’un certain Jean Alesi. Pour ce rassemblem­ent rugissant marqué du sceau du souvenir, le président du circuit Paul-Ricard sort du placard son habit de lumière rouge Ferrari. Contact !

Jean, peut-on dire que ce Grand Prix de France Historique est l’événement qui vous tient le plus à coeur parmi la trentaine composant le calendrier 2024 du circuit Paul-Ricard ? Écoutez, je vais vous répondre en citant l’une des phrases les plus célèbres d’Enzo Ferrari :

« La course la plus importante, c’est la prochaine ! » Le circuit possède des équipes aguerries, capables de bien accueillir toutes les discipline­s. Quand il s’agit de Formule 1, évidemment, je suis dans mon domaine, je me sens concerné, je peux m’impliquer de manière efficace. En toute modestie, je suis un peu imbattable, voilà ! (il éclate de rire) Tout se présente bien. Regardez les têtes d’affiche : magnifique, non ? La seule ombre au tableau, c’est le Grand Prix de Chine qui se déroule en même temps. Sans cette concordanc­e de dates, nul doute qu’on aurait pu réserver d’autres surprises au public.

Des grands noms de la Formule 1 ont répondu à l’appel cette année. Ça, c’est l’effet Alesi, hein ?

Moi, je préfère parler de l’effet Paul-Ricard... Pour les amateurs sudistes de sport auto, ce circuit, c’est le Vatican ! En tant que président, aujourd’hui, je fais le maximum pour qu’il continue de faire vibrer les gens, pilotes et spectateur­s, à travers des rendez-vous comme celui-ci. En effet, j’ai demandé à des amis de longue date de se joindre à nous. Alain (Prost) avait dû renoncer l’an dernier. Cette fois, il vient. Gerhard (Berger) aussi ! C’est super. Ça me touche.

Vous a-t-il fallu consommer beaucoup de salive pour les convaincre ?

Non, parce qu’ils sont ravis de refaire un bout de chemin en démonstrat­ion ici au volant d’une voiture qui a beaucoup compté pour eux. Alain va retrouver la F1 de ses débuts au top niveau : la McLaren M29 de 1980. Un truc de fou ! Quant à Gerhard, il roulera à bord d’une ancienne McLaren de son ami Ayrton Senna : la MP4/6 Honda de 1991. La saison du troisième et dernier titre suprême de celui qui était alors son coéquipier. Un poignant hommage en perspectiv­e pour commémorer les trente ans de la disparitio­n d’Ayrton...

Et Jacky Ickx ?

Ah je suis tellement heureux de l’accueillir !

Il fait partie des pilotes qui ont eu un lien direct, fort, avec Enzo Ferrari. L’autre jour, je regardai encore quelques superbes photos de cette époque.

Il a gagné le Grand Prix de France en 1968 (sur le circuit de Rouen-Les Essarts, ndlr). Là, on participer­a ensemble au show Ferrari F1, lui à bord de cette fameuse 312 dite « Spaghetti » en référence à ses tubulures d’échappemen­t entremêlée­s.

Quel bonheur !

Et vous ?

Moi, je retrouve la 412 T1B et son fabuleux moteur V12 3,5 litres. Mieux vaut tard que jamais ! Depuis la fin de ma carrière en F1, c’est la première fois que je vais me glisser dans le cockpit de l’une de mes anciennes Ferrari.

Quel souvenir marquant de la saison 1994 gardezvous en mémoire ?

Le meilleur, c’est la pole position obtenue à Monza, sans conteste. Mais vous savez que j’ai failli me tuer avec cette voiture ? Quatrième et cinquième vertèbres fracturées après un violent crash survenu au Mugello lors d’essais privés. Ce coup d’arrêt m’a mis sur la touche durant deux Grands Prix, dont la malheureus­e course d’Imola (leGPde Saint-Marin 1994, théâtre des accidents mortels d’Ayrton Senna et Roland Ratzenberg­er) où je n’étais pas présent.

Si on vous demande de classer vos ex-F1 frappées du cheval cabré par ordre de préférence, laquelle trône en pole position ?

(Il réfléchit) Peut-être celle de ma première saison en rouge (1991). Forte valeur émotionnel­le. Pareil pour celle de ma victoire (GP du Canada 1995). En fait, il y en a seulement une que j’aime un peu moins : la F93A (1993). À cause du large bandeau blanc sur le capot moteur, disgracieu­x, et de ses suspension­s actives qui ne marchaient pas...

Et si Frédéric Vasseur vous proposait de tester la SF-24 de Charles Leclerc et Carlos Sainz pour le fun, vous vous laisseriez tenter ?

(Il se marre à nouveau)

Oh que oui ! Mais je lui demanderai de m’envoyer le mode d’emploi une semaine avant. Pour apprendre par coeur toutes les procédures, il me faudra bien sept jours... et autant de nuits.

Pour les amateurs sudistes de sport auto, ce circuit, c’est le Vatican ! ”

En attendant, le grand tifoso de la Scuderia devant l’éternel que vous êtes va disputer les 200 Km du GPFH GT & Protos samedi soir au volant d’une Porsche 934 Turbo... C’est la première trahison de ce genre ?

Non, en 1989, j’avais découvert les 24 Heures du Mans sur une Porsche 962. Là, comme l’an dernier (alors à bord d’une Lotus Elan), j’honore l’invitation de mes amis Philippe Gache et Jean-Pierre Richelmi. Que voulez-vous ? Je n’ai

pas le choix. Ils m’ont encore puni (rires).

Pour conclure, Jean, ditesnous : puisqu’il s’agit déjà de la 4e édition au Castellet, le Grand Prix de France Historique et le circuit Paul-Ricard ont-ils signé un contrat à durée indétermin­ée ? Dans l’immédiat, je peux juste vous dire que nous pensons à l’an prochain. La F1 vient d’ailleurs de

publier son calendrier 2025. Ce serait bien de ne pas se trouver à nouveau en concurrenc­e avec une retransmis­sion. Ici, on fait le maximum pour que ce rendez-vous gagne en qualité. Pour que le plaisir, l’émotion, aillent crescendo. Bref, pour que ça monte en puissance, encore et toujours.

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 ?? ?? Jean Alesi : « C’est la première fois que je vais me glisser dans le cockpit de l’une de mes anciennes Ferrari (la 412 T1B, cidessous lors du Grand Prix de Monaco 1994 fini à la 5e place). »
Jean Alesi : « C’est la première fois que je vais me glisser dans le cockpit de l’une de mes anciennes Ferrari (la 412 T1B, cidessous lors du Grand Prix de Monaco 1994 fini à la 5e place). »

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